Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

jeudi 23 février 2012

J'y arrive pas

J'ai écris cet article il y a quelques temps, destiné à un autre lieu, je le mets à présent ici, pour tenter de lever le voile sur certains silences.

J'y arrive pas

Depuis une vingtaine d'années, je reçois dans un cadre particulier des enfants en "difficultés scolaire"... Les parents pour la plupart du temps démunis n'y arrivent pas !
Ces enfants n'y arrivent pas.
Ils n'arrivent pas à apprendre, à retenir, à organiser leurs connaissances, à maintenir leur attention
Pendant toutes ces années, j'ai entendu, écouté ces enfants, adolescents, plus grands aussi parfois, dire leur souffrance, mais aussi et surtout leur désir d'y arriver
"L'alliance thérapeutique" que nous construisons peu à peu, le travail que nous menons sur le plan cognitif, psychique, scolaire leur permet...


Très impliquée dans ces processus, dans ces questionnements de difficultés scolaire j'ai ouvert sur Facebook une page spéciale pour en parler, et surtout pour en sortir. Pour dire qu'il existe des solutions. Dire qu'ils ne sont pas seuls, parents et enfants...
Dire, mettre des mots, pour démythifier, démystifier, dédramatiser.

Mais surtout pour expliquer qu'avant tout, il faut comprendre, explorer, savoir pourquoi. Connaitre l'orgine de ce "j'y arrive pas"
Il s'agit alors de dépister, d'objectiver.
C'est le travail d'une équipe pluridisciplinaire...C'est le résultat d'une collaboration, celles de divers professionnels qui mettent "l'enfant qui n'y arrive pas" au coeur de l'action, de l'élaboration personnalisée d'un projet.
Je laisse la parole à ces enfants, ce sont leurs mots, c'est leur parole....C'est ce qu'ils nous disent, c'est ce qu'ils veulent que nous entendions !
Alors écoutons !



J'y arrive pas,J'ai pas le temps de recopier les devoirs à la fin du cours, j'ai pas le temps,
J'y arrive pas
J'ai pas pu prendre toutes les notes, j'ai pas le temps de les écrire
J'y arrive pasJ'ai pas pu écrire la dictée sans oublier des mots
j'y arrive pasC'est difficile de mettre ce que je pense à l'écrit, pourtant j'ai appris mes leçons,
J'y arrive pas
Je peux pas reproduire les dessins que la maitresse me demande
J'y arrive pas
Je ne comprends pas ce qui est demandé et je sais pas répondre
J'y arrive pas
Pourquoi il y a des ne...pas, des mots qui veulent dire le contraire ?
J'y arrive pasJ'apprends mais je ne sais pas répondre aux questions...
J'y arrive pas
Je fais des fautes, je ne comprends pas la consigne, mes cahiers sont des torchons, j'arrive pas à ranger mon cartable, j'oublie mes cahiers, je comprends pas ce qu'il faut faire, je n'arrive pas à poser une opération, je comprends pas le rapports des questions avec l'image, je ne sais pas ce qu'on attend de moi, je sais répondre tout bien à l'oral, mais pas sur la feuille, je sais pas organiser mon emploi du temps, je sais pas remplir mon cahier de texte, ça va trop vite pour moi, j'ai pas le temps de finir, je n'arrive pas à faire des belles lettres, j''écris mal, je fais des taches sur mes copies, des ratures, je n'arrive pas à coordonner mes gestes en gym, je renverse mon verre, je fais des gestes brusques, j'ai du mal à savoir si c'est à droite ou à gauche, j'arrive pas à tourner la clé dans le bons sens, je n'arrive pas à comprendre pour nager, je ne sais pas jouer aux sports collectifs, je sais pas le mot qui veut dire ça, en langue c'est la cata, je comprends rien aux déclinaisons, je confonds les lettres, je n'entends pas la différence entre le b et le p, je ne sais toujours pas bien lire, je ne sais pas écrire même sur un forum...

Alors...

