Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

vendredi 29 mai 2015

Le chagrin

Le chagrin, la peine... Deux mots dont on ne connait pas vraiment le sens, mais dont on sait la douleur
Il y a bien la tristesse qui en émane, mais est-ce suffisant ? La douleur et la souffrance parfois s'en mêlent et se mêlent à cette perception qui fait mal à l'aise
Chagrin, peine et larmes, bleus à l'âme, de ces hématomes qu'on ne sait pas vraiment soigner ni même apaiser
Le sujet humain, on l'oublie souvent, trop souvent peut-être est un animal, comme lui il va panser ses plaies à l'abri des regards, il se terre alors pour panser ce qu'il ne peut alors penser sans trop de douleur, sans trop se déchirer, sans trop ouvrir encore cette blessure que rien ne peut comprimer, cicatriser.
La trace en sera indélébile, être de bleus et de bosses, de fardeaux de plus en plus lourds qui le font ployer sous la charge avant de s'effondrer
Tomber, tomber au champ d'honneur de la souffrance, tomber sans gloire ni artifice, mais tomber sans vraiment espérer pouvoir s'en relever
A quoi bon ? Se mettre debout encore et encore pour mieux prendre les coups, sans les rendre, car cela ne servirait à rien
Se tenir là prêt à encaisser encore la douleur, la perte, l'abandon pour se retrouver seul sur ce champ de batailles dont il ne sera bientôt plus que le seul survivant
Alors à quoi bon vivre ? A quoi bon survivre ? A qui survivre ? £
Etre mort parmi les vivants ou être vivants parmi les morts ?
Ne plus vraiment savoir, car le chagrin est si fort après la perte, la perte de l'autre ? Celui qui quelque part maintenait le fil tenu reliant l'espoir à la vie, qui malgré tout valait peut-être encore le coup d'être vécue ?
A présent à quoi bon ? Encore un deuil à faire, comme on fait les boutiques ou les musées, les expositions ou les excursions ? Se promener dans les couloirs d'une vie morose en explorer les chambres noires, aveugles et sourdes aux bruits de la rue qu'on veut fuir à tout prix pour se retrouver face à ce silence qui nous permet peut-être de mieux s'entendre
De mieux s'entendre pleurer, se laisser aller à ses larmes et laisser aller ces larmes de sel et de pluie, de verre et d'inespoir, ces larmes qui coupent et qui tranchent dans le vif faisant de l'exilé un étranger à tout et à tout jamais
Chagrin et peine pour plonger davantage en la solitude, pour s'immerger dans la douleur et n'en plus sortir.
Pourtant il faut être, encore et encore, se fatiguer à être, l'être étant, non plus en devenir, ni même en avenir, ne conjuguant plus rien, n'accordant plus le verbe singulier au pluriel des êtres qu'il a été, avant... Car il n'y a plus de maintenant
Il n'y a plus de présent. Tout s'éteint et tout se meurt, tout n'est qu'une illusion une construction de l'esprit où l'âme s'en est partie
Elle ne reviendra pas, il ne reviendra pas, il n'y a ni au delà ni en de ça
Il n'y a que poussière, nuit, obscurité, pluie et brouillard.
Tout s'assombrit et fait place aux ténèbres
Pourtant, malgré tout ça il faut aller et être, il faut faire aller...
Il faut tenter de vivre

Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne
Pour. C.A... RIP

lundi 25 mai 2015

Les silences

"Quelle musique le silence" Jean Anouilh


Le silence, les silences. Se taire, ne rien dire, ne rien entendre car il n'y a rien, pas de bruit. Cette suspension du temps, cette respiration sans bruit, cette musique qui ne s'entend pas...
Silence, rien, rien d'audible, rien qui ne s'entend, qui ne se dit.
Rien dans le temps
Sans bruit, sans faire de bruit, en l'absence de. Il y a de l'absence dans le silence, un retrait du mot suspendu en l'air, au vol, envolé peut-être, mais pas là...
Il ne se produit rien. O temps suspend ton vol !

On fait silence, on intime le silence, on réduit au silence, on passe sous silence... La loi du silence
On ne dit rien, on évite, par crainte, par peur, par ?
Cette écoute du silence chère à Paul Valéry est plus qu'une oxymore...
Que nous dit-elle, que nous enseigne t-elle ?
Comment entendre non seulement le silence, mais les silences, cette forme singulière de langage sans parole, sans son, sans mot, mais qui pourtant parle, dit, raconte.
Un langage pas ordinaire, pas courant, qui intrigue parfois fait peur, car il est inconnu... La parole rassurerait peut-être davantage ?

Notre monde n'est pas celui du silence, le son, le bruit nous accompagnent partout tout le temps nuit et jour, du téléphone au supermarché, les sollicitations audio-visuelles sont permanentes, omniprésentes. Elles plongent le sujet humain dans un univers aux sonorités destinées peut-être à combler l'absence ou la présence inquiétante de ce qui n'est pas mais qui devrait y être.
Le sujet perverti par le bruit, le sujet pervertit le silence
Lourd et intolérable qu'il lui faut meubler comme l'espace vide au là, tout près de lui.
Un silence obscur qui ne dit rien qui vaille et qui faille. Vide.

