Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

samedi 28 mars 2009

In Former

Parler
Dire...
Expliquer...
Partager...

Pour compléter un peu le questionnement de l'article précédent,

Pour répondre autrement à une nouvelle demande, une nouvelle attente, une nouvelle écoute.
Une approche différente pour une écoute plus active, peut-être, ou pour une autre forme de demande, une autre manière de travailler, d'accompagner, de faire un bout de chemin avec.
Avec !

C'est ce petit mot qui change tout.
Avec signifie "présence physique simultanée" soulignant, dit encore le Robert, la "marque de relation"
J'aime le "cum" latin, accompagner....Avec

Mes activités à l'hôpital m'ont amenées à rencontrer des personnes dont la demande initiale n'était pas d'ordre psychologique. Pas essentiellement.
Ils n'étaient pas là pour ça.
Ils étaient là sans l'avoir souhaité, demandé....
Demandé ? Demande t-on à être malade, car c'est bien de cela qu'il s'agit
Malade, hospitalisation...
Demande oui, mais de guérison, d'aller mieux..

Cette demande là, résulte bien d'autre chose, d'une maladie, de troubles, d'une santé défaillante, d'une souffrance, d'une violence, d'une urgence, d'une addiction...
La demande n'émane pas toujours non plus du sujet lui même.
Qui ne demande rien, n'attent rien, de ce côté là....
Ignore même parfois cet aspect de la "prise en charge", du "protocole" mis en place par le spécialiste.... De cette possibilité, de ce rendez vous possible, de ce temps dans cet espace qui n'existe que parce que deux sujets justement se rencontrent, pour faire lien, pour donner du sens, à des choses, des événements qui n'en n'ont pas toujours ou qui n'en n'ont que trop !
Parfois cette rencontre, s'impose presque d'elle même : "en parler pourrait vous aider.."

Combien de fois ais je répondu et encore aujourd'hui au fameux "il faudrait voir.... Ce serait bien de faire le point avec...."
Avec...
Avec encore ! Le patient, le malade, le sujet
Celui qui doit envers et contre tous faire avec, ici et maintenant.
Mais pas avec n'importe quel "avec"

Car les malades ici et maintenant, ne sont plus vraiment seuls, depuis qu'ils sont malades..... Mais avec une drôle de compagne : une maladie, qu'ils font parfois "leur"... Leur, avec. Il leur faut faire avec, pour vivre avec.

Vivre ?
Vivre avec cette nouvelle invitée... Arrivée souvent sans frapper, ou au contraire en frappant fort, trés fort, trop fort !
Qui est-elle cette inconnue ? Celle avec qui il faudra désormais partager son quotidien, son demain ? Avec !
Car le futur souvent, quand futur il y a, et futur il y aura, sûrement, ne peut plus s'envisager sans ce nouvel hôte
Alors il convient peut-être de se présenter, de faire les présentations, de savoir à qui on a affaire, à faire, à qui ? Car cette terrible compagne, des bons et des mauvais jours ne doit pas rester une inconnue... Intruse elle est...
Qui, puisqu'on la fait sienne, puisqu'elle fait désormais partie de l'univers qui est celui du sujet
Puisque....
Qui est-elle?
Certains préfèrent ne pas savoir avec qui ils partagent leur vie, leur lit.... L'inconnu, leur convient, par défaut, par dépit, par soucis, par souciance, par conscience, par peur....Par désir, par souhait....
Partager son pain, sa vie, son demain, avec cette inconnue, l'ignorer, la snober....Mener ce combat
Certains préfèrent connaître l'adversaire, l'ennemi, l'attaquer à défaut de le battre sur son propre terrain, mais savoir, savoir qui il est, comment et de quoi il est fait, pour le défaire peut-être, mais au moins pour s'attendre à ses assauts, les repousser, ou y faire face du mieux qu'il peut, ou qu'il pourra, une autre fois, la prochaine fois.
L'inconnu devient l'objet d'une enquête, minutieuse et précise, documentée, recoupée, les indices sont vérifiés.... En véritable détective le sujet ne s'épargne rien, ni le passé, ni le présent, ni le futur, ni la fin. Il ne veut pas de surprise, il veut savoir, il veut comprendre....
Comprendre qui est cette inconnue, venue un jour prendre possession de sa vie, de lui....
Comprendre pour savoir qui il est à présent, qui il est devenu, lui et cette inconnue.
Lui avec cette inconnue. Lui et elle, lui et lui, elle et lui. Un duo, couple fusionnel, fusionné..

Alors informer ?
Informer de quoi ? Qui ? Quand ? Comment ? Pourquoi

Les éternelles questions, qui reviennent toujours, avec comme postulat de départ dire ou ne pas dire au sujet de quoi il souffre.
Car il faut nommer, mettre un nom sur....