On se moque de moi, j'ai des mauvaises notes, l'école est un supplice, on me traite de fainéant, on me fait redoubler mes classes, on dit que je suis un cochon, on me fait la honte, on me dispute sans arrêt, je suis toujours puni et je comprends pas pourquoi, on m'accuse de pas apprendre mes leçons, de ne rien faire, de ne pas faire mes devoirs, on ne traite de bon à rien, je suis dégouté, même si je bosse comme un dingue j'ai des notes lamentables, je suis découragé, j'y arriverai jamais, on me dit que je suis nul, que j'ai pas ma place à l'école, on veut me mettre en bac pro et j'ai pas envie de ça...

Donc

Je souffre, je me replie, je n'ose plus prendre la parole, j'évite toutes les situations où je dois écrire, je ne vais pas sur les forums, j'écris pas à mes amis, je ne sais pas ce que je vais faire de ma vie, j'arriverai jamais à rien, je souffre dans mon coin, car personne ne veut croire que je fais des efforts

Pourtant

Je suis curieux, je m'interresse à plein de choses, je lis, je connais pleins de choses sur tout, je regarde des émissions scientifiques que je comprends, J'ai des passions, j'ai envie d'écrire un journal, des poèmes que j'ai dans la tête, une lettre à une fille qui me plait bien, j'ai tant de choses à transmettre, j'aime la vie...

Et je voudrai vous dire
J'y arrive pas, c'est pas entièrement ma faute, même si parfois je suis faignant parce que ça me décourage, J'y arrive pas, mais je suis intelligent, j'ai envie de réussir ma vie, de suivre des études, d'avoir des diplômes,
J'y arrive pas, mais c'est pas parce que j'y arrive pas que je suis un débile !

Ce texte est une somme non exhaustive des propos tenus par des enfants dys.. Donc différents.
Une grande souffrance ! Toujours en ressort !
Qu'ils soient le témoignage, leur témoignage, qu'ils soient entendus, relayés..
Non ces gosses ne sont pas débiles, bien loin de là, ils souffrent de dyslexie, dysorthographie, dyspraxie... Et on peut, même si on ne guérit pas, faire quelque chose
C'est ce quelque chose là qui nous interpelle, et qui ne doit plus clocher...

dimanche 19 février 2012

A méditer

Je relisais quelques pages de La République de Platon et voulais partager ces quelques lignes qui méritent intérêt et réflexion.
Des siècles plus tard il est toujours actuel, moderne, visionnaire.
A moins que ...
L'homme, les choses, la société auraient alors si peu changées ?
Leçons alors ne seraient pas tirées ?
Répètion... Inlassablement.
Je vous laisse méditer.

"Lorsque les pères s'habituent à laisser faire les enfants
Lorsque les fils ne tiennent plus compte de leur parole
Lorsque les maîtres tremblent devant leurs élèves et préfèrent les flatter
Lorsque finalement les jeunes méprisent les lois parce qu'ils ne reconnaissent plus au dessus d'eux l'autorité de rien ni de personne, alors c'est là en toute beauté et en toute jeunesse le début de la Tyrannie"
Platon

vendredi 17 février 2012

L'ours en peluche

Elle  retire brusquement l'ours en peluche que la petite fille serrait fort dans ses bras
- "Tu es trop grande maintenant !"
Elle donne l'ours en peluche au petit garçon qui se tenait là
-"C'est pour toi maintenant"
La petite fille ne dit rien, se tait, ne pleure pas... Elle aimait cet ours plus que tout, elle lui avait donné un nom, c'était son ours en peluche. Elle en prenait soin, y faisait attention...
Cet ours là, n'était plus à elle, maintenant..
Elle n'avait rien demandé, le petit garçon non plus !
L'adulte avait décidé....

Plus jamais la petite fille ne s'attacha à un jouet, une poupée, un ours en peluche...
Plus jamais la petite fille ne s'attacha...
Le petit garçon s'amusait à faire battre ses ours... La petite fille le regardait
Elle voyait son ours en peluche déchiré, abimé....
Elle gardait au fond de son coeur les larmes qu'elle aurait aimé verser....

