Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

mardi 21 avril 2009

Cadeau

Une dame aux cheveux blancs, frèle, dans son petit lit d'hôpital, m'attendait sagement ce jour là
Une femme, d'hier, mais tellement d'aujourd'hui aussi...

C'est au début du printemps de l'an dernier que j'ai fais sa connaissance. Hospitalisée en chirurgie viscérale, elle attendait son retour à domicile. Le médecin lui avait dit que je passerais, sans lui en dire davantage, je n'en savais guère plus... Un message sur le répondeur !

Elle m'attendait donc sans trop savoir qui j'étais, pourquoi je venais, comme souvent. Elle était là, menue, fragile, dans sa petite chambre d'hôpital, bien mise, assise dans son lit...
Ravie de voir quelqu'un, elle m'accueille avec un grand sourire, elle va bien, elle va rentrer chez elle, demain, après demain au plus tard !
Elle me fait asseoir, sur le bord de son lit, comme souvent, la clinique, l'entretien clinique a toute sa dimension, sa réalité, ici, au bord du lit !

Très vite, elle me parle de son "chez elle" qu'elle est ravie de retrouver, de sa voisine, qui nourrit sa petite chatte pendant son absence...Elle raconte, je l'écoute.
Elle parle...Me regarde...Puis me dit
"Je n'ai pas d'enfant, je n'ai jamais pu en avoir"
S'en suit un silence, ses yeux sont dans le vague, elle pense... Puis elle se lance dans un long récit, non pas un monologue, car c'est bien à moi, ce tiers présent près d'elle à la demande du médecin, qu'elle s'adresse...

"Je suis de l'Assistance, vous savez, je suis née il y a si longtemps, en 1917, et j'ai été abandonnée, mon père m'a laissée, il ne pouvait sans doute, plus s'occuper de moi, c'était la guerre... Maman est morte à ma naissance."
Puis elle me raconte sa vie, sa longue vie, les différents "placements". Le terme prend ici toute sa véritable acception.
Elle poursuit infatigable, son récit, et soudain, lentement, comme pour faire une pause, s'arréte. Elle se souvient de sa rencontre avec celui qui allait devenir son mari, un enfant de l'Assistance, lui aussi, mais qui, heureusement, avait eu la chance d'être dans une "bonne famille"
Elle n'a pas de regrets, pas de nostalgie, les souvenirs s'égrenent, lentement, doucement, comme une histoire qu'on livre, sans effort, pour se souvenir soi même et témoigner, témoigner de son passage.. Simplement !
Elle souligne, non sans fierté, qu'elle n'a jamais quitté le village où elle avait été placée par l'Assistance. Jamais.
La vie de cette femme, s'inscrit dans un périmètre de 5 km ! A peine.
Puis elle soupire...
Elle regrette de ne pas avoir eu d'enfants avec son mari, oui, elle aurait bien aimé
"Je ne pouvais pas en avoir...Oui, ma mère est morte en me mettant au monde, il me serait arrivé la même chose" dit elle en me regardant, cherchant peut-être un geste, un signe, un quelque chose, une approbation ?
Silence..... Elle pense, cherche peut-être dans ce passé, ramène à sa mémoire quelque souvenir ?
Elle explique
Non, cela ne repose sur aucun diagnostic médical, mais seulement sur sa seule certitude à elle. Elle sait que c'est comme ça, qu'il en est ainsi. Il ne peut en être autrement. Elle reprend sa démonstration.
"Maman est morte en me mettant au monde, papa m'aimait, vous savez, mais la vie, c'était la guerre, et comme beaucoup de gens à cette époque papa n'a pas pu m'élever, c'était après la guerre, alors pour mon bien, pour que je sois bien, que je sois bien nourrie, élevée convenablement il m'a remis à l'Assistance."
Silence
"Papa m'aimait, c'est bien ce qu'il a fait, car il aurait pu m'abandonner dans un fossé, n'importe où, comme on faisait alors parfois, je serai morte, ou Dieu sait quoi.
Mais il m'a mis au chaud, et il m'a donné un nom, son nom et a demandé à ce que je sois élévé dans la religion catholique. Papa m'aimait"
Emouvant ! Le récit et la justification de toute une vie, une longue vie, heureuse, avec des hauts et des bas "comme chez tout le monde, mais je n'ai pas à me plaindre, nous avons été heureux, nous n'avons manqué de rien."
Pour vivre, survivre à tout ça, à cet abandon originel, à l'absence, à la mort de la mère, qui donne la vie, et ne survit pas, qui perd sa vie en la donnant à son enfant, curieuse offrande, il a fallu survivre
Des questions, elle s'en est posé, elle a cherché, essayé de retrouver trace, des traces de son passé, de son histoire, de son origine, de ses racines...Elle a construit, s'est raconté, à élaboré une histoire, la sienne, celle de sa vie, de sa naissance, de son enfance, de ses parents... De l'amour de ses parents, et grâce à cet amour là, cet amour dont elle est si sûre, certaine, dont elle a la foi, elle a grandi, elle est devenue une petite fille, puisune jeune fille, puis une femme
Elle a construit son histoire alors qu'elle n'était qu'une enfant. Son abandon, dramatique, ne l'a pas été pour elle, parce qu'elle ne l'a pas vu, senti, ressenti, ainsi, une chance, c'était au contraire une chance, un merveilleux cadeau que lui a offert son père, pour qu'elle soit, pour qu'elle devienne...
Elle a décidé, que c'était là, un acte d'amour, l'amour d'un père, qui au lendemain d'une guerre meutrière, n'avait rien d'autre à offrir, n'avait eu d'autre avenir à offrir à sa petite fille. Il a perdu sa femme, et accepte de perdre sa fille, de la laisser, de s'en séparer, pour lui offrir un lendemain.
En témoignage de cet amour, il lui a donné son nom et sa religion, pour qu'elle se souvienne, pour qu'elle sache qui elle était, qui elle est. Ce qu'elle sait, ce qu'elle a toujours su, et ce qui lui a permis de vivre, d'être..
Madame A dit avoir été heureuse, malgré un profond désir de retrouver sa famille, ce qu'il en reste, ce qui aurait du être les siens, pour créer des liens, "Mais à l'époque, ce n'était pas comme aujourd'hui, on ne pouvait pas demander son dossier". Elle s'est tenu au courant, des possibilités, elle s'est questionné

"Vous y avez pensé ?"

