Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

jeudi 5 janvier 2012

Etre et devenir

Partir Revenir

J'ai revu ce film hier, revu ?
Pourtant il m'a semblé le voir pour la première fois...
Encore une fois.
Il est vrai que les films de Lelouch se ressemblent même s'ils sont à chaque fois différents. C'est là, tout le paradoxe, une sensation de déjà vu, parfois..
Des thèmes récurrents, oui, souvent, la mort, la guerre, la délation, la vie, le désir, l'amour, le questionnement de cet au delà inconnu et présent... La réincarnation
Un film singulier porté par la musique, omniprésente, parfois dérangeante, tellement ! Au point  que l'envie de couper le son me prend tellement c'en est trop ! Stop !
Une musique qui rythme, qui parle, qui dit, qui psalmodie...
Une musique ! Rachmaninov concerto n°2....
Porté par la musique l'histoire narre l'Histoire.
Celle de la guerre, celles de gens ordinaires.. Pas tant que ça pourtant...
Oublié alors  ? Je n'en sais rien
Comme à chaque fois que je regarde ses films, je suis heureuse, ravie, portée, emportée, subjuguées, charmée, enchantée, et mal à l'aise aussi.
Parfois tout cela en même temps !
C'est aussi cela le paradoxe. J'aime ne pas aimer, j'aime ce qui dérange, je suis dérangée parce que j'aime....
L'amour n'est jamais simple...
Mal aise...
 Peut-être parce que justement il s'agit de la vie ordinaire, pas si ordinaire que ça, et que les gens qui font cette histoire de l'Histoire pourraient être n'importe qui.
Parce que l'histoire pourrait être vraie, aurait pu être vraie, est peut-être vraie.
Réincarnation ? Ce thème ne m'obsède pas, je ne crois pas en un au dela possible, mais après tout je n'en sais rien, alors pourquoi pas ?
En revanche... la délation.
Ordinaire,  dénoncer ? Pourquoi ? Volonté de nuire, méchanceté, haine,  vengeance ? Non. Pas seulement. Le film montre que l'amour, la jalousie peuvent conduire à la peur, la peur à la haine, de l'autre puis la haine de soi
Au point que vivre devient impossible !
Vivre nous le savons tous est difficile, demande des efforts, de l'énergie, demande de l'envie  pour se maintenir en vie. Vivre pour ne pas mourir...
Et la musique porte cette envie d'en vie. De ne pas mourir, de vivre pour comprendre, pour savoir Qui ?
Savoir ce qui dérange et pourquoi, savoir ce qui questionne, interpelle... Pour aller au delà.
Voir un film c'est aussi s'approprier l'illusion, faire de celle ci, qui n'existe pas, une réalité, afin d'accéder au réel. A sa propre réalité.
Regarder un film c'est aussi abandonner cette illusion, progressivement, comprendre que cela n'est pas, n'est pas réel, et comprendre le présent, construit par le passé.
Filmer est tout autre, je pense, il y a montrer à voir, à entendre et à écouter, tout comme écrire c'est laisser, quitter, donner un peu de soi à l'autre. Dans l'attente d'une response.
res spondeo ...promettre à son tour...
Une histoire de rencontre. Ou pas,
L'adresse... A quelqu'un qu'on ne connait pas. Si l'art n'est pas sans objet il n'est pas non plus sans adresse. Il faut la présence de l'autre pour que le message prenne sens.
L'autre n'entend pas forcément, ne voit pas forcèment ce qui est donné à entendre ou montrer à voir...
Forcèment.
Il y a de nombreuses années un jeune patient me dit "j'ai pleuré en entendant ça (il parlait de musique baroque) je n'y comprends rien à la musique, je n'ai jamais appris quoi que ce soit là dessus, la musique classique, un truc de baltringue...
Mais c'était fort, ça me prenait là, aux tripes, ça me tordait le ventre, j'étais tout retourné, et jai pleuré ....j'ai rien dit, on se serait foutu de moi... vous comprenez.. "
L'Art avait atteint sa cible... ! Tiré, touché, pris, capturé...
Le cinéma c'est pareil, les images, le son, les dialogues tout emporte, nous transporte dans la réalité de l'illusion.
Il se joue des choses dans cet espace là, intime entre le réel et l'illusion, le dedans et le dehors, infime espace privilégié où l'on peut déposer, reposer, questionner... Mais quoi ?
Ca touche, ou ne touche pas !
Ca parle ou ça ne parle pas
Partir Revenir.. Me parle, me touche, me transporte.... Me questionne. Surtout !
Dans un précédent article je parlais de comprendre, de pardon aussi. Les scènes de l'arrestation me soulèvent le coeur, me donnent la nausée
Le réel dans l'illusion, car ce n'est pas dans la fiction. L'histoire, la vraie, les archives, documents historiques le disent...
Ce n'est pas tant l'arrestation, mais la délation, la gendarmerie française, la Gestapo... Arrêter d'autres français, non d'autres, autres parce que juifs... Une mise à mort, sans état d'âme, un combat inégal ! Des gens ordinaires ou presque...
Mélés à tout ça. Sordide, infâme..
Au nom de quoi ?
"Non je ne pardonne pas, ça je ne peux, ne pourrai jamais pardonner.. Non jamais ! "
Cette phrase là m'a échappé, s'est échappée de l'espace intime,  de cet intérieur du dedans où se mélent réalité et illusion, où se joue "la création du monde"...
Car cette scène, illusion du cinéma fait irruption dans le réel, intrusion sordide d'une réalité qui l'est tout autant !
Trauma... Effraction dans le réel, et dans cet espace intime...?
Une de mes amies me disait à la suite de "Requiem pour un mur" je comprends ta vigilance... Vigilance ? Peut-on l'être, peut-on protéger l'homme de lui même ?
Traverser l'obscur, quitter les ténébres pour gagner la lumière est un parcours du combattant, c'est un combat qu'on engage pour la vie, pas pour la survie. Pas pour vivre à demi. Pour vivre enfin, pour se donner naissance, s'offrir ce cadeau là,  pour dire je, je veux !
C'est peut-être ça, l'illusion du cinéma, de ce cinéma là ?
Un cinéma qui parle, mais qui témoigne...Aussi.
Mais tout comme mon jeune patient...
Tout n'arrive pas forcément à destination. Encore faut-il être présent à l'adresse pour recevoir ce qui nous est destiné.
Pour tenir la promesse et promettre à son tour
Encore un rendez-vous.. Qui peut-être manqué, raté.
Une rencontre avortée...
Ou pas...
Une rencontre troublante, inquiétante, dérangeante, douloureuse... Mais aussi, merveilleuse, puisqu'elle nous permet ce face à face unique avec notre être seul, avec ce moi inconnu, ce je qui est un autre car conjugué à tous les temps du passé, un je à recomposer pour un présent futur.
Un je qui seulement parce qu'il subit ces histoires et ces métamorphoses peut affirmer être un  je suis.
Enfin !
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Nota bene

Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.

Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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