Elle arrache la petite fille des bras de son grand père
- "Tu pars, tu es trop grande maintenant"
La petite fille résiste, s'accroche au bras de son grand père qui la serre très fort,
Il ne veut pas la laisser partir
Pour la première fois elle voit le vieil homme pleurer
Alors elle  laisse ses larmes venir...
Toutes les larmes, toutes ses larmes... celles de l'ours, des gifles, des réprimandes, des colères...
Toutes...
Ce jour là elle  pleure toutes les larmes de son corps, de son âme, de son petit corps...
Toutes les larmes de la peine, de la douleur, de la souffrance, de la révolte, de l'incompréhension...
Cette fois non plus elle ne demande pas "pourquoi ?"
Sans doute n'y en a-il pas !

Inflexible, elle arrache la petite fille des bras de son grand père
Malgré les larmes, les suppliques du vieil homme
Malgré les larmes, les suppliques de l'enfant
Elle l'emmène vers l'enfer....
L'adulte avait décidé !

lundi 13 février 2012

Nous sommes tous grecs

Ce matin beaucoup se sont réveillés avec la gueule de bois !
Les fossoyeurs ont fait leur oeuvre infecte et infâme et mis à terre là où elle a vu le jour la Démocratie !
Un de mes amis a mis sur son mur ces mots magnifiques et en hommage à ces hommes et ces femmes spoliés, volés, humiliés je les partage ici.
Car nous sommes tous grecs, ceux qui ne le sommes pas encore, le seront bientôt, ce n'est qu'une question de jours...
Car il faut maintenant sortir hors la caverne, non pour assister au Banquet mais plutôt au repas du Commandeur !
Car nous avons tous oublié un peu vite que la démocratie ne s'impose pas mais qu'elle se conquiert !
Et nous savons qu'aucun projet politique ne peut reposer sur la pauvreté, la misère et le non espoir
Meurtriers de la parole, ils ont aussi et cela va de pair, tué la démocratie !

"La démocratie est née à Athènes quand Solon a annulé les dettes des pauvres envers les riches." Theodorakis

Exit !
Merci Thierry :)


En attendant les barbares, de Constantin Cavafy
traduit du grec par Marguerite Yourcenar et Constantin Dimaras


"Qu'attendons-nous, rassemblés sur l'agora?
On dit que les Barbares seront là aujourd'hui.

Pourquoi cette léthargie, au Sénat?

Pourquoi les sénateurs restent-ils sans légiférer?

Parce que les Barbares seront là aujourd'hui.

À quoi bon faire des lois à présent?
Ce sont les Barbares qui bientôt les feront.

Pourquoi notre empereur s'est-il levé si tôt?
Pourquoi se tient-il devant la plus grande porte de la ville,
solennel, assis sur son trône, coiffé de sa couronne?

Parce que les Barbares seront là aujourd'hui
et que notre empereur attend d'accueillir
leur chef. Il a même préparé un parchemin
à lui remettre, où sont conférés
nombreux titres et nombreuses dignités.

Pourquoi nos deux consuls et nos préteurs sont-ils
sortis aujourd'hui, vêtus de leurs toges rouges et brodées?
Pourquoi ces bracelets sertis d'améthystes,
ces bagues où étincellent des émeraudes polies?
Pourquoi aujourd'hui ces cannes précieuses
finement ciselées d'or et d'argent?

Parce que les Barbares seront là aujourd'hui
et que pareilles choses éblouissent les Barbares.

Pourquoi nos habiles rhéteurs ne viennent-ils pas à l'ordinaire prononcer leurs discours et dire leurs mots?

Parce que les Barbares seront là aujourd'hui
et que l'éloquence et les harangues les ennuient.

Pourquoi ce trouble, cette subite
inquiétude? - Comme les visages sont graves!
Pourquoi places et rues si vite désertées?
Pourquoi chacun repart-il chez lui le visage soucieux?

Parce que la nuit est tombée et que les Barbares ne sont pas venus
et certains qui arrivent des frontières
disent qu'il n'y a plus de Barbares.

Mais alors, qu'allons-nous devenir sans les Barbares?
Ces gens étaient en somme une solution."

mercredi 8 février 2012

L'absence présente

"Je pense souvent à maman, mais je ne sais plus très bien comment elle est"
Dit la petite fille..
"Je ne me rappelle plus sa voix, non plus, mais je l'aime maman"

L'absence !
Trop tôt !
Il est toujours trop tôt pour ceux qui restent
Pour ceux qui ont encore du chemin à faire
Seuls,
Du moins sans celui ou celle qui n'est plus
Qui n'est plus là.
Qui est parti, qui a hâté son départ peut-être....?
La mort emporte, enlève aussi tout projet, tout espoir, et tout futur, tout demain
La vie devient un calvaire, insupportable, insoutenable
Car justement ça ne tient plus !
Ca
C'est bancal, ça cloche, car quelqu'un manque, manque
L'équilibre vacille, l'édifice s'écroule !
Il manque
Ce quelqu'un qui faisait que ça tenait, du moins un peu
L'absence, la présence de l"absence, du moins celle là, celle qui est sans retour, car elle est, elle n'est que celle là, ou elle est celle là, cette absence là tue deux fois.
On ne peut s'y faire et plus rien ne sera comme avant. C'est justement parce qu'il y a un avant, que ça ne peut plus être pareil. Que ça sera autrement !
Peut-être, si c'est possible, si on veut, si on peut..
Car on veut toujours retourner en arrière, dans l'hier, faire comme si rien n'était advenu,
On veut continuer l'histoire....
Une histoire qui est finie.. Alors il faudra faire le deuil de cette histoire là, pour en recommencer une autre, essayer.. Tenter d'essayer ?
Se dire que peut-être on peut..
Qu'il faudra repartir, d'un ailleurs, d'un autre point, qu'il faudra prendre un autre départ, peut-être
Car quelque chose se sera arrêté, sera resté, là, définitivement.
On se demande alors, comme reprendre, là, à cet endroit même où la vie s'était arrêtée, là où il y avait un accroc, un raté, une absence qu'on ne pourra jamais combler.
Là où quoi qu'on fasse il y aura le vide, ce gouffre immense qui surgit d'un coup soudain et qui donne le vertige !
Un gouffre qui s'ouvre sur le vide infini...
Mais est-ce véritablement l'Infini, ce vaste continent obscur et sans limite ? Ce monde des Ténèbres d'où personne jamais n'est revenu ?
Le terme de l'ultime Quête ?
Infini ? Ou Chaos ?
Mais qu'est ce que cela change, puisqu'il faut rester, rester sans cet autre, dont les contours du visage, dont la voix se perd dans cet immensité, sans forme, sans fond...
S'estompe dans l'immensité, dans l'informe, dans les bruissements de l'inconnu.
Où plus rien ne raisonne.
Il ne reste que des souvenirs diffus, et confus, une confusion troublante et singulière. On ne se souvient plus très bien.
Mais de quoi ? Mais de qui ?
Ultime geste égoïste car on voudrait garder pour soi et pour soi seul, cette image là, cette image qu'on voudrait ne jamais voir disparaitre
Et pourtant tout se dissout, se fond dans cet obcsur et immense Infini. Un tout, indifférencié où tout et rien co-existent..
Ou rien et tout se rencontrent et se fondent....
Repartir alors ? Construire un pont ? Une passerelle entre cet avant et cet après à faire, à construire ?
Traverser ce vide ? Sans filet ? Se tenir sur le fil ténu tissant l'hier et le demain, pour essayer quand même malgré tout d'y installer une continuité, ravauder l'accroc ?
Retricoter un avenir, un demain, un futur.
Tâche ardue, complexe, terriblement douloureuse, car on ne trouvera jamais les fils de la même couleur pour retisser l'histoire. Les Parques ont fait leur oeuvre.
Pourtant il va falloir essayer..
Pouvons-nous alors nous inscrire dans cette discontinuité ?
Ou bien ?