"Oh oui, souvent, j'aurai bien aimé les voir, les retrouver, mais j'ai été heureuse avec mon mari, nous avons bien vécu..."
Néanmoins, il y a aussi ce manque, cet autre manque, en lien avec le manque de passé, elle ne s'est pas autorisé à l'avenir, le manque d'avenir, le manque de futur... S'interdisant toute possibilité de maternité. Cette injonction, garante de la validité de son histoire. Le lien, le seul qui la reliait à sa mère en quelque sorte. Une sorte de pacte génétique, comme si mourir en donnant la vie était une malédiction familiale, en se l'interdisant, elle y mettait un terme. Au prix d'une grande souffrance, mais c'était le prix à payer, celui qu'elle s'était fixé, pour surmonter ce traumatisme, ce deuil originaire qui n'a jamais pu être complétement fait.

Pourtant, cette fausse croyance, ce schéma de pensée sur lequel elle a construit sa vie, ne l'a pas empéché de la vivre, et de trouver du bonheur !


Puis, elle me regarde, et évoque sa présence, ici, dans ce lit d'hôpital, me dit qu'elle ne comprend pas tout, elle rentre, mais ce matin, "un autre médecin m'a dit qu'il faudrait que j'aille dans un autre centre pour des rayons...."
Je lui demande si elle a demandé des précisions "oui, mais je n'ai pas bien compris, il a employé des mots que je ne comprends pas, alors je n'ai pas osé l'interroger, lui faire perdre son temps, il n'ont pas de temps, jamais, je n'ai pas osé..."

S'excusant presque d'être là, d'exister....

"Vous savez ce que sont les rayons ,"

"Oui, c'est pour les gens qui ont des cancers ? Mais c'est pour ça que je ne comprends pas, je n'ai pas entendu de mots comme ça, et puis on m'a opéré, et s'il y avait quelque chose de mauvais ils l'ont sûrement enlevé."

"Je ne sais pas, voulez vous que je demande au médecin de venir vous expliquer à nouveau ?"

"Non, ce n'est pas la peine, il ne faut pas le déranger, et puis les rayons on en fait à tout le monde, dans mon village, Mme X en a eu aussi, l'ambulance venait la chercher tous les jours, ce doit être la mode, oui, c'est ça, c'est la mode, alors ils m'en font à moi aussi...
La mode, on en fait à tout le monde...Elle se construit encore une histoire, une croyance ? Pour surmonter, affronter sa peur ? Se protéger encore ? Inventer une parade ? Mettre en place un mécanisme de défense ?
Déni.... Mais au fond est-elle vraiment dupe ?
Au moment de partir, elle me prend la main : "J'ai été contente de faire votre connaissance et de vous voir, il ne faut pas vous inquiéter, ma vie a été bien, vous savez, et puis je suis vieille maintenant, je sais bien qu'il faudra partir, bientôt peut-être, ne vous inquiétez pas, je n'ai pas peur...."Elle me regarde longuement "Merci"

Cette rencontre m'a particulièrement touchée, bouleversée aussi....Tellement !


A Arsel, que j'aurai aimé connaitre davantage, plus longtemps, plus... Lui aussi venait de l'Assistance....Pour toi....Avec beaucoup d'amour

vendredi 17 avril 2009

Les proches

Il convient qu'ils soient proches, dans le quotidien, mais aussi et surtout dans la maladie, dans le quotidien de la maladie, au jour le jour parfois.....
Les proches, les familles, conjoints, parents, enfants....
Qu'ils soient là, proches au sens propre du terme, là, présents, physiquement, pour assumer, assurer, supporter....
"Demander aux familles.... Sa femme se débrouillera....Elle peut bien s'occuper de son mari quand même..... Mais ce sont leur parents, sa mère, son père....."
Ce discours est récurrent, à l'hôpital, dans les maisons de convalescence, les associations etc.... On se décharge, on se déresponsabilise, sur les autres, sur les proches
Sous pretexte qu'ils sont proches, justement. Ils doivent, c'est un devoir, c'est d'ailleurs une obligation régies par la Loi, Celle des hommes....

Je rencontre aussi les proches, souvent à leur demande, parfois à la demande des soignants, je refuse parfois ces rencontres, à la demande des patients.
Qui ne veulent pas que les proches, leurs proches soient mélés à tout ça !
Soient au courant..
Sachent....
Ils en ont le droit, et heureusement...

