Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

dimanche 17 février 2019

Le survenir du souvenir



Soleil trompeur, souvenir moqueur, mémoire rumeur
On pense avoir été, avoir vécu, avoir aimé, avoir ! A voir.
On s'accroche à des souvenirs confectionnés, raccommodés, assemblés pour faire une belle histoire inscrite dans la mémoire, jusqu'au jour où tout s'écroule, tout fout le camp, l'histoire est cousue main certes, pour demain également, mais surtout elle est cousue de fils blancs.
Un pan de vie tout entier, tombe : nous voilà devant la nudité originelle, notre être seul, qu'on ne peut cacher, et qui se révèle brutalement, comme un éclair, comme une fulgurance évidente. Mais pourquoi ? Pourquoi je n'ai jamais vu ça comme ça ? Pourquoi toute cette dentelle, ces fioritures assemblées au fur et à mesure, construite si bien qu'il n'y avait aucune faille pour s'engouffre ? Pourquoi Tout cela n'est qu'un château de cartes, balayé par un coup de sirocco.
Le souffle du vent, Eole notre ami, nous révèle enfin notre propre mensonge.
Si la chute est douloureuse, on s'en relève et plutôt bien car la vérité est souvent bonne à savourer. Notre vérité enfin qui montre à voir, nous montre à voir, le sujet nu, sorti tout droit de nulle part, exfiltré d'un mauvais scénario qui nous a permis de tenir tant bien que mal jusqu'ici.
Il faut bien vivre, mais il faut vivre bien, ce n'est pas la même chose.
Et pour bien vivre et vivre bien il vaut mieux ne plus se mentir, affronter le Réel, se plonger dans une vérité qui reste en fin de compte la réalité
Plus de rêves, d'illusions et de tricotage élaborés savamment mais qui au fond ne tiennent pas debout, mais dont les bouts partent dans tous les sens.
C'est un surgissement, une révélation, un bondissement de l'âme et de l'esprit, c'est tout en même temps, un état de grâce qui nous emporte dans le tourbillon de l'Univers dont nous sommes qui est nous, dont nous sommes issus, en toute vérité absolue.
il n'y a rien d'autre le reste n'est que décor et decorum, un Hollywood de paillettes et de stuff, carton pâte, pale chewing-gum mâché et remâché pour s'imprégner d'une fausse identité usurpée, et surtout mal digérée.
Faisons fi de tout ça, tabula rasa, et commençons à vivre, débarrassons nous de ces oripeaux qui nous collent à la peau ou sont devenus trop grands. Ces souvenirs encombrants nous empêchent d'avancer, on s'y est accroché comme un naufragé pour gardé la tête hors de l'eau et ne pas mourir, Mais ne pas mourir, survivre, n'est pas vivre.
Nul ne peut vivre dans l'ombre d'un souvenir écran, écran de fumée d'une réalité qu'il a eu peur d'affronter, il est temps maintenant de se libérer, de jeter les chaines et de sauter l'obstacle et enfin de choisir. D'élire,  de s'élire et de se désigner, enfin de renoncer aux mensonges, aux illusions à un passé soleil trompé.
C'est à nous de construire demain, de le faire chanter, en laissant de côté les morceaux épars d'une vieille chanson composée de mensonges et de faux semblant, pour que demain soit chantant c'est à nous et à nous seul de le faire surgir, de révéler au grand jour, notre singularité, notre spécificité, celle qui fait que nous sommes ce "Je" dans sa simplicité, sa complexité, sa beauté et sa force.
Il faut vivre pas parce qu'il faut, mais parce qu'on veut.


Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne
Crédit photo @brigittedusch 