Ceux que l'on aime partent toujours trop tôt, parfois même avant que l'on ait pu leur dire au revoir, parfois sans savoir à quel point ils nous étaient chers !
"Je ne lui ai pas dit je t'aime"
Combien sont partis sans avoir aimé, sans avoir raconté, sans avoir transmis ?
Celui et ceux qui restent n'en savent rien, ne savent rien ou presque de cette histoire là, d'une histoire qui n'est pas là leur, mais qui les touche quand même..
Ceux là, même qui sont partis ont emporté avec eux énigmes et secrets...Pour l'éternité !
Ils ne sont plus !
Partis, ils s'en sont allés.
Trop tôt ! On se demande alors pourquoi cette vie si brève ? Pourquoi ces quelques instants seulement ?
Ceux là laissent des traces, indicibles, insoupçonnables, ces pas que le vent ou la mer effacent mais qui restent gravés quelque part, au fond de nos mémoires.
Mémoire qui se livre elle aussi à un combat perdu presque à l'avance, celui de maintenir vif le défunt qui n'est plus que dépouille, corps sans vie, gisant, mais n'étant plus...
Il reste quoi alors ? La bougie qu'on allume le jour anniversaire, les photos qui jaunissent au fond d'un tiroir, clichés abandonnés des jours insouciants et heureux où jamais il ne serait venu de penser
Penser justement, mettre en acte la pensée c'est penser aussi sa finitude, mais la finitude de l'autre ? Intolérable, impensable car la mort relève de l'Impensé.
Il faut vivre et souffrir, souffrir pour vivre...Souffrir et mourir !
L'absence est venue tout soudain recouvrir de son ombre la vie du survivant, le plongeant dans les ténèbres d'une éternité sans fin...
Pour quoi ? Pour qui ?

