Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

mercredi 4 mars 2020

Archéologie


Les souvenirs reviennent, sans vraiment savoir pourquoi. Des souvenirs lointains, ceux d'une vie cassée, ceux d'une vie volée, d'un futur confisqué, arraché.
Les souvenirs reviennent, sans trop savoir comment.
Black out. Total. Vide. Parenthèse. Gouffre vertigineux qui n'a laissé aucune trace. Rien. Tabula rasa.
Champ de ruines abandonné, une friche, un urbex. Il ne reste rien ou presque, quelques lambeaux qu'on ne peut assembler, il en manque trop ! on ne peut rien assembler, rien tisser, et ce qui reste est si fragile qu'il peut se casser à nouveau et détruire encore la mince trame qui nous relie à cet avant.
Que faire ?
Laisser tout en état, en état de guerre, une sorte de no man's land où personne n'ose s'aventurer, ni le sujet blessé ni l'autre qui voudrait le réparer.
Et pourtant, il y a eu un ciel, un ciel bleu de la lumière et un soleil, et puis brutalement : plus rien. Tout s'est arrêté, brisé net, cassé. Rupture.
Un trou noir, plus rien, absence. Vide, gouffre, ailleurs, plus rien. Zéro, néant !
Le temps passé ne se mesure pas, il n'existe pas, il n'y a plus le temps du temps ; hier ou tout à l'heure, ça n'a pas d'importance. La mémoire s'en est allée, partie, raptée, disparue.
Elle s'est peut-être enfuie, s'est enfouie au plus profond de cet océan qu'est notre inconscient. Toujours là ? Peut-être ? Il va falloir chercher : Peut-être ou à quoi bon ?
On se demande parfois s'il faut continuer de creuser, s'acharner à trouver, retrouver les brisures et les tessons d'une mémoire fichue, coincés au creux d'une faille ? Mais pourtant s'ils sont loin, plane toujours leur ombre funeste sur notre jour d'hui, notre vie de tous les jours, empêchée, vécue à demi. Nos pas maladroits s'aventurent sur un chemin semé d'embuches, de manques et de trous, qui nous font trébucher.
Marche droit ? Mais ce n'est pas possible, il nous faut alors emprunter des chemins de traverse non pour satisfaire notre curiosité, mais pour nous protéger, contourner le danger. Celui ci est partout, il est où je suis et où je ne suis pas !
Champ de ruines, laissé là, reconstruit un peu ailleurs avec quelques pierres d'avant, de l'histoire d'hier, pour tenter de rafistoler celle d'aujourd'hui, tout en sachant qu'elle s'écroulera demain.
Il y a l'origine, la nôtre que nous avons déplacée, car les ressources ne sont plus suffisantes pour nous y maintenir, ou elle est trop délabrée. Nous avons quand même pu emporter quelques bagages, témoin d'une âge d'or, bribes pas trop encombrantes pour tenter de rebâtir quelques mètres plus loin où l'herbe semble plus verte. Mais les ruines sont là, sont là bas, et ce là bas nous obsède. Il y reste un morceau de soi, abandonné. Mais quoi ?
Les souvenirs partis, ensevelis sous la lave du chagrin et de la souffrance, d'une douleur qui hurle tellement fort que rien n'y fait. Archéologie ? Pour quoi et pour qui ? Resterons-nous alors figés pour l'éternité dans un champ de douleur ?

Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne
Crédit photo @brigittedusch

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Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
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Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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