Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

jeudi 20 mars 2008

Celui qui reste

On en parle plus volontiers
Il en parle aussi, non qu'il en parle volontiers, mais sa souffrance parle, en parle.


Etre quitté, laissé, abandonné, cela peut arriver à chacun de nous, il n'y a pas de profil particulier, personne n'est à l'abri. Je dirai même que dans une vie, nous avons tous été un jour quitté, laissé, abandonné.

Enfant, adolescent, adulte, vieux.... Il n'y a pas d'age pour être laissé !

Mais nous réagissons, réagirons chacun à notre manière, parce que nous sommes tous différents, uniques, mais aussi et surtout parce que nous avons tous une histoire singulière, un rencontre particulière avec la séparation.

J'ai évoqué rapidement dans un article consacré à la solitude à quel point la constitution et l'élaboration de liens et d'une relation sécure permettait de faire face aux événements de la vie.
Traumatismes, trauma, choc, stress, maladie, mais aussi et surtout à la séparation, l'abandon, au fait d'être quitté.

La première séparation est notre venue au monde. Séparé de l'utérus maternel, d'un milieu aquatique, à priori en sécurité, on se retrouve au prix d'immenses souffrances projeté dans un monde froid, éblouissant, au milieu d'inconnus.
On coupe le cordon, celui qui nous reliait au dedans, et nous voici au dehors, brutalement...!

Le bébé pourtant continue d'avoir un lien fusionnel avec sa mère, ou celle qui lui en tiendra lieu. Cette proximité le rassure, il apprend, ou n'apprend pas, que le départ de celle ci, ne coïncide pas avec l'abandon. La mère revient, elle reviendra. Ce temps d'absence est nécessaire et lui permet de se construire. Partir/revenir pour partir et revenir encore. Pour lui permettre à lui aussi de partir, et de revenir.
L'amour reste le lien.... Présent ou absent, l'amour est là. L'absence, source d'angoisse, ne l'est plus "tant que ça" puisque l'être aimé ou investi va revenir. C'est une question de temps.

L'enfant apprend petit à petit qu'il existe d'autres "autres" que ses parents, il se socialise peu à peu, pour devenir autonome. Ce qui ne signifie pas se passer des autres. On ne s'en passe pas, mais on peut vivre en leur absence. Leur absence est parfois nécessaire, nous avons aussi besoin de solitude. Même si on ne le voit pas, ne l'entend pas, celui qui est parti reviendra..

C'est pourquoi la mort, chez l'enfant comme chez l'adulte est particulièrement traumatisante et éprouvante, c'est une effraction ! l'être aimé, ou ce qui est perdu, l'est à jamais, sans aucun espoir de retour.

La rupture est une séparation non désirée, non souhaitée, brutale, innatendue. Le sujet est quitté. On le quitte, il est laissé. Abandonné. L'autre n'est pas mort, il est seulement parti, mais il a décidé qu'il ne reviendra pas.
Ainsi pas de retour possible, perte de l'autre, qui disparait, mais qui n'est pas mort. Cet autre, qui laisse, part parfois pour un autre.
Celui qui reste, doit faire son deuil, son deuil de l'autre, son deuil de la perte. Accepter qu'il n'y aura pas de retour possible... Long et douloureux travail, dont l'objectif est d'apprendre à rester ! et rester seul.

L'abandon d'un enfant est différent. Ce "laisser" là peut prendre de multiples visages, une mère peut accoucher sous X (comme le cas de ma patiente dans mon précédent article), mais des parents peuvent tout en étant là, ne pas s'occuper de leurs enfants. Il ne s'agira pas d'un abandon au sens juridique du terme, mais ils seront laissés.... livrés à eux mêmes ou à d'autres autres... à leur pouvoir.

Abandon et oubli, ces mots reviennent souvent dans la bouche de ceux qui ont vécu ça. "Mes parents m'ont abandonné... J'ai fais des foyers.... Des familles d'accueil..... Mais on me laissait là....On ne s'occupait pas de moi...." Oubliés !
Et l'oubli c'est terrible et terrifiant
Les témoignages sont poignants, des enfants laissés, comme des objets, là, sans attention, sans un mot, sans tendresse, sans amour.
Celui qui reste !
Le reste, le trop, ce dont on ne veut pas, dont on ne veut plus car on n'est rassasié, ce qu'on laisse.

Comment se construire ainsi, avec ce fardeau là ? avec ce bagage là ? Comment donner de l'amour ?
Des femmes me disent n'avoir jamais voulu avoir d'enfant "trop peur de ne pas pouvoir... les aimer, les élever...Non, je n'avais pas envie de reproduire ça, j'ai préféré que ça s'arréte"

Mettre un terme à cette spirale infernale
Ne pas enfanter, ne pas donner la vie ! Celle qu'on leur a infligé est déja tellement pénible !

D'autres au contraire ont tellement envie. En vie de donner la vie, pour prendre une revanche et aimer ! Donner l'amour qu'elles n'ont jamais reçu. Réparer ?

Certaines reproduisent encore et encore le seul scénario possible, n'ayant pas réussi à comprendre et casser ce cercle vicieux qui les enferme parfois depuis des générations...

Pas facile d'être celui qui reste, pas plus que d'être celui qui laisse..
Une rencontre ratée, un rendez vous manqué encore !
Parfois celui qui reste essaie de retrouver et rencontrer celui qui l'a laissé. Chemin oh combien pavé de douleur, d'espérances, de fantasmes, mais de bonheur quelque fois.

Ce désir de savoir, de savoir ce qui s'est passé ? Pourquoi ? Pourquoi n'étais je pas aimable ? Digne de l'amour ? digne d'intéret ? Ce désir là est légitime.
Quête impossible bien souvent !

La thérapie, l'analyse, ne permettent surement pas d'y apporter une réponse, mais parfois elles permettent à certains de vivre avec "ça". Avec ce traumatisme terrible. Elle permettent de vivre, de construire, de se donner la vie une nouvelle fois.
De renaitre à soi même !
D'être en vie, et d'avoir envie !
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Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.

Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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