Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

jeudi 4 juin 2009

Lettre à Arsel

Ils se sont peu connu
Que dis-je presque pas du tout...
Elle se souvient peu de son visage...
C'est un peu flou
Un homme gentil et doux.
Un souvenir d'enfance,
Ou plusieurs
Des souvenirs.... De fêtes et de surprises
Quand Il venait avec un de ses fils, voir un de ses autres fils, son père, à Elle,
Il venait de loin, de si loin
Elle était trop petite pour tout comprendre
Ce n'est que des années plus tard
Qu'en cherchant, qu'en questionnnant, qu'en interrogeant, qu'en écrivant,
Qu'en demandant,
Elle a compris qu' Il venait de nulle part
Mais on vient tous de quelque part ?
Tu le sais ? Tu ne le sais pas ?
Tu ne veux pas savoir ?
Tu n'as jamais cherché à savoir
A vouloir savoir ?



Bien des années plus tard
Elle a lu en tremblant,les larmes aux yeux....
Les recommandations de ta maman
Qui t'a déposé un jour, celui où tu es né
Car elle ne voulait pas t'élever
Te garder auprès d'elle, avec elle...
Elle avait déjà un enfant
Tu avais donc une famille
Ou presque
Elle t'a donné ton prénom, étrange et curieux.
Arsel...
Elle t'a donné aussi une religion
La sienne
Sûrement pour effacer celle....
De celui...

Il venait de loin de très loin
D'un si loin où le soleil brille toujours ou presque
Où il fait chaud souvent
Où le désert est roi...


Il lui plait à croire que,
Tu es un fils de Prince, de ces Hommes qui sont tous des Princes
Princes du vent, des sables et du désert
Qui est venu, un jour ici, si loin de chez lui,
Il ne lui reste rien, à elle, de cet homme là
Rien....
Si ce n'est l'histoire, la belle histoire
Elle n'en n'a hérité, Elle, ni
Les cheveux, ni les yeux ni le teint,
Ni le regard...
Seulement la soif de liberté
Et ce n'est pas rien !
L'amour de la Vérité
De ces Hommes du Vent, des Sables et du Désert
De ces combattants farouches, qui ne se rendaient pas, jamais.

Quand ta mère est venue, plus tard, très tard, trop tard
Un jour te voir
Tu ne l'a pas regardé,
Pas un regard pour elle dans sa belle voiture
Dans sa belle toilettte
Tu ne l'as pas reconnu,
Tu l'a rejetée,
Abandonnée à ton tour
D'elle, tu n'as pas voulue
Trop fier !
Comme l'aurait été ton père, ou
Trop de douleur, enfouie, trop de peine, trop de chagrin, trop de souffrance, trop de trop d'enfance qui fait mal, qui fait seul, qui fait plaies, qui fait..... Sans amour, sans maman, sans parents, au vent, à la pluie.....
Arsel, moi, je suis fière de toi.
Je suis un peu de toi
Sans le savoir, tu m'as donné tout ça, tu as fait ça de moi.
Moi, je sais d'où je viens
Et c'est grâce à toi
Merci !

A la mèmoire des Spahis. A mon Père, à mon Grand Père. A mon arrière Grand Père.
A mes amis d'Alger, d'Oran, à Faïza mon amie, à Salim mon ami.
A Mohamed K, trop tôt parti, tu me manques....Tu nous manques...

Eternité

Qu'est ce que l'éternité ?
Ce sentiment de toujours, de tout le temps. Une sorte d'immortalité, mais plus encore ?
Comme s'il n'y avait pas de fin, jamais, une vie, une ligne, qui ne s'arréte pas, qui se poursuit indéfiniment, toujours, sans arrêt.
Sans fin....Sans...
Mais celle ci se pense, est pensée par l'homme, qui est mortel, pas éternel, qui ne peut se faire une représentation exacte d'une éternité qu'il ne peut considérer qu'en tant qu'éventualité....Que possibilité,
Eternité, versus mortalité ?
Qui est éternel ?
Quoi est éternel ?
Qu'en penser ? Et qui peut penser un tel concept ?
Que revêt-il, dans l'imaginaire de celui, de ceux qui n'en n'ont pas même l'illusion
Croire que tout est éternel, que l'autre, peut nous survivre, oui, mais pour combien de temps, un temps un peu plus long que celui qui nous est imparti ?
Je rencontre souvent des patients agés, cette semaine le plus jeune de mes patients est né en 1921, c'est la première fois qu'il est hospitalisé, il n'a jamais été malade et conduisait sa voiture la veille...
Sa fille ne comprend pas, elle demande à me rencontrer...Son père, brusquement semble souffrir de confusion "Il ne m'a pas reconnu, il voulait dormir..."
Elle pleure. Elle m'explique ce qui s'est passé, et ne comprend pas, "il n'a jamais été malade"
Doucement, tout au long de notre rencontre, elle se surprend à me dire "nous le croyions éternel"


Nous explorons alors ce sentiment, cette représentation qu'elle décrit ensuite comme "idiote" avant de se reprendre, pour préciser "je sais bien qu'il devient vieux et qu'il partira, pour toujours, mais je n'y avais jamais vraiment pensé"

Le Père, tel un roc, invincible, éternel.. Là pour toujours, tout le temps...Comme s'il ne pouvait jamais disparaitre. Eternité pour qu'il n'y ait de jamais, jamais
Mais toujours un toujours

On se l'imagine cette éternité, comme un espace immense, un ciel sans fin, une mer sans fond... Est-ce possible voire imaginable
Cela semble terrifiant : "Vivre toujours est une idée terrible" me dit un jour un patient, et d'ajouter "je suis content de savoir qu"il y a une fin"
Une fin, un bout, un terme. Un quelque chose qui termine, qui cloture. La fin de la vie, qui serait alors, peut-être un fragment d'éternité, une part infime de ce Grand Tout.... ?
Nous ne savons pas éternel, pourtant nous ne nous imaginons pas autrement. La pensée de la finitude n'est pas heureusement tout le temps au centre de nos préoccupations.
Nous sommes pourtant dans la finitude, la vie est une finitude, la finitude est l'éternité ?
"L'éternité, c'est après la mort" me dit calmement une patiente agée, 'j'attends avec impatience que Dieu m'appelle, je suis préte, depuis longtemps"
Cette fin, cette mort, attendue était pour elle le début d'un autrement pour toujours, mais un autre lieu sans fin....L'éternité donc, espace sans début, sans fin, sans limite, sans cadre.
Tout comme la mort, l'éternité est difficilement représentable,
Pas même un Eldorado, un paradis ou un enfer où errent pour toujours les âmes des défunts...
Un vide, qui donne le vertige; si on se penche un peu trop
Basculer dans l'éternité pour l'éternité. Oui, mais pourquoi et pour qui ?

Pourquoi et pour quoi y faire ?
Y a t-il quelque chose à y faire ?
Vaut-il le coup de spéculer sur un monde sans limite, qui vivra éternellement... ?

Effrayant, terrifiant, rassurant, ennuyant peut-être ?
Cette notion d"éternité, d'un toujours pour toujours ou jamais est non seulement terrifiante, mais relève d'un certain terrorisme ou fachisme de l'âme, de l'esprit, une sorte de tonneau des Danaïdes, avec un perpétuel recommencement, comme une pendule qui marque et marque le temps, sans jamais de pause, de pause elle qui devrait enfin être éternelle.
Une condamnation à perpétuité, la plus terrible celle ci ! Pire que la peine de mort, si on part de l'hypothèse qui, je l'espère se vérifiera, qu'après il n'y a plus rien...
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Nota bene

Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.

Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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