Ce vide terrifiant qui place le sujet face à lui même, face à ce miroir silencieux qui ne lui renvoie pas son image, mais pas même le son de sa voix. Ou alors ce murmure si faible qu'il ne l'entend pas.
La voix n'est-elle pas alors la voie du silence ?

Il y a des silences : les silences sont pluriels... Ils sont plusieurs et multiples, se multiplient au sein de cet espace qui se veut exponentiel pour mieux se reproduire et terrifier peut-être le sujet. Sujet impuissant qui ne peut supporter et qui ne peut maitriser ce qui s'impose à lui. Mais que faire ?

Parler alors pour ne rien dire, mais ce rien est déjà beaucoup, beaucoup trop, de trop de toutes les façons
Ce rien heurte l'obscurité du noir et du blanc
Blanc, car il y a une sorte de blanc, tache obscure dans cette noirceur là, la parole étant peut-être la preuve que... L'orage est fini ? Ou le contraire, la parole comme l'orage gronde et vient rompre le silence, le calme plat, la mer d'huile... Vient intruser, agresser d'une violence qui heurte la conscience et la rêverie.

Tais toi, ne dis plus rien, je ne veux plus rien entendre. Entendre ?
Entendre le silence
Qui n'est donc pas rien ?
Mais qu'est-ce alors que cet impalpable ?

Brigitte Dusch, historienne, psychanalyste


jeudi 7 mai 2015

"Ne pas pleurer"

- "Je ne veux pas pleurer, je ne dois pas pleurer... Verser des larmes, pleurer sur moi en fin de compte".... Murmure une analysante, tout en retenant ses larmes...
Qui viennent pourtant, mais qu'elle retient tant bien que mal au seuil du langage, au seuil de l'ouvert
Qu'elle tient et retient, fermé.
Pleurer, sur qui ? Sur soi.. ?
Pleurer dit-elle en fin de compte... En fin de conte en fin du compte, si toute fois on veut régler ses comptes.
En solde de tout conte ?

Mais faut-il aller alors au devant de l'histoire. Celle qui fait que les larmes arrivent, au seuil ?
Au bord.
Au bord des larmes.
Pleurer, laisser venir, laisser aller, laisser faire et lâcher prise.
Mais quelle prise ?
Qui est pris qui croyait prendre, pour se déprendre de ce chagrin, de cette peine, de cette colère, que les larmes disent, expriment en sortant au dehors
Au dehors du corps, au devant de l'autre.
Larmes, alarmer
Ces larmes qui parlent peut-être plus que des mots, ces larmes qu'on lâche ou pas. Ces larmes qu'on ravale, salées et qui ont le goût de l'amer, de l'amertume, de la mère, du manque, de ce manque qui colle, collage, qui colle à la peau, à la peau de l'âme.
Larmes de sel, larmes de miel, larmes qu'on lâche pourtant afin de se sentir plus léger, moins lourd.

Mais ne pas pleurer.. Il ne faut pas pleurer. Sèche tes larmes et sois fort. Injonction terrible que celle là ! Mais qui s'incruste et qui se fige, un homme ne pleure pas, pourquoi ? Pourquoi ne le pourrait-il pas ? Pourquoi ne le ferait-il pas ?.

"Tu ne pleureras pas".

"Il ne faut pas que je pleure, sur moi, sur ce passé qui n'avance pas, qui me bouffe qui me ronge et que j'avale jusqu'à la nausée, ce passé qui me hante, dont je rêve et qui me bloque dans mes rêves dans mon présent mon futur.. Il ne faut pas que je pleure et pourtant !"
Combien de mots et de maux qui sont ravalés, relégués au fond de l'âme, bloqués pour ne pas choquer, s'entrechoquer, s'entremêler... ?
Combien ?

"Je dois être faible, lâche, en tous cas pas quelqu'un de fort... " regrette ce jeune homme.
"Je suis un être sans courage..."
Etre fort, faire face, avoir du courage ? qu'est ce que ça veut dire, vraiment. Faire face à qui, à quoi ? Comment ?
"Qui pourrait m'aimer, vouloir de moi en sachant qu'il m'arrive de pleurer parfois, en sachant que les larmes.......... -silence-... je ne peux les retenir, alors je les ravale, c'est salé, ça pique, ça brûle et ça ne passe pas, ça reste coincé là au fond de la gorge, comme la peur, les larmes ont le goût de la peur, oui, c'est ça, je crois............................................. "
..........................................................
Le goût des larmes, amer et salé, le goût des larmes ?

Ne pas pleurer, ne pas se laisser aller, ne pas laisser aller ?
Parce que ça ne se fait pas, car un homme ne pleure pas ? Quand on est fort on ne pleure pas ?
Qui a dit ça ?
Pourquoi ?
De quelle vérité s'agit-il ?
Est-ce une vérité ?
Peut-être alors en faut-il du courage, en avoir de ce courage là pour laisser venir et advenir ces larmes, les libérer et se libérer de ce poids qui n'en finit pas, de s'en délester.
Lâcher ce qui fait mal, hors de soi...
C'est peut-être là que se loge le vrai courage, celui de ne plus avoir peur d'être soi..
D'essayer de devenir soi
Je pleure et je suis.

Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne.
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Nota bene

Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.

Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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