La vie est un théâtre où nous jouons un rôle parfois bon, souvent mauvais. L'action se déroule et se déplace au gré de notre fantaisie quand on a la chance d'être l'auteur, le narrateur et l'acteur du scénario. Au gré de… ici et là bas, ici et ailleurs.
Aujourd'hui, il nous faut changer tout ça, le plan, la méthode et les règles, ne conservant qu'une seule de ces trois unités qui rendait la pièce parfaite.
Ainsi nous ne garderons que l'unité de lieu. Avec quelques petites digressions vers le nécessaire, ces besoins primaires qui n'ont que faire dans les romans précieux où les romans fleuves des Anciens.
Unité de lieu, tout se joue, là, ici. L'action, le cœur du drama
Et il n'est pas question d'en déroger, sous peine de sanction. Une assignation à la résidence de la scène choisie pour vivre un temps long, qui se décompose en jours, nuits, semaines, mois peut-être ? Autant d'actes que durera cet enfermement, ce placement involontaire exigé par le décret du 23 mars 2020.
Un temps long qui s'éternise dans le même lieu, confiné dans le théâtre que nous nous sommes plus où moins choisi. Le seul où nous avons le droit d'être, d'avoir, et de faire, de jouer la comédie, de vivre la tragédie, mais aussi celui de mourir sur scène.
Tu joueras, là, tout ce que tu dois vivre, tu te joueras là sous peine de. Tu vivras ce jour comme s'il était le dernier, s'il ne l'est pas, il t'incombera de vivre l'autre mais aussi les autres, ceux à venir, ceux qui ne viendront peut-être pas. Demain sera ici et non ailleurs. Du moins pour le moment. Tu n'es plus libre de toi, de ton être, de ton aller, de tes venues.Nous sommes enfermés.
Nous pouvons malgré tout, pour les plus chanceux changer un peu les affres du décor, vaquer à quelques mètres, être dedans et malgré tout un peu dehors.
Mais si peu !
Un unité de lieu, mais aussi quelque peu de temps. Un temps figé, un temps long, un temps qui passe mais se ressemble, demain comme hier. Une journée qui s'organise sans trop de surprise autour des mêmes objets, des mêmes personnes, ou dans la solitude, dans le reflet de la pâle face que nous renvoie de nous même le miroir. Ce "je" que je ne saurai voir
Seul le ciel, le soleil, la lune, la pluie, les nuages ou l'orage apportent un peu de changement, un petit bouleversement parfois imprévu qui nous rappelle qu'il existe un ailleurs, un autre monde derrière le mur où nous sommes relégués.
Curieux monde que le nôtre !
Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne
Crédit photo @brigittedusch
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