Parfois, les patients abordent le difficile problème.... Des proches, de leurs proches, qui ne comprennent pas toujours, qui ne peuvent comprendre, qui n'ont pas à comprendre, parce qu'ils, eux, les patients, les malades, estiment, qu'ils n'ont pas à leur demander cet effort là....
Parfois, les plaintes, de ceux qui ne se plaignent pas et qui ne comprennent pas toujours que les proches ne comprennent pas, leur fatigue, leur souffrance, leur douleur, leur mauvaise humeur, leur moral bien bas, leur envie d'en finir... Leur envie de ne plus être là, puisqu'être là, c'est occasionner des soucis, des tracas....
Dialogue, échange, pas simple, souvent compliqué, complexe, parfois impossibles.
Un discours où se mèle les langues, les patois et les dialectes, sans parfois de traducteurs, ou de médiateurs....
Méconnaissance souvent, de l'autre, de la maladie... Il ne suffit pas toujours d'expliquer, de raconter, il faut vivre avec, vivre avec le malade ou le mourant au quotidien, l'accompagner dans les gestes de tous les jours, le voir désapprendre au jour le jour, les gestes qu'il ne peut plus faire, faire avec pour faire à sa place. Il faut le regarder devenir dépendant, invalide, perdre son savoir, son savoir faire, son autonomie, se perdre au jour le jour sans espoir de retour.

C'est lourd, très lourd, trop lourd, insupportable, épuisant, souvent, parfois....

Et pourtant on continue à demander, à exiger des proches.....De solliciter, d'hospitaliser à domicile car l'hôpital n'en peut plus, n'en veut plus, n'a plus de lits... Il faut de la place, faire de la place..Prix de journée, rotation, économie, gestion..
Je n'ai guère vu au cours de toutes ces années passées dans ces services, de retour à domicile effectuées vraiment dans l'intérêt du patient. Sauf dans certains cas, avec certains praticiens.. dans certains lieux...Une sortie, évaluée, préparée, assistée... j'ai eu la chance de faire partie de ces équipes...Et j'y ai tant appris... Surtout l'humanité, et l'humilité, qui fait tant défaut aujourd'hui sur ces plateaux techniques, deshumanisés, ou le sujet est instrumentalisé, objet de toutes les attentions médicales, gestes précis, concis.... Mais sans aucun échange, aucune tendresse !

Demander aux proches, c'est aussi leur demander de s'oublier, de mettre entre parenthèses, leur vie, leur liberté, leur existence... Pour s'occuper de l'autre,
C'est créer une sorte de dette, de créance, mettre en compte, sans jamais rien solder.
C'est de la part du tiers demandeur prendre une responsabilité, dont il ne mesure ni les conséquences, ni la mesure... C'est intruser la vie des autres, la vie du patient et la vie de ses proches
C'est prendre une décision, décider de ce qui sera bien, pas pour le patient, ni ses proches....
C'est oublier à bien des égards l'autre, les autres, ses semblables....
C'est une violence inouie, et une perversité incroyable... Comment ne pas faire culpabiliser, ne pas mettre l'autre en position de débiteur, de devant devoir, de devoir faire, aller, s'occuper.
Alors que parfois nul n'en n'a envie, nul ne le désire, ne le souhaite....
Etre de la famille, ne suffit pas à créer des liens, à faire du lien, un enfant, un parent peut être un étranger, et avoir envie de le rester


"Téléphoner à ma fille, mais pourquoi faire ? Cela fait plus de trente ans que nous ne nous sommes pas vues, nous n'avons rien à nous dire, je n'ai nulle envie de la voir... Va t-on m'y obliger maintenant parce que je vais mourir ?" me demande une patiente en fin de vie...
Elle souhaitait simplement mourir auprès de sa voisine, qu'elle connaissait depuis "toujours" qui venait la voir chaque jour.... Qui lui était proche .
Cette notion de proximité, puisque c'est bien de ça qu'il s'agit est interressante et surprenante, elle mérite d'être repensée... On parle à l'hôpital pudiquement de "personne de confiance" peut-être parce qu'on a trop saisi que les liens de sang, n'avaient guère de sens, plus guère de sens aujourd'hui.
Mais on continue paradoxalement à interpeller les proches, la famille donc, enfants, parents, petits enfants et cousins.. Pour prendre en charge, et c'est bien de charge dont il est question, d'un fardeau, d'un poids supplémentaire.. En terme de charge financière aussi. Car parfois, il faut "mettre la main au porte monnaie" pour reprendre l'expression d'un fils abandonné, qui n'avait nulle envie de donner un seul cent pour un vieux père qui ne s'était jamais soucié de lui, ou comme cette femme, douce, calme, plus très jeune, qui d'un coup se mit à crier "non, pas un sou, rien, pas un regard, pas un baiser, qu'il crève seul... Aprés ce qu'il m'a fait"
Et de s'écrouler en larmes pour dire l'inceste subi il y une cinquantaine d'années

Les proches ne sont pas toujours ceux que l'on croit, ni ceux qu'on pense être....
A mese patients agés, trés agés avec qui j'ai le bonheur de faire un bout de chemin, de partager un peu d'humanité dans ce lieu de violence qu'est devenu l'hôpital....

jeudi 16 avril 2009

Petite fille

Once upon a time...
Es war einmal...

Il était une fois une petite fille.....
Il est une fois une petite fille...
Au présent, présent historique, présent de narration....

Une petite fille qui, aujourd'hui a grandi, mais qui rêve qu'elle est encore une petite fille, toujours une petite fille..Tous les soirs elle rêve, tricote le même rêve, le reprend là où elle l'a laissé au matin, continue l'histoire...
Elle sait bien que c'était un rêve, mais elle attend chaque jour la nuit, pour se retrouver petite fille... Et retrouver son rêve, retourner dans son rêve, au coeur de son rêve, dans les bras de ce sommeil, salvateur.
Les rêves !
Ses rêves !
Une véritable histoire, dans un autre espace, un autre espace temps, un autre monde, qu'elle rejoint chaque soir.. Chaque nuit, pour vivre une vie de petite fille dans son monde de petite fille...
Un autre espace, une sorte de monde parallèle, qu'elle a crée, en imagination, ou qui existe peut-être vraiment. Ici, ailleurs, et maintenant, après... ?
Pourquoi pas ?
Et si c'était vrai ?
Si justement c'était ce monde du rêve qui était le vrai monde, et si le monde du jour n'était que simple vue de l'esprit ?
Un rêve, éveillé... Sans sommeil, une histoire à dormir debout ?
Elle s'interroge parfois, et cela la fait sourire ?
Qu'est ce que le vrai, le réel ?
Qu'est ce que le rêve ?
Peu importe, là n'est pas la question.... La nuit est le rêve et surtout le lieu d'une autre vie
Petite fille elle redevenait alors, dans la maison de petite fille où elle avait grandi, grandi si bien
Elle y était, vraiment, en chair et en os, respirait, mangeait, jouait courait, dans les pièces, le jardin.
C'était si vrai, comme dans la vraie vie, une autre vraie vie, en somme....
Avec ceux qu'elle aimait, qui l'aimaient
Que c'était bon !
Mais ce n'est pas seulement pour cela qu'elle accomplissait chaque nuit le voyage, ce grand voyage au pays du rêve...
Ce voyage tant attendu !
Pendant ce court instant, trop court instant, car le matin arrive tellement vite, pendant ce temps hors du temps, suspendu au temps, elle refaisait le temps, elle refaisait l'histoire.
Son temps à elle, son histoire à elle, sa vie à elle, la vie qui aurait du être la sienne. La vie qu'elle aurait aimé, qui aurait du être.
Elle écrivait le scénario, comme il aurait du se passer, comme elle aurait voulu qu'il se passe.. Comme elle aurait voulu que ce soit
Ainsi soit ! Ainsi soit-elle !
Ainsi soit le temps !
Un scénario sans histoire, banal, quotidien, une vie de petite fille, faite de vacances, d'école, de cahiers, d'encre, de genoux écorchés, de bonbons, de crème à la pistache, de jeudi dans la cour, des noisettiers, du petit vélo rouge... Des chatons, des.... De...
Alors elle vivait, car elle n'imaginait pas, non, elle vivait tout ça vraiment, intensément, et refaisait son monde, le monde tel qu'il est, serait si.... Si ça s'était passé ainsi...Normalement.

Si des adultes n'avaient pas brisé sa vie, cassé son bonheur, son insouciance, sa joie de vivre, cassé, démantelé, mis en pièces, saccagé.....
Si des adultes n'en n'avaient pas décidé autrement !

Le temps s'écoulait lentement, la vie s'organisait entre l'école et les devoirs, les goûters et les tartines, les rêveries dans le jardin....le grenier plein de trésors..
Lecture et écriture, elle aimait cette petite fille se raconter des histoires, changer la fin de celles qu'on lui racontait chaque soir, si elle avait été bien sage.... Rêvait aux petits chevreaux impatients et désobéissants qui attendaient leur mère, mais qui avaient ouvert au loup....
Fixait le ciel pour entrevoir cet oiseau bleu.. Couleur du temps...
Imaginaient les robes de la Belle aux bois dormant, et pensait aux malheurs de Peau d'Ane....
Comme il était doux le temps alors, comme les fleurs sentaient bon, elles sont toujours là, dans les massifs, tulipes et roses, marguerites et pivoines... En rêve... Dans son rêve, dans la vie de ses rêves, dans le rêve de sa vie...
Le jardin, la maison, les voix qui raisonnent, son nom dans le couloir...Les pas dans l'escalier. La vie, le soir, la nuit le jour, pas de rêve, tout était comme dans un rêve
Elle refait sa vie, rien ne s'est arrété, là, non, la vie, la sienne continue, elle grandit dans cette maison, doucement, avec ceux qu'elle aime, qui l'aiment, car elle n'a qu'eux, ne connait qu'eux, les autres, ceux qui viendront la chercher, l'emporteront dans un ailleurs, ne sont que des étrangers... Ne seront jamais que des étrangers...

La vie est un rêve.... Elle rêve si fort qu'elle croit le matin que c'est vrai ! Qu'elle a pu changer son destin, le destin de l'enfant, de la petite fille qui est restée, dans cette maison, là bas...Dans sa maison.
Que c'est comme ça que ça s'est réellement passé...

Elle ne sait plus très bien parfois, de la vraie vie ou du rêve, mais où est le vrai ?
Elle ne sait plus très bien si au collège elle prenait un bus qui la déposait devant la maison, le samedi, ou les autres jours.. Elle se souvient combien elle les a regardé les bus, et savait quand ils passaient devant sa maison, loin de l'arrêt, mais elle aurait demandé au chauffeur... qu'elle aurait pu, qu'ils auraient pu..
Et elle rêve encore de l'eau de la rivière qui déborde, qui est partout, dans les champs, qu'on regarde par la fenêtre....Qui fascine.
Elle rêve aux saisons qui défilent, l'été, les grandes vacances, où elle s'ennuie un peu, fait des cahiers de vacances pour avoir un prix à la rentrée, la fête au village en même temps que son anniversaire, l'automne et la rentrée, les vendanges sur le livre de lecture.... les débuts de novembre et les vacances de Noël, les enfants apprennent la poésies qu'ils réciteront fièrement devant le sapin de la mairie en échange des friandises....puis elle demandera à sa grand mère, en regardant par la fenêtre s'il y aura de la neige à Noël, car sans la neige ce n'est pas vraiment Noël... Le sapin et les repas, la fête et les cadeaux, les livres, contes et légendes, tant attendus et convoités, dévorés en quelques soirées
Les beaux jours arrivent vite, et le petit chemin en face de la maison, prend des couleurs, vert et églantines, ça sent bon... Comme elle l'aime ce petit chemin, qui mène dans les champs de blé et à la rivière enfin rentrée dans son lit
Elle rêve si fort, les voit, les sent si fort, parfums d'enfance collés à la peau pour toujours.. Jusqu'au bout, jusqu'à la fin. Collés si fort, qu'ils ne font qu'un, corps à corps avec elle, rempart contre l'oubli, contre la douleur !
Parfum d'enfance, tuteurs de résilience, qui font qu'on ne meurt pas tout à fait, qui font qu'on garde un brin de vie là où il n'y en a plus guère, qui font qu'une partie de soi est là, et l'autre là bas, à tout jamais, pour toujours !
Cela fait tant d'années qu'elle rêve, depuis tant d'années, qu'elle retourne dans cette maison, dans ce village, où pour elle rien n'a changé ?
Tant d'années de rêves !

La vie est un Rêve, elle aurait pu, si des inconnus n'en n'avaient pas décidé autrement
Comme moi, comme toi, cette petite fille rêve, rêve à sa vie,
Rêve si fort, que le rêve en est la vie...
L'aide à tenir, l'aide à vivre et à aimer
Petite fille.....

jeudi 9 avril 2009

Demain

Il sera toujours temps, le temps qui passe, lentement, plus vite, trop vite et nous mène à demain
Ce demain attendu, ce demain espéré, ce demain redouté.
Nul ne sait ce que sera demain
Pas plus qu'il ne sait ce que sera le moment futur, la seconde qui suit, vraiment, même s'il en a une petite idée, quand même.
Nous vivons tous avec l'idée et l'espoir de demain..
D'un autre demain, d'un autre, jour d'hui, au moins pareil, sinon meilleur, mais surtout jamais pire.
Chaque jour j'affronte ce pire, ce pire presque probable du demain, du moins je cotoie ce pire là, auprès de mes patients vieillissants, pour qui demain, sera de toutes façons pire que le jour d'hui
Surement pire mais on ne sait jamais....Peut-être ?
Chaque jour, ils affrontent cette question, sans réponse, cette question qui les taraude et les empêchent de penser au moment présent, à cet instant présent, cet ici et maintenant, pas toujours réjouissant, mais au moins "on sait"

C'est vrai que les demains on les espère chantant, un autre jour après la nuit, une autre lueur, un autre soleil, un espoir....
A l'hôpital je vois de plus en plus de personnes âgées, âgées et malades, dépendantes, souffrant de maladies, de vieillesse et de solitude, souffrant de tout cela.
Tout cela ensemble, mélangées, on ne sait plus très bien quoi est à l'origine de quoi
Malades d'être vieux.... On soigne la maladie, on pallie, même si on ne guérit pas vraiment, mais la vielliesse, on ne la retarde pas, même avec quelques artifices, elle vient, s'installe, s'incruste et ne part plus.
Elle fait son lit un peu plus chaque jour, et on assiste impuissant à sa prise de pouvoir, à sa victoire !
On résiste bien un peu, on masque les effets du temps, on dénie... On accepte, ses cheveux blancs, les quelques rides, puis les rides.
Les effets du temps, ses marques, ses cicatrices indélébiles, ancrées dans la chair, témoins indélébiles des souffrances, des peines, des rires et des bonheurs des années, croulant sous leur poids
C'est que c'est lourd les ans....
Demain quand les ans, tous les ans, sont là, déjà là, n'est pas si simple... demain arrive vite
"Plus le temps passe et plus il passe vite," me dit un patient, on n'a plus le temps, ce temps qui file, qu'on ne retient plus, ou plus très bien, meme les souvenirs on ne les retient plus, on en perd le fil, ce fameux fil, fil tenu de la vie, qui ne tient plus qu'à un fil, mais auquel on tient tant !
On espère que l'implacable Parques, ne le coupera pas, pas tout de suite, ne le tranchera pas trop vite.


Peu pensent à la mort, demain, du moins ainsi, si vite, même si la mort est attendu, elle est redoutée, et demain peut-être ?
Ce demain pourtant doit s'envisager, se projeter, se définir aussi parfois.
On vit aujourd'hui pour demain, le construire, l'aménager, pour être, un être de devenir, en devenir, devenant, devenissant, dans cette "issitude", qui ne peut être la finitude....
Vivre l'instant présent, ici et maintenant, pleinement, comme si demain.. Comme si aujourdh'ui était le dernier jour, mais le dernier jour de quoi ?

"Et si j'allais mourir demain ?"
Comment vivre ainsi ? C'est aller nulle part, c'est errer sans but....
Comment vivre sans demain, sans cet espoir d'un nouveau jour, où on recommence souvent, inlassablement, où on regarde le temps s'écouler, comme la pluie tomber le long de la fenêtre.... Prisonnier du jour d'hui, à la merci du demain, sous le poids d'hier.... Poids encore, si lourd et si pesant, qui fait courber l'échine, qui fait courber le dos, qui empêche de se lever, qui empêche de regarder au loin, de dépasser la ligne d'horizon, de laisser entrevoir un futur lointain, un futur plus loin que demain, un futur où il n'y aura peut-être plus rien, au loin
Une liberté peut-être, la dernière, celle qu'on peut s'offrir sans risque de ne pouvoir rembourser le crédit engagé.
Alors on explose ce budget là, on craque, on claque, on cartonne, on joue les vas tout... Rien ne va plus !
Un après moi le déluge, puisqu'après moi, il n'y a rien ou peut-être les autres, mais qu'est ce que les autres après tout ? Aprés quoi ?
D'autres soucieux du demain, du demain sans eux, pensent qu'il convient que ce demain ne coute rien aux autres, et mettent en ordre leurs à faire. Mettent de l'ordre dans leurs affaires, si le temps leur en laisse le temps
Testament.... Attestant de la présence, un temps, pour un temps, laissant à l'autre, à celui qui restera, le témoin de son passage.
Transmission des biens, des messages, des dires, des secrets, des non dits, des.......
Trans... Mission accomplie
Vanité peut-être ? Désir de ne pas mourir tout à fait, croire que même s'il y a un audela, paradis ou enfer on se souviendra de lui sur terre, demain..
Qu'il en restera quelque choses, autre chose qu'une tombe ou urne funéraire, qu'un caveau, qu'un corps devenu cadavre, que cette âme là, survivra au moins dans les coeurs, les esprits, les mémoires
Ne pas être confrontés de son vivant à l'oubli, la pire des morts, que celle là, l'oubli !
Souvenirs...

"Demain se fera sans moi," dit une patiente, ravie de l'idée qu'il pourra se passer tout et n'importe quoi, puisqu'elle ne sera plus là.
Espérant de toutes ses forces,de tout son coeur, que ce demain là, se fera sans elle , ici et ailleurs Elle pourra enfin trouver le repos, éternel vraiment sans plus jamais souffrir, ni en paroles ni en pensées, ni en action
Elle espère qu'au delà, s'il y en a un, personne ne l'attend, "je n'ai pas envie de les voir, les ayant suffisamment vu ici... " Un audela possible, qu'elle croit très fort impossible !


"Il n'y aurait plus d'endroits pour être enfin en paix... "
R.I.P.
Demain est souvent source d'angoisse car on ne sait pas trop de quoi il sera fait, et surtout s'il sera
Si je meurs en dormant, on m'aura volé ma mort, me dit un homme pourtant jeune, encore, jeune... Je veux en être témoin !
Témoin de son vivant, de son jourd'hui et de son demain, de son futur...
Demain est un espoir, un devenir incertain, mais qu'on espère certain...

Reviviscence




mardi 7 avril 2009

A deux...

Vieillir à deux..
Rester à deux....
Devenir vieux à deux...
Rester ensemble !

Combien de fois j'ai entendu cette demande, cet appel, ce cri.. Ce SOS !
Quand la vieillesse sépare, la maladie sépare, que l'autre ne peut plus, garder l'autre, auprès de lui, son autre à lui....
C'est que "nous n'avons jamais été séparés"
"Cela fait plus de cinquante ans que nous vivons ensemble, on ne s'est jamais quitté..."
Vivre seul, sans l'autre, sans ce compagnon, cette compagne des bons et des mauvais jours est impossible, inenvisageable
On n'envisage jamais de vieillir, on y pense, le moins possible, on oubie, on n'y pense pas trop, cela viendra bien assez vite....On verra bien...Il sera toujours temps...
Malgré tout, on prépare quand même sa vieillesse, en mettant de l'argent de côté, au cas où, en se rapprochant des enfants, on ne sait jamais.... En allant dans une région plus chaude, celle des vacances..Où on ne connait personne, et ne connaitra jamais personne,
Cruel exil que celui là ! Déception suprême, solitude extrème !
On y pense, on voyagera, on ira...Là, ailleurs, dans ces endroits qu'on a jamais eu le temps de voir, qu'on aimerait visiter, le jour où "on aura le temps"
Mais vieillir n'est pas si simple...
On imagine la vie, à deux, comme elle a toujours été, il en a toujours été ainsi, pour certains....
On vieillira ensemble... On fera ensemble....On ira ensemble....
Ensemble, puisqu'il en a toujours été ainsi... Ensemble, car autrement n'est pas imaginable...
Et puis la vie, le destin en décident autrement...
La vie ! un jour, un matin, c'est brutal, ou alors plus lent, insidieux, ce n'est plus tout à fait comme avant...

L'un est malade, l'autre, pas.
L'un ne va plus si bien, l'autre pas
L'un ne peut plus marcher, manger, ne se souvient plus, ne peut plus faire tout seul, ne sait plus, n'y arrive plus tout seul. L'autre fait ce qu'il peut, vient en appui, en aide, supplée, fait pour, fait avec...
Ensemble ils continuent, encore, ils avancent, encore, jusque quand ?
Jusqu'au bout.... C'est ce qu'ils espèrent, souhaitent, voudraient bien...
C'est terrible, la vieillesse et la maladie, ensemble, la maladie de la veillesse, car vieillir, même si ce n'est pas une maladie peut le devenir. Malade d'être vieux, vieux d'être malade !
Longtemps, l'autre aide, sans rien dire, en fait un peu plus qu'avant, ou alors fait, car avant il ne faisait rien, il ne veut pas laisser l'autre seul, et être seul.

Un part, l'autre reste, restera.....ce sera bien assez tôt, il faut s'y préparer, sans trop y penser, toujours, mais là... Si on pouvait aller au bout du chemin ensemble, au bout de cette route.... Cela fait tant de temps, déjà !
Tant d'années que cette route là, pas toujours facile, il la parcourt ensemble...Tous les deux, ils ont affrontés les soucis, les difficultés, les chagrins, les peines, les larmes, mais aussi les joies, les rires, les bonheurs....
Le meilleur et le pire, le pire et le meilleur
Ensemble
Déchirant ! Toujours....
Cela fait tant d'années pourtant ! Pourtant !
Pourtant un jour, ce n'est plus aussi simple, facile....Tout est remis en question
Un ne va pas, l'autre, n'en peut plus, et il s'en veut tellement, de ne plus en pouvoir....
Cette culpabilité de ne pouvoir aider l'autre, le coucher, le laver, le nourrir...Parce qu'on n'en peut plus, et qu'on est vieux, si vieux aussi... Qu'on est usé, fatigué....Qu'on ne peut plus bien vraiment marcher, parce que le conjoint est tellement lourd, qu'on a peur s'il tombe de ne pouvoir le relever, de ne pouvoir se relever !
Il y a bien des aides qui passent.... Mais ce n'est pas suffisant
Et puis tout ces étrangers dans la maison, dans l'univers, dans l'intimité
Intrusion terrible ! Mais on ne peut faire autrement....
Terrible que cette vieillesse là cette maladie là qui arrive, qui ne partira pas, qu'il faut prendre avec les ans, par dessus les ans, en plus, le bonus en quelque sorte

Si on n'était pas si vieux !
L'autre, l'aidant, le proche, n'en peut plus, il arrive souvent épuisé.... Quand son "autre" est hospitalisé...
Si l'aidant, celui qui supplée, qui fait pour, avec est malade lui aussi, c'est catastrophique, le monde s'écroule alors, leur monde s'écroule
"Comment je vais faire, ma femme ne peut pas rester seule, à la maison, la nuit... Elle n'a plus toute sa tête.... Ne peut plus se lever seule" me confie en pleurant un patient de 85 ans... Pourtant il ne pouvait plus marcher, jusqu'au bout, il a fait, mais la douleur était tellement forte qu'il ne pouvait plus, ni marcher, ni se lever....
C'est bouleversant ces larmes ! terrifiant aussi.... Laisser pleurer, laisser les larmes couler.... Assister impuissant à ce désespoir...
Laisser dire la peine et la souffrance, prendre la main, rassurer, être là, une présence chaleureuse, empathique.... Etre ici avec...
Ne rien dire, faire silence, les larmes parlent, écouter les larmes, être là, près des larmes, les entendre, non seulement couler, mais parler, si fort. Exprimer si fort la peine, la douleur, le chagrin, la souffrance, la detresse, le désespoir.....L'impuissance !
Etre là...
Avec cet autre si seul, avec sa peine, sa souffrance et ses larmes.. Contenues tellement, depuis tellement longtemps, qu'il n'en peut plus et les laisse aller
"Ca fait du bien.... "
Puis de me dire le souci qu'il se fait, pas pour lui, mais pour celui qu'il cause, dont il est responsable...
Comme s'il n'avait pas le droit, le droit d'avoir mal, d'être malade.... D'avoir besoin lui aussi, besoin de l'autre, besoin des autres
Cette confrontation à sa détresse, à sa solitude, à son être seul, ce face à face terrible, impossible à affronter, seul, avec l'autre, ce n'est pas simple, mais on n'est pas seul.. Vraiment
On partage à deux cette souffrance, la veilliesse, la solitude et le devenir vieux, le devenir invalide, handicapé, dépendant..
On voit l'autre devenir, perdre, laisser le peu de jeunesse, le reste de dynamisme, on le voit sous ses yeux, devenir vieux, on se voit à travers l'autre, à travers le regard de ce même autre, devenir soi même un autre, un vieux.
La vieillesse est un monstre impitoyable qui n'épargne personne, qui tue à petit feu, lentement en prenant son temps, qui ne fait aucun cadeau, mais au contraire, fait que petit à petit la vie s'éteint dans ce corps qui vieillit, qui se courbe, qui se ride et qui se fane, ce corps qui n'est plus montrable, tellement plus désirable que ce corps objet n'est plus l'objet du désir, du désir de l'autre
Le corps est malmené... Le corps est lavé, habillé, comme une masse lourde, informe, un objet qu'on ne cache, même plus, qu'on ne soustrait plus au regard de l'autre, car il n'est plus un corps, comme si le sexe, le sexuel avait quitté le corps du vieux ou de la vieille... L'âge fait que le sujet n'aurait plus ni imtime ni sexe.
Neutralité de ce corps impudique et laid, ridé et vieux.. Objet de répulsion, de dégout..
un corps malade, oublié au fond d'un lit, d'un fauteuil où lui même s'oublie, se laisse aller, aller à tout...
C'est ce que l'autre, un peu moins malade de cette vieillesse meutrière voit, regarde, contemple, cette décrépitude, cette décadence indécente et triviale... Miroir impitoyable qui lui renvoit son image, sa propre image en écho de celui de la femme ou de l'homme aimé, désiré...
Aller encore un peu, jusqu'au bout, de ce chemin de croix, de ce chemin de fer, ce chemin de vie, ce chemin de mort !

dimanche 5 avril 2009

dé crypter

Pour sortir de la crypte
Pour s'extirper de la Grotte
Pour s'extraire de la Caverne
Extirper, extraire.....

Sortir, aller dehors, de l'avant,
Partir du dedans, pour dehors
Mais pas seulement
La crypte, où est enksysté, encrypté le secret, le noeud noué par d'autre que nous, qui ne sont pas nous, qui font ce nous, qui ont fait ce nous, malgré nous, ce nous que nous sommes, par ce que ce noeud qui noue, qui se noue encore, et renoue avec les nous d'avant nous, et qu'on veut, dénouer
Dénouer pour être soi !
Soi, moi, je m'.....
Tout ce qui fait qu'on peut parler en son nom propre, se poser sujet, singulier, affirmer cette singularité là, qui ne sera qu'elle, et non plus le noeud mille fois tordu par ceux qui étaient là avant et qui nous ont légué, balancé ce sac, ce fardeau, ce baluchon, bien noué, mais si mal ficelé, qu'on se rend compte sans trop savoir pourquoi, sans trop savoir comment qu'il y a quelque chose qui cloche....
Quelque chose dont on ne veut pas...Qui coince...

Seul le moi n'y est pas....Le moi ! ?

Le moi est là, mais accompagné, mal accompagné par cette somme de moi, d'autres qui sont là, ombres malveillantes, s'accrochant à lui... Pour lui rappeler, sans le nommer, car devenu sûrement innomable ce fantôme, ce squelette qu'on traine, qu'on emnène depuis tant de temps, tant de génération.
Une chaine ininterrompue....Que nul n'a cassé, nul n'a brisée..
Une chaine qui se fait à chaque génération un peu plus lourde, un peu plus rouillée, un peu plus laide...
On ne sait plus très bien pourquoi cette chaine, pourquoi ces maillons, pourquoi ce tricotage embrouillé, emmélé... Une sorte de ravaudage mal fagoté.
On ne sait plus très bien, car rien n'est vraiment raconté, dit, posé
On ne lègue pas de mots, mais des silences, lourds de sens...
Si lourds dans la balance
Des silences et des si, qu'on lance au prochain qui l'atttrape et le lance encore....
Silence qui tu, doucement, sans faire de bruits, tellement tu, qu'on ignore s'il a un sens
Si à l'origine de ce silence de ce "pas dit" car pas dicible il y a vraiment quelque chose.
Mais quoi ?
Rien peut-être ?
On sait que ..... Ancêtres sûrement
Cela suppose de croire très fort en sa généalogie, question de fois, encore une fois
Il était une fois une famille....
Il y a toujours des histoires sans mots, des histoires qui ne se disent pas dans toutes les familles, secrets jalousement gardés, seul trésor peut-être ?
Des fantômes psychiques, des fantômes faméliques qui n'existent que parce que quelqu'un se souvient, se les rappele, sans plus savoir au juste, au plus juste.
Une sorte de savoir plus ou moins oublié, mais dont il reste une trace, une sorte de cicatrice indélébile, un fil conducteur qui dit que.....
D'inconscient à inconscient, une espèce d'inconscient familial, généalogique...Dans une relation de filiation. Inscrit quelque part, virtuellement peut-être dans les génes ? Et que ces même génes transmettent ? De mère en fils, de mère en fille, de père en fils, de père en fille....
Décrypter ces fantômes qui s'inscrivent en faux dans la transgénération, qui s'étalent dans les albums d'images de ces familles qui savent mais ne disent pas, qui ne disent pas, car elles ne savent plus...

Il faut croire si fort en la transmission, il faut avoir la foi, encore une fois
Drôle de fois, il était une fois....
Et si.. Et si ce n'était pas comme ça,
Et si on nous mentais encore une fois, et si on nous faisait croire que....
Que nous devons porter ce fardeau, hériter de ce mandat et le remettre encore et encore aux autres générations ?
Faut-il croire si fort que nous ne sommes donc pas seuls, car cette solitude là, est non seulement terrible mais inentendable ?
Seul au monde ? Seul face à nous même et seulement nous mêmes ?
Faut-il croire alors aux ancêtres, à ceux d'avant nous, qui ont vécu, pas comme nous, presque comme nous, qui ont fait...Et qu'on ne dit pas, et qu'on tait, et qu'on enferme, car tragique et honteux ce secret, cette chose terrible, indicible doit être cachéé, enterrée, et aucune tombe, ni caveau n'en viendra à bout, pas même l'éternité ?
Mais pourquoi en serions nous dépositaire ? A notre insu, dans notre inconscient, elle s'est gravée cette chose, sale, honteuse, sexe, trahison, mort....Dont on a cru bon de nous garder. Qu'on a donc gardé pour nous préserver soit disant
L'enfer est pavé de bonnes intentions...
Très souvent ces "secrets" tus, enfouis, ressurgissent au cours de la thérapie, ou de l'analyse, ils affleurent, effleurent le conscient, sur gissent de l'inconcient..
Se pose la question du souvenir. Non négligeable celle là.... Qui pose question, car qu'est ce que le souvenir ?
Est-il fiable ? N'est-il pas que le fruit de notre imagination, le résultat d'une condensation, d'un désir, d'une pulsion, d'un rêve.....

Pourtant des choses, viennent, des mots et des images, une représentation, quelque chose qui dit, qui ressemble, qui renvoie, qui raisonne, qui résonne, qui fait écho.... Qui fait lien, qui fait sens, si on veut bien, si on s'en donne la peine, sans trop de peine parfois, mais qui peine toujours un peu....
On déchiffre alors ces hyéroglyphes de l'inconscient, sans vraiment en écrire la langue... Maternelle ou paternelle elle trouve sa source dans le secret des origines...
Décrytpter prend alors du sens, celui de déchiffrer, de traduire, de mettre du sens sur ces bribes, des morceaux de puzzle
C'est une première étape.... Certains cherchent encore plus loin, enquête, en quête de vérité, de généalogie, de liens de sang, d'arbres, de fléches, de descendance, d'ascendance...
Pauvres aïeux... Pauvres enfants, pauvres parents
Nous héritons tous, sans le vouloir, sans le savoir de cadeaux empoisonnés, de boulets et fardeaux.
S'en délester est parfois simple, souvent compliqué, c'est un lien, une attache, les liens du sang !
Des biens de famillles. Et quels biens ! Quelle famille !
Une fois encore, il me plait à croire que l'homme est un sujet libre, qu'il n'est en aucun cas responsable des erreurs, ni des crimes du passé, ne serait ce ceux de son père, de sa mère, à fortiori ceux de ces ancêtres.
Il est libre de s'en affranchir, et de trancher les branches qui l'encombrent, on élague bien les arbres, pour qu'ils poussent et vivent en harmonie !
Il me plait à croire que le sujet est un homme ou une femme libre, qui peut, s'il le veut, le peut écrire son destin.
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Nota bene

Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.

Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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