Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

jeudi 2 mars 2023

S'être manqué (l'emprise)



S'oublier, se sacrifier sur l'autel du désir de l'autre
Se mettre en retrait, de côté, se mettre au ban de soi, s'abandonner au vide et au Néant.
Vivre ou survivre ?
Etre vivant ou mort à la vie ?


On ne peut être mort et vivant, il faut choisir. Pourtant on peut être mort à soi, mort de soi. 
C'est une tragédie, un traumatisme terrible, un clivage ou une dissociation. Laisser son soi, son être quelque part, dans un lieu d'où il ne sortira plus afin d'avancer de vivre à demi vivant et demi mort
Il reste pourtant au plus profond de la mémoire quelques bribes de ce Je, de cet être réprimé, corseté, emprisonné et réduit au silence absolu. Une petite musique, comme le chant de la langue maternelle celle dans laquelle on rêve et pense. Pourtant cela semble si loin.

Se reléguer à l'isolement.
Isolé, camisolé, ligoté de soi en soi.
Prisonnier de sa vie, otage du désir de l'autre, enchevêtré dans les noeuds du filet habilement tressé qui nous a capturé et ravi à nous même
Qui est ce Je ?


Etre balloté sur des chemins qu'on n'a pas vraiment choisi, se retrouver au creux d'une ornière et s'agiter pour tenter de s'en extraire, être absorbé par un tourbillon, se débattre et mourir.

 Car on sait que de ça on ne sort pas.

Alors vient le silence lourd et pesant. Alors vient la douleur, alors vient la peine, alors vient la colère.

Nécessaire parfois elle n'est même plus... Il n'y a plus rien, plus aucune émotion, plus de larmes, plus d'envie, plus rien de vivant. 
Moi inerte et sans vie, vidé de tout, sombre fantôme errant dans les ténèbres au milieu de la lumière aveuglante d'un soleil indécent et insultant.

On s'abandonne au fond de la tranchée que nous avons creusée pour nous protéger, on se laisse aller au froid, à la boue et à la vermine de la vie, au bon vouloir de l'autre, priant secrètement qu'il va nous asséner le coup funeste enfin : car on n'a même pas le courage de le faire, ni même de charger en hurlant à coup dans l'attente du vol arrêté.

Attendre au fond de son désespoir en espérant tout de mêle que tout va bientôt finir, qu'un tir, un obus va enfin anéantir tout ça, la vie et la souffrance, l'espoir et le désarroi.
Que tout va disparaître dans le bruit, la fumée et la poudre ! 
Disparaitre à jamais, ne rien laisser

Rien. S'oublier, se manquer.


Pourtant, il reste parfois si on sait bien écouter, regarder, une petite étincelle, un tout petit bruit qui dit "non, non ce n'est pas le moment, il y a encore des choses à faire, à vivre, à aimer".
Il est mince ce fil, il est tenu, il peut se rompre à chaque instant, il faut aller le chercher loin, le tirer, le garder, le tenir et ne pas le lâcher. 

Il faut aller chercher ça au fond de soi. Regarder ce soi perdu mais pas disparu
Alors ce morceau de soi à terre n'est pas mort, il reste un soupçon de vie, il est en miettes, au fond, au plus profond de son être, éparpillé par le souffle des grenailles.
On ne laisse pas un homme à terre, on le ramène. j'ai appris ça dans une autre vie.
On ne laisse pas un homme tant qu'il y a un souffle de vie. Alors vais-je laisser ce moi blessé, caché, en morceaux épars au fond de moi ?
C'est à moi de décider, c'est à moi de faire le chemin inverse dans ce terrain miné, c'est à moi d'y aller !
C'est à moi d'aller rechercher ce moi oublié mais qui me manque, car sans lui je me suis manquée. Alors oui, ça vaut le voyage. C'est le prix de la vie.

Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne
Crédit photo @brigittedusch

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Nota bene

Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.

Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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