Depuis la Loi Kouchner, le patient s'il le souhaite peut-être informé, doit l'être si tel est son désir, dans un langage clair, précis, compréhensible.
Ce point est essentiel, combien de fois ais je entendu des médecins user de leur jargon pour dire simplement que la maladie était longue, grave et parfois incurable. Méconnaissance ? Mécanisme de défense, oubli de l'autre, qui en face de lui ne comprenait pas, mais qui aurait du comprendre.... Qui devait comprendre, car ces mots barbares étaient ceux de son registre à lui...
Un peu de tout ça, bien sûr... Mais la peur d'affronter l'autre aussi, la peur, d'avouer son impuissance, ses limites, qui ne sont pas vraiment les siennes, mais celles de la connaissance, de la médecine, du savoir scientifique aujourd'hui... Un savoir en perpétuelle évolution, révolution
Peut-être qu'un jour on pourra guérir de ci ou de ça....Guèrir ?
La médecine ne guèrit pas....Pallie, soigne, donne du répit ?

Dire au malade, dire au sujet "vous présentez un certain nombre de troubles..." et poser un diagnostic est compliqué
En médecine, comme je le souligne souvent, un bilan, des examens paracliniques, une imagerie, permettent souvent d'affirmer ou d'infirmer l'entretien et l'examen clinique.
Il permet aussi de dire, de mettre un mot sur le syndrome, de nommer, de ranger, de classer ces symptomes dans un registre....
A condition de ne pas soustraire, ne pas faire abstraction du patient, du sujet souffrant, de la personne qui souffre de cet ensemble de trouble ou de cette pathologie....
Qu'il vivra de manière singuliere, unique, car il est unique
C'est peut-être le sens de "mon cancer, ma sep...."une certaine appropriation du trouble qui signifie pas seulement qu'elle est mienne, mais qu'elle est unique, que cette intruse n'est pas la même que celle de mon voisin.
Qu'en venant m'envahir, moi sujet, s'approprier mon espace, ma vie, elle est devenue mienne, c'est à dire que je la fais mienne, que je la nomme mienne,
Une sorte d'adoption triviale....
En mon nom je te nomme....!
Unique, volonté, désir singulier d'affirmer aussi, même à travers la pathologie que le sujet est unique et que la maladie est par conséquent la sienne, unique elle aussi, Sa faite sienne.....

Mais quid quand il s'agit de troubles psychologiques ?
J'assistais dernièrement à un séminaire sur les psychoses, et sur le difficile problème, de poser le diagnostic, et l'annonce à la famille, au patient.... Certains psychiatres s'y refusent, certains informent, disent... Un travail thérapeutique peut alors se mettre en place. Une information peut avoir lieu.... Dire, informer, expliquer... Pour prévenir. Non de la maladie, puisque comme n'importe quelle maladie organique grave, elle est elle aussi grave, invalidante et nécessite un traitement à vie, qui doit être adapté, évalué...
Mais savoir, faire du sujet un "co-thérapeute" peut être essentiel dans la prévention des troubles, des symptômes, dans la compréhension même de la nécessité de la prise des médicaments...
Informer les familles, c'est aussi les associer, leur faire comprendre, sortir de ce carcan de maladie mentale.... Maladie, pathologie, troubles, y en a-t-ils qui soient plus acceptables que d'autres ?
Les faire prendre part.... Oui, n'en déplaise à certains, il y a beaucoup de choses à faire avec les patients souffrant de schizophrénie, nous n'en sommes plus (bien que les hopitaux psychiatriques n'aient guère changé, depuis mes débuts...) à l'époque des aliénistes. Ces personnes peuvent vivre hors des murs, avoir un travail, une famille, une vie !

Je suis sortie heureuse et pleine d'espoir...
Personnellement j'ai toujours, quand le patient le demande, informé, expliqué.... ou demandé l'appui d'un spécialiste à l'hôpital. S'instaurait alors un rapport collaboratif.
Dans ce cas précis, c'est le patient l'expert, c'est lui qui sait, qui parle de son trouble, le décrit, l'écrit, sur des croquis, des schémas.... Nous relions ensuite aux événements, cherchons d'éventuelles correspondances, quand il s'agit de troubles de l'humeur, d'anxiété...
Pas de toute puissance, pas de savoir jalousement gardé !!!!
Un cheminement ensemble, un accompagnement...

Nécessaire et essentiel ! Le patient sait, s'informe, cherche des réponses, lit, découvre et interprête....
Il m'arrive de demander "que savez vous de ce trouble ? De cette maladie ?"et nous en parlons ensemble.
Parfois, il est nécessaire, d'expliquer, encore, de dédramatiser, de relativer...
Ah les fameux pourcentage, statistiques... De vie, de mort, de récidive ?
Unique et singulier encore !
Nommer c'est dire, nommer c'est perdre aussi, ne plus garder, pour soi, prendre du recul et partager, lâcher, se délester....
De part et d'autre, nommer la maladie c'est ne plus avoir ce savoir, ne plus être gardien de ce pouvoir, c'est se déliver et de rendre l'autre sujet, acteur, responsable de sa vie et de son destin, c'est aussi permettre d'affronter ensemble.... Avec !
Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...

Nota bene

Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.

Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

Vous étes venus

compteur visite blog

map