Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

samedi 27 septembre 2008

Complétude

Complétude, pour complèter, mais quoi ? Mais qui ?
Complèter, c'est ajouter, mettre un plus sur ce qui est déjà, sur ce qui existe déjà...

C'est dire, admettre, suggèrer, évoquer, penser que ce qui est déjà, n'est pas complet, qu'il faut, faudrait, ajouter quelque chose pour que ce qui est déjà soit complet.

Cela suppose que le sujet ait déjà l'idée du "complet", de sa représentation. En quelque sorte, qu'il entend quelque chose par là
Et que ce qu'il a ne l'est pas, ou pas vraiment, ce qui n'est pas tout à fait la même chose, l'est peut-être, mais pourrait l'être davantage
Alors pour cette complétude soit, il faut y ajouter
Qu'il faut faire l'opération suivante. Ce que j'ai est un tout, avec un moins, si je soustrais ce moins il me reste quand même un tout avec un manque...
Un reste, une sorte de a
Pour obtenir ce que je veux, ou ce que je voudrai, ce que j'aimerai, il faudrait que j'ajoute un plus au tout incomplet que j'ai déjà...
Ainsi le plus viendrait en apport du moins et le supprimerait ?
Non pas tout à fait, car cela suppose que le plus soit le moins....Identique, pareil au moins...
Mais quel est ce moins ? Et quel est ce plus qui viendrait à sa place, d'une manière tellement ....Qquelle le comblerait.
L'annulerait.
Mais le plus n'annule pas le moins
Il ne le comble pas,
Le masque tout au plus
Ainsi, le moins est peut-être un peu moins, mais toujours quand même moins, il reste une faille entre le moins et le plus, un peu comme 1+1 = 3

L'incomplétude est....Elle se symbolise par ce vide, qui parfois s'ouvre sur le réel..
La complétude n'est dans ce cas qu'une illusion, une tentative de représentation d'un plus qui viendrait combler ce vide qui parfois s'ouvre sur le réel, sans toutefois le combler complétement, laissant ainsi un vide si petit soit il, un moins par lequel le vide se montre à voir...S'échappe ou laisse passer
On ne peut combler cette ouverture...Cette faille.

La complétude relèverait alors de l'illustion ou pire de l'espoir....Espèrer trouver ce petit plus venant combler ce petit moins pour faire un grand tout....

Cet espoir là rassurerait-il ? Cette volonté de recherche du grand tout, apaiserait-elle les craintes ? Craintes du morcellment, de la perte, et une fois encore de la solitude...
Mais pourquoi rechercher ce soit disant manque qui viendrait completer et faire du sujet un être complet, du moins qui se voudrait comme tel, qui s'envisagerait rien qu'un instant comme tel
Comme s'il en était sûr que la complétude était une sorte de remède
Mais de remède contre quoi
Le sujet est divisé, le sujet est séparé...Il n'a de cesse que de réparer, cette séparation, non en rajustant, racommodant les deux espaces béant formant la plaie, la faille, mais en la comblant, comme on comble les rides...

On se plait à dire dans le sens commun, en parlant de l'autre, qu'il est sa moitié. Une sorte d'un seul être nous manque. Agrégeant à notre moi cet autre moi pour en faire un moi...Mais quel moi justement ? De quel moi sagit-il ? On ne sait plus vraiment....
On voudrait se compléter, pour mieux s'ajuster, car on n'est pas complet, et en manque de ce "morceau de moi"qui manque, qui erre on ne sait où, et qu'on ne trouvera peut-être jamais, parce que ce "bout de moi" