Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

mardi 10 novembre 2015

De l'esthétique du monument ? "14-18 des Hommes"

Monuments.. Aux morts... Commémoration... Souvenirs... Devoir de mémoire...
Etc...

Mes recherches sur les traumatismes de guerre me conduisent en 14 puis en 70, puis aux guerres napoléoniennes puis... ! Je remonte le temps, celui jalonné par les guerres, pas un siècle, parfois à peine une décennie. Je cherche à retracer ce traumatisme si particulier qu'est celui qu'inflige la guerre... Cette souffrance dont on ne parle pas, mais qui mine et détruit l'homme sans jamais lui permettre de retrouver la paix.

La guerre, on en parle ou pas, on se souvient ou pas, 100 ans maintenant... La première guerre mondiale, si proche et si lointaine pourtant c'était hier ou presque. Mais avant ?
Qui se souvient...
On se souvient des victoires, on ne commémore pas les défaites.

1870... Si loin, plus loin encore. Défaite, débandade, destruction, terrible humiliation... Dommages de guerre !
1870 que reste t-il ? De quoi se souvient-on ?
Quelques bribes encore peut-être dans les mémoires de ceux qui ont entendus parler ceux qui en ont entendu parler...
Ultimes traces...
Mais la mémoire collective ? Qu'a t-elle collectée, qu'à t-elle voulu transmettre de cette infâme défaite qui a nourri la haine jusqu'en 1914, prochaine guerre, pauvre victoire, combien de morts ? Combien de pertes ? D'hommes et de mémoire ?

Un long et douloureux chemin que nous parcourons mon fils et moi, des rencontres avec des histoires de soldats, hommes tués sur les champs de bataille sous le feu de l'ennemi, dans les ambulances de fortune suite à leurs blessures, éclats d'obus, de mortier ou autres grenailles, crachant leur poumons d'avoir respiré ces gaz toxiques.
Nous marchons sur ce parcours du combattant...
Nous avançons petit à petit, à reculons parfois dans les tranchées de l'horreur et du souvenir. C'est ce désir là, celui de ne pas oublier, de rendre l'identité et la vie à ces hommes pour que leurs noms ne soient pas oubliés.
Des noms gravés sur la pierre. Aussi... Nom, prénom une date et parfois un lieu.

Aujourd'hui devant nous se dressent à leur gloire des monuments, en France, en Allemagne, ailleurs, dans ces pays que la guerre, les guerres n'ont pas épargnés.. Mais elles n'épargnent personne !
Surgissant au milieu des places des villages, jouxtant les églises, ils changent à jamais le paysage.

"Passant arrête toi, prends un instant pour lire le nom de ces hommes tombés aux Champs de l'Horreur. Passant, souviens toi ! N'oublie pas !"

Terribles injonctions que celles ci, prenant à témoin le présent et le futur.
Mais quel message ce "monument" nous transmet-il ? Au delà du commerce lucratif qu'il représentait alors, qu'est ce qu'il voulait dire ?
Mais aussi à travers sa représentation esthétique.
Que veulent-ils dire ? Transmettre, enseigner, léguer.
Destinés aux vivants ils témoignent des morts. De ceux de ces villages qui sont partis et ne sont pas revenus. De ces jeunes, tout juste sortis de l'enfance, de ces pères de famille, de ces frères, fils à qui on a pris la vie pour rien. Qui avant de mourir on vécu et on vu l'enfer de si près.
Monument pour ce dénuement, pour ce sacrifice tout à fait inutile, ultime trace de leur bref passage et de leur ravissement qui laisse leur famille dans le plus profond désarroi pour tant et tant d'années.
Car il faut vivre après
Car il faut vivre encore.
Passant t'arrêtes-tu ? Prends-tu encore ce temps, celui de regarder, de lire, de comprendre, de te dire que sur cette pierre levée ces noms sont ceux d'hommes comme toi, d'hommes ravagés, d'hommes confisqués à la vie ?

L'esthétique du monument ? Pour montrer à voir aussi et surtout. Apprendre à décoder ce que ce monument nous raconte au delà de la transmission. Cette esthétique là qui fait du surgissement un langage; Ainsi le monument du Nord de la France sera différent de celui du sud, ainsi celui du petit village occupé montrera au passant la souffrance de cette occupation là, de l'effort de guerre, des denrées réquisitionnées par l'ennemi, le travail des femmes. Oui, il faut être attentif au détail, à l'
inscription, aux médailles, aux épis de blés ou d'orge...

"Passant arrête toi et regarde !Vois, médite... Aussi"

S'il est important d'en comprendre le langage symbolique, la sacralisation de la mort, le croisement de tradition républicaine et religieuse (ce qui fera l'objet d'un article suivant) il est essentiel d'en comprendre le message transmis aux vivants. Ne pas oublier certes, mais prendre conscience aussi du sacrifice de ces hommes... Prendre conscience de la guerre et de ses ravages, de la tragédie qu'elle représente pour l'Humanité. ll n'y a pas de héros, personne ne demande à l'être, il y a du malheur... Simplement du malheur. De la souffrance et de la douleur.

Brigitte Dusch, psychanalyste historienne
Sacha Dusch, étudiant.

Ce texte est un fragment de l'essai que nous réalisons mon fils et moi à la mémoire des Hommes de 14-18 hommes de tous les pays, car dans la mort il n'y a plus d'ennemis, il n'y a plus de vie, il n'y a plus que le vide et le néant.


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Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.

Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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