En souvenir de toi. Et de tes compagnons de misère.
Sur le Chemin des Dames
J'ai fait le chemin.
Dans le silence de l'été, j'ai entendu le bruit de vos silences ; le bruissement de vos âmes cherchant la paix au milieu du vacarme et de l'enfer.
La guerre. Le sang. La mort.
Et je me suis arrêtée, au bord de cette route de campagne, au creux de la forêt là où l'éclat de l'obus à frappé ta tête, là où blessé tu es tombé, soldat Apollinaire au milieu de tes camarades sacrifiés pour rien, fauchés avant d'avoir eu le temps. Leur temps comme le tien a été trop court, bien trop court. Tu lisais là sans crainte hors de la tranchée en ce printemps 1916. Arrivée dans les tranchées sans abri du bois des Buttes au Nord de Pontavet. " écrivais tu le 14 de mars et deux jours plus tard : « Je lisais à découvert au centre de ma section, je lisais le Mercure de France, à 4 heures un 150 éclate à 20 mètres, un éclat perce le casque et troue le crâne". Combien de lettres as tu écris à Lou ?
Tu ne t'en remis jamais vraiment, la grippe meurtrière profitant de ta faiblesse t'emporte en ce début de novembre loin cette guerre qui ne voulait pas de toi, mais que tu fis tienne. Te voilà "mort pour la France"... deux jours avant la fin. Tu avais 38 ans. Poète Guillaume, ici bas encore tes mots restent gravés dans la Mémoire, hors du temps ils chantent et dansent au rythme de l'épigramme délicat, tendre et précis que tu as offert à demain.
En souvenir de toi Guillaume Albert Vladimir Alexandre Apollinaire de Kostrowitzky,
Avec ma tendresse.
Brigitte Dusch, psychanalyste historienne
Crédit photo Brigitte Dusch. (Stéle située à 200 mètres environ de la sortie de La Ville-aux-Bois-lès-Pontavert en direction de Pontavert, au bord de la route départementale 89)
Si je mourais là-bas.
Si je mourais là-bas sur le front de l'armée
Tu pleurerais un jour ô Lou ma bien-aimée
Et puis mon souvenir s'éteindrait comme meurt
Un obus éclatant sur le front de l'armée
Un bel obus semblable aux mimosas en fleur
Et puis ce souvenir éclaté dans l'espace
Couvrirait de mon sang le monde tout entier
La mer les monts les vals et l'étoile qui passe
Les soleils merveilleux mûrissant dans l'espace
Comme font les fruits d'or autour de Baratier
Souvenir oublié vivant dans toutes choses
Je rougirais le bout de tes jolis seins roses
Je rougirais ta bouche et tes cheveux sanglants
Tu ne vieillirais point toutes ces belles choses
Rajeuniraient toujours pour leurs destins galants
Le fatal giclement de mon sang sur le monde
Donnerait au soleil plus de vive clarté
Aux fleurs plus de couleur plus de vitesse à l'onde
Un amour inouï descendrait sur le monde
L'amant serait plus fort dans ton corps écarté
Lou si je meurs là-bas souvenir qu'on oublie
- Souviens-t'en quelquefois aux instants de folie
De jeunesse et d'amour et d'éclatante ardeur -
Mon sang c'est la fontaine ardente du bonheur
Et sois la plus heureuse étant la plus jolie
Ô mon unique amour et ma grande folie
30 janv. 1915, Nîmes.
Guillaume Apollinaire - Poèmes à Lou
Et puis mon souvenir s'éteindrait comme meurt
Un obus éclatant sur le front de l'armée
Un bel obus semblable aux mimosas en fleur
Et puis ce souvenir éclaté dans l'espace
Couvrirait de mon sang le monde tout entier
La mer les monts les vals et l'étoile qui passe
Les soleils merveilleux mûrissant dans l'espace
Comme font les fruits d'or autour de Baratier
Souvenir oublié vivant dans toutes choses
Je rougirais le bout de tes jolis seins roses
Je rougirais ta bouche et tes cheveux sanglants
Tu ne vieillirais point toutes ces belles choses
Rajeuniraient toujours pour leurs destins galants
Le fatal giclement de mon sang sur le monde
Donnerait au soleil plus de vive clarté
Aux fleurs plus de couleur plus de vitesse à l'onde
Un amour inouï descendrait sur le monde
L'amant serait plus fort dans ton corps écarté
Lou si je meurs là-bas souvenir qu'on oublie
- Souviens-t'en quelquefois aux instants de folie
De jeunesse et d'amour et d'éclatante ardeur -
Mon sang c'est la fontaine ardente du bonheur
Et sois la plus heureuse étant la plus jolie
Ô mon unique amour et ma grande folie
30 janv. 1915, Nîmes.
Guillaume Apollinaire - Poèmes à Lou
1 commentaire:
Merci pour lui. :-)
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