jeudi 2 février 2012

Images et Shoah

Il m'en a fallu des années pour laisser aller ma colère
La laisser exploser serait plus juste !
Des années, tant d'années !
C'est seulement ces jours çi que j'ai pu regarder tous ces reportages, et aller jusqu'au bout !
J'ai vu bien sûr Nuit et Brouillard, les films, les émissions, j'ai lu certains livres, le procès Eichmann, j'ai lu et relu Hannah Arendt, étudié sa théorie sur la banalité du mal, l'ai confronté à d'autres analyses, à la pulsion d'emprise, au Thanatos Antique et freudien.
Mais je n'avais jamais entendu, ni vu d'aussi près, d'une manière aussi juste les témoignages, les souvenirs des bourreaux. De ces gens ordinaires qui accomplissaient une tâche qu'ils considéraient tout à fait ordinaire !
Des photos, des albums, de la vie, de leur vie, insouciante, leur famille prenant le soleil, leurs enfants jouant à quelques pas des cheminées
Des cheminées de l'enfer !
Ces gens ordinaires qui oeuvraient en enfer !
Qui menaient à bien la tâche d'exterminer une population au mépris de l'humanité! Sans même se questionner, se demander.. Sans voir l'humanité...
Voir des monstres eut été sûrement plus rassurant, plus simple, plus confortable.
Un monstre permet de se dire que "non, je ne suis pas capable de ça"
"C'est l'oeuvre d'un fou, d'un dégénéré, un quelque chose qui n'est ni homme ni sujet, un démon, mais pas notre semblable"
"C'est exceptionnel..."
Je... moi, toi, elle, lui, celui là que je connais..
Ce je étant alors un autre, n'importe quel autre mais pas soi, pas de notre race, la race des hommes, normaux :
Là, il s'agit de l'autre, oui, d'un autre, seulement il ne s'agit pas d'un monstre, mais d'un sujet ordinaire !
Bien sûr certains sont arrivés et venus là pour assouvir leurs pulsions meurtrières et leur haine en toute impunité, la méchanceté est une infirmité, mais elle ne suscite aucune compassion !
Il faut les voir ces gens ordinaires, s'amuser, sourire, sur les photos pour garder un souvenir  de ces années passées.
Ces années passées à tuer, à exterminer, gazer, bruler des hommes, des femmes, des enfants, comme eux...Mais de humanisés, réduits à un numéro, dépouillé de tout, de leurs biens, de leur nom, de leur identité. Réduits à néant, pas même à un objet mais à rien ! Vide, vacuité, néant.
Anéantir....
C'est infiniment plus simple !
Il me semble que jamais l'homme n'a été dépourvu d'autant d'humanité que là, dans ces moments là, on ne peut  qualifier ces bourreaux de bêtes ce seraient insultants pour les animaux, aucun d'aucune espèce ne pourrait se conduire de la sorte !
France 2 a diffusé à la suite deux documentaires sur les photos d'Auchwitz et la vie après les camps !
Sobres, sans larmes car elles sont impossibles ! Elles seraient presque de trop au sein de cette horreur. Au milieu de l'inimaginable.
Des survivants, témoins de ces barbaries parlent, racontent l'inracontable, le tellement impensable qu'à leur retour, personne ne peut et ne veut les croire ! Car ce serait accepter là, et rendre compte de la part d'inhumanité, de barbarie, de sauvagerie de l'homme !
De soi même !
On ne peut entendre de tels témoignages car cela ne peut pas être, ce n'est pas soutenable !
Ils parlent de leur enfer, puis de leur retour qui pour certains est un nouvel enfer !
Je voudrai alors répondre à ceux qui m'envoient des messages, des commentaires exaspérés (et exaspérant) que j'exagère, que ne ne parle que de la Shoah, des juifs etc... et que j'oublie les autres.. Ce qui est faux mais il n'y a pas pire aveugle que celui qui ne veut pas voir, nous le savons tous ! Et les propos révisionnistes se cachent parfois sous des propos habilement déguisés.
La perversion de la langue est à ce prix !
Je voudrai leur dire à ces gens, que lorsque les déportés sont revenus, eh bien les autorités françaises non contentes d'avoir fait preuve d'un zéle certain ont encore trouvé les moyens de les mettre à part, ces juifs déportés, Les bons déportés, résistants communistes et les autres, ces juifs, là, déportés alors qu'ils n'avaient rien fait d'héroïque ! Leur seule crime ayant été d'être juifs !
Honte et colère !
Plusieurs de ces survivants ont relatés cette souffrance là, ce rejet là. L'admirable livre de Nathalie Gendreau en est aussi un témoignage !
Survivant suscite même parfois de la méfiance, mais" qu'ont-ils fait ceux là pour être là ? "de cela aussi ils témoignent !
Etrangers et étranges, spectres rescapés des ténébres les voilà suspects d'être encore en vie ! D'être revenu d'un lieu où d'ordinaire on ne revient pas. Qui revient des Enfers ?
Terribles et terrifiants, les voila encore en marge, au ban d'une société qui n'a que désir de les en exiler.
Encore !
Jusqu'ici il m'avait été impossible d'affronter cette vérité, cette réalité. Peut-être aussi comme beaucoup d'entre nous, qui sommes en compte avec cette histoire là, qui n'avons pas encore soldé les comptes à défaut de les régler. Ces enfants de la cave !
Colère ! mais contre qui ? Contre ces tortionnaires, hommes et femmes ordinaires assassinant en série, perpétrant un génocide à l'échelle industrielle ! Une inhumanité que personne je pense ne peut vraiment expliquer !
Folie ne convient pas, pas vraiment ! Conscience et absence de remords, mépris et morgue, il suffit de regarder les quelques images qui nous sont parvenus de Nuremberg !
Colère contre ces juges tolérants, allemands jugeant d'autres allemands, juges que je trouve bien cléments, ces bourreaux libérés au mieux quelques années après avoir purgés des peines dérisoires !
