Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

dimanche 10 février 2019

La nostalgie de l'oubli


Oublier, oubli, images qui se délitent dans la mémoire, qui ne reviennent plus à la vie, ou presque ; l'ombre d'un souvenir, l'ombre d'un avant, d'un avant de sa vie, qui n'est plus, car on a grandi, on est parti, on a quitté
Oublier les lieux de l'enfance, pas tout à fait, mais quand même !
Ne plus arriver à se situer, se rendre compte que ça fait "si longtemps" !
Que le temps a passé et que nous sommes à l'hiver de notre propre vie
Comme si notre mémoire n'avait plus de réserve, d'énergie, comme si ces souvenirs là, très précis étaient enfouis si loin qu'ils ne pouvaient ressurgir, comme s'ils avaient pris la fuite, à notre insu, sans nous prévenir
On ne s'attend pas à oublier, oublier les bonnes choses, les instants, les moments, l'enfance heureuse ou pas heureuse, pas tout à fait malheureuse, douloureuse ou pas vraiment douloureuse
On est heureux de se replonger, de revivre, de revoir, de se retrouver des années en arrière. Pourtant ! le cœur bat, le sourire parfois, les larmes de joie, de dépit, de regret, de tristesse.
Nostalgie ?
Mais de quoi c'est fait la nostalgie ? D'un regret, d'un manque, d'un vide, d'une attente, d'une illusion… Perdus à tout jamais ? Ou pas tout à fait ? Il n'en reste que des morceaux, des fragments épars, dans tous les coins de la mémoire, partis, en vrac, impossible de refaire l'image, de recoller les bribes, de remettre de l'ordre, un champ de ruines, en noir et blanc
Nostalgie !
Les larmes parfois coulent, les yeux brûlent, devant le souvenir oublié, la photo jaunie avec les copains de classe, la neige en décembre… On se retrouve plongé dans un monde oublié, fini, terminé, classé, jeté aux oubliettes, changé, bouleversé, on ne reconnait rien, ou si peu, on se demande qui c'est ? Quand c'est ? Et on ne sait plus très bien
Mémoire infidèle qui nous fait défaut, cruellement, on pensait savoir, on pensait être de là ; pour au bout du compte, se rendre compte, que non, une fois encore il ne s'agissait que d'un bref passage dans un monde qu'on a voulu faire sien pour être enfin, enfin de quelque part.
Rien ; il ne reste presque rien, que des sons, des traces, impossible archéologie d'un champ de ruines qu'on ne peut reconstituer, tout est tronqué, biaisé par des souvenirs, écrans de fumée, enfumage de l'attente et de l'espoir d'avoir un lien, d'être attaché à un lieu, un coin de terre où nous avons passé seulement quelques années. Courte vie, vie de l'enfance, bref moment qui ne pèse pas lourd lorsqu'on arrive au bout d'un chemin parcouru toujours trop vite, en s'oubliant la plupart du temps. Pour quoi ?
Il n'est rien de plus vivant que d'être d'ici, ou d'ailleurs, peu importe mais de quelque part. Pourtant pour certains ce n'est pas possible, ils sont partout, et de nulle part. Vagabonds éternels, nomades universels ils vont et viennent là où le vent les emporte, les amène, les emmène et parfois les ramène.
Pour nous toujours le vent se lève, il faut partir, encore et encore, les semelles au vent...
Infime espoir que le souvenir revienne à la mémoire, Inutile attente de s'y retrouver intacte. Nous sommes toujours l'étranger de l'autre, l'étranger des lieux si singuliers et impermanents qui ne gardent rien de nous mais qui laissent en nous imprimés ces tatouages invisibles cachés au fond de l'âme, qu'ils ne faut peut-être pas réveiller.

Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne
Crédit photo, @brigittedusch

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Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.

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Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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