Ce jour là je ne l'attends pas c'est lui qui m'attend, comme les matins où quelque chose de grave est arrivé. La veille, la nuit.
Il est là, ils sont là devant la porte fermée.. Ils attendent mon arrivée et s'engouffrent dans la petite pièce, ils m'expliquent qu'il faut que je fasse quelque chose, absolument...
Ce matin là, il m'attend mais n'attend rien de moi
Il est venu me dire au revoir.
Il est venu me dire qu'il part... Pour combien de temps ? Il ne sait pas
Aujourd'hui il est grave...
Il part à la guerre, m'explique t-il, il parle doucement, lentement, pour que je comprenne bien, les mots pourtant se mélangent, français, allemand russe..
Mais nous nous comprenons, c'est l'essentiel
Il sort des papiers, me les montrent.. Me dit qu'il part là bas, qu'il y a une guerre à faire, encore une et que son métier, c'est ça...
Il me l'avait dit déjà...
Cette fois c'est définitif, il s'en va.. Au loin.
Mais il reviendra, il revient toujours.. "Sibérie" me dit-il !
Nous buvons un café, ses amis attendent un peu plus loin.
Il sort de sa poche une photo, celle du temps où dit-il en riant il était zek.
Mama dit il.. Il me montre une vieille femme... Et me montre le chat
Il m'explique alors que sa mère, venue là sans doute pour le suivre dans cette contrée lointaine et froide, n'en n'est jamais partie, elle est restée.. Pour lui..
Elle donne du lait au chat..Il m'explique.
Il sait que j'aime les chats, nous en avons parlé déjà... Et il est heureux de me montrer ça..
L'image du bonheur... Le sien, les siens
Nous nous sommes vus souvent, quelques temps, un long temps.
Il venait pour parler, raconter, dire, mettre des mots, des mots colorés, rythmés, je l'écoutais.
Une histoire, la sienne, qu'il voulait raconter, la violence, souvent.
Il protégeait les siens, ceux qui ne savaient pas se battre. Survivre, dans le froid hostile et rude il savait trouver les refuges, les endroits, la chaleur, l'humanité aussi.
Violence, sourire, cris, rires ! Il parlait fort et souvent faisait peur. Je me souviens de ce collègue qu'il manqua d'étrangler car il voulait lui faire une injection avant de le soigner...Pour qu'il ait moins mal...
Mal !
Il est venu me dire au revoir, il ne pouvait pas partir sans me dire au revoir...
C'était comme ça..
Il partait se battre, pour qui ? Pour quoi ? Peu importe la guerre...
Il enverrait des sous à sa mère, comme les mandats qu'il adressait déjà... Il me montrait les reçus..
Des adieux difficiles...
Des larmes
Il me serra dans ses bras... me serra très fort, me remercia...
Je ne l'oublierai pas, jamais....
Peu avant mon départ, quelques années plus tard, un compatriote me donna de ses nouvelles...Il me donnait le bonjour, voulait venir me voir.. Il avait donné mon adresse, il savait que j'étais là, encore, même si ce n'était plus au même endroit
Il était revenu et attendait à nouveau de partir encore... De repartir encore pour une contrée lointaine
Pour une cause perdue..
A Guennadi... Aux autres..
L'Etre humain est unique, chaque rencontre est unique, c'est un éternel recommencement, une aventure nouvelle à chaque fois
Psychanalye Aujourd'hui
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne
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Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.
Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.
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