Colère contre ceux qui sont passés au travers des mailles du filet avec la complicité bienveillante de bien des autorités.. politiques, religieuses, scientifiques..
Colère contre ces fonctionnaires stupides et bornés qui allouaient ou non une pension. Militaire, oui, résistant, oui, mais juif, ah ce n'est pas prévu ! En l'absence de numéro de matricule militaire, un déporté donne celui que ses bourreaux lui ont tatoué sur le bras pour que la SNCF toujours aussi zélée, le laisse prendre le train !
Là c'en est trop ! Cela semble dépasser l'entendement, le supportable. Il n'y a ni compassion, ni humanité, encore ! Un agent de bureau refuse une allocation parce que la date de réception des dossiers est dépassée. Un médecin cynique, une guichetière arrogante... La nausée alors me prend, une furieuse envie de vomir, de vomir un système et un monde devenu irrémédiablement fou !
La nausée, le dégout devant l'indécent, l'obscène et l'absurde ! La trivialité banale, la banalité de l'obscène, du mal, de la haine, de l'indécence, de ce tout ça, de ce tout qui tue, encore et encore !
Qui tue dans l'ombre, sans même sans rendre compte et sans avoir de compte à rendre !
Pas même à sa conscience...........
Ce sont les mêmes wagons de marchandises qui les ramènent en France, ce sont les mêmes bus qui les ont transportés à Drancy qui les amènent au Lutécia !
Horreur ! Honte encore.
la Honte, le mépris, l'humiliation sont encore au rendez-vous !
"L'heure était à la reconstruction" précise une des personnes présente à l'émission et bien entendu ces témoignages là étaient vraiment trop dérangeants, ils ne pouvaient ni s'entendre ni être entendus ! Alors à quoi bon..A quoi bon préter oreille ? Il faut être sourd et ne pas voir, ne pas regarder ces visages hagards, car soutenir le regard n'est pas possible, on ne regarde ni la mort ni les morts en face !
Quand ils parlaient ceux qui étaient revenus, quand ils racontaient leur enfer, on leur demandaient de se taire, alors ils se sont tus, pendant vingt ans, pendant...Tant de temps, trop de temps, certains n'ont plus jamais parlé.Ils se sont enfermés dans un silence de mort, on les a tué une nouvelle fois ! Sans remords ni regrets, pour une simple affaire d'état !
Honte !
Ils se sont tus parce que leur discours n'avait pas sa place dans cette société là, dans cette société d'hommes et de femmes qui ne voulaient surtout pas savoir, surtout pas imaginer que cela a été possible, que cela a été...Et pourrait simplement être encore peut-être, car il suffit de si peu de chose pour allumer le feu, le feu de la haine qui sommeille toujours tapi dans l'ombre !
Car qui voulaient  voir le côté sombre de l'homme ordinaire ? Qui voulait s'aventurer dans ces contrées là ?
Et puis, soulignons le encore ils étaient juifs !
Alors ? Colère ? Oui, elle est nécessaire et indispensable à la dignité, à celle d'appartenir à la race des Hommes, elle est nécessaire pour s'élever et grandir, et être en capacité de dire non ! ad venir à une humanité qui se délite, qui tolère et qui excuse les pires crimes sous couvert qu'il faut avancer
Ce n'est pas à ce prix là que l'avancement d'une société est possible et nous en avons la preuve aujourd'hui. Il suffit de regarder ce vieux continent à la dérive, bâti sur des ruines et des mensonges, des non dits et des secrets.
Il a fallu préserver, mentir, faire taire pour pouvoir construire un soit disant monde nouveau ! Où est-il ce monde aujourd'hui ? Moribond, il vacille et laisse apparaitre enfin les squelettes et les fantômes bien au chaud dans les placards. Ceux qui se réclament d'un soit disant père issu de la résistance ne tiennent plus ! Cette France et cet occident bâtis sur le sang, et les ruines, les dossiers ensevelis et les actes de bravoure de dernière heure arrivent à expiration. Asphyxiés par leur propre haine, incestuellement !
Déportés pour rien, pour le simple fait qu'ils aient été juifs !
Comment ont-ils pu se reconstruire ? Alors que leurs bourreaux directs et indirects, ceux qui là même ont devancés les demandes des SS ont pu sans encombres accéder à des postes au sein de la communauté ?
Ils ont vécu, et ils sont là encore en vie !
Il parait que l'humanité porte le pêché, certains parlent de la faute originelle, mais depuis Auchwitz l'occident porte la trace indélébile du crime originel, et nul baptême ou autre mascarade ne pourra l'en laver, l'en débarrasser, il lui faut vivre avec ça, et il vit mal ! Sans s'en rendre compte ni s'en soucier, ne sachant pas que le symptôme n'est que le signe de sa décadence ! Refusant de le laisser s'exprimer ce symptôme là qui hurle à la vérité, qui hurle à mort les maux de ces morts !
Peut-être parce qu'il n'a pas compris, qu'il ne lui faut pas, pour reprendre les propos d'une déportée, "Vivre après mais vivre avec !"
Et là c'est une autre histoire !

La vie après les camps, documentaire diffusé sur France 2
Albums D'Auchwitz, documentaire diffusé sur France 2
Nathalie Gendreau. Ainsi fut fait,
http://psychanalyseaujourdhui.blogspot.com/2010/11/ainsi-fut-fait.html

A R et M je ne sais s'ils ont pu pardonner car ils n'ont jamais pu m'en parler
A EUX, ceux qui sont revenus, ce qui ne sont pas revenus
Que ces six millions d'âmes ne soient jamais oubliées.
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Nota bene

Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.

Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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