dimanche 10 février 2019

La nostalgie de l'oubli


Oublier, oubli, images qui se délitent dans la mémoire, qui ne reviennent plus à la vie, ou presque ; l'ombre d'un souvenir, l'ombre d'un avant, d'un avant de sa vie, qui n'est plus, car on a grandi, on est parti, on a quitté
Oublier les lieux de l'enfance, pas tout à fait, mais quand même !
Ne plus arriver à se situer, se rendre compte que ça fait "si longtemps" !
Que le temps a passé et que nous sommes à l'hiver de notre propre vie
Comme si notre mémoire n'avait plus de réserve, d'énergie, comme si ces souvenirs là, très précis étaient enfouis si loin qu'ils ne pouvaient ressurgir, comme s'ils avaient pris la fuite, à notre insu, sans nous prévenir
On ne s'attend pas à oublier, oublier les bonnes choses, les instants, les moments, l'enfance heureuse ou pas heureuse, pas tout à fait malheureuse, douloureuse ou pas vraiment douloureuse
On est heureux de se replonger, de revivre, de revoir, de se retrouver des années en arrière. Pourtant ! le cœur bat, le sourire parfois, les larmes de joie, de dépit, de regret, de tristesse.
Nostalgie ?
Mais de quoi c'est fait la nostalgie ? D'un regret, d'un manque, d'un vide, d'une attente, d'une illusion… Perdus à tout jamais ? Ou pas tout à fait ? Il n'en reste que des morceaux, des fragments épars, dans tous les coins de la mémoire, partis, en vrac, impossible de refaire l'image, de recoller les bribes, de remettre de l'ordre, un champ de ruines, en noir et blanc
Nostalgie !
Les larmes parfois coulent, les yeux brûlent, devant le souvenir oublié, la photo jaunie avec les copains de classe, la neige en décembre… On se retrouve plongé dans un monde oublié, fini, terminé, classé, jeté aux oubliettes, changé, bouleversé, on ne reconnait rien, ou si peu, on se demande qui c'est ? Quand c'est ? Et on ne sait plus très bien
Mémoire infidèle qui nous fait défaut, cruellement, on pensait savoir, on pensait être de là ; pour au bout du compte, se rendre compte, que non, une fois encore il ne s'agissait que d'un bref passage dans un monde qu'on a voulu faire sien pour être enfin, enfin de quelque part.
Rien ; il ne reste presque rien, que des sons, des traces, impossible archéologie d'un champ de ruines qu'on ne peut reconstituer, tout est tronqué, biaisé par des souvenirs, écrans de fumée, enfumage de l'attente et de l'espoir d'avoir un lien, d'être attaché à un lieu, un coin de terre où nous avons passé seulement quelques années. Courte vie, vie de l'enfance, bref moment qui ne pèse pas lourd lorsqu'on arrive au bout d'un chemin parcouru toujours trop vite, en s'oubliant la plupart du temps. Pour quoi ?
Il n'est rien de plus vivant que d'être d'ici, ou d'ailleurs, peu importe mais de quelque part. Pourtant pour certains ce n'est pas possible, ils sont partout, et de nulle part. Vagabonds éternels, nomades universels ils vont et viennent là où le vent les emporte, les amène, les emmène et parfois les ramène.
Pour nous toujours le vent se lève, il faut partir, encore et encore, les semelles au vent...
Infime espoir que le souvenir revienne à la mémoire, Inutile attente de s'y retrouver intacte. Nous sommes toujours l'étranger de l'autre, l'étranger des lieux si singuliers et impermanents qui ne gardent rien de nous mais qui laissent en nous imprimés ces tatouages invisibles cachés au fond de l'âme, qu'ils ne faut peut-être pas réveiller.

Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne
Crédit photo, @brigittedusch

dimanche 3 février 2019

D'un moi à l'autre


De moi à moi, de moi à toi, de moi à l'autre
Mais quel autre ?
Y a t-il un autre, un autre présent à lui même et présent à moi ? 

Suis-je présent à moi ? Suffisamment pour être présent à l'autre ?
Il dit : " j'ai toujours fait passer l'autre avant moi"
Elle dit : "Je ne dis jamais non à l'autre"
Il et elle disent "Il faut en laisser pour les autres, il faut s'oublier pour les autres, moi, ce n'est pas important, mais l'autre si, c'est important, moi, tant pis, ce n'est pas grave, je laisse ma place, ma part à l'autre, je n'ai pas besoin"
L'autre
Et moi et moi et moi ?
Pourquoi cette abnégation, ce déni de moi, de mon "Je" pour l'autre ?
Qu'attend ce "je" en échange ?
Y a t-il donc un échange ? Une attente ? Et laquelle ?
Le regard de l'autre, la parole de l'autre, les mots de l'autre
Etre aimé de l'autre !
Sûrement un peu de tout ça, au point de s'oublier, de s'absenter de soi, pour l'autre au détriment de son "je"
De son "Etre".
Se fondre dans l'autre, se laisser aller à cette confusion pour exister, en s'extrayant de soi.

L'oubli de soi, l'abandon de soi, s'absenter de soi, un peu, beaucoup, beaucoup trop parfois au point de ne plus savoir qui on est. Au point de ne plus savoir être, être à soi, au monde et à l'existence
Mettre son "je" au ban de soi, dans une parenthèse qui se referme sans un bruit, lentement, insidieusement, sans un mot pour enfermer dans un piège terrible celui qui devenu aveugle a jeté les clés aux oubliettes.
Abnégation, sacrifice. Pourquoi ? Qui décide de ça, comment et pour quelles raisons ? La peur, toujours la peur, notre amie qui devient notre pire ennemie, la peur de soi, la peur d'être, d'être délaissé, abandonné, pas aimé… Par l'autre qu'on imagine vouloir, demander, exiger de soi.
Mais ?
Mais quoi ? Etre sûr, certain de ça ? L'autre exige t-il ? Et si tel est le cas ; mais quand bien même ! Ne pouvons-nous pas décider une fois pour toute que ce mince espace tenu de libre arbitre dont nous disposons peut servir à ça ?
L'autre bien sûr, mais pas aux dépends de soi, car l'autre aimant, bienveillant ne demande rien de tout ça, une telle demande serait une exigence inconvenante, inconvenable, impertinente, inimaginable. Ce ne serait pas une demande d'amour mais une instrumentalisation honteuse.
Ce sacrifice, ce faux amour de l'autre, cette fausse idée qu'il faut faire passer l'autre devant soi, aller au devant de ces désirs, ne rien lui refuser, s'oublier à tel point interpelle tellement !
Etre. Etre à soi ; n'est-ce pas le but de notre vie, sans oublier l'autre en lui laissant seulement une juste place, trouver la mesure, l'équilibre, la juste distance, celle nécessaire pour être avec l'autre, simplement.

Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne

Crédit photo @brigittedusch
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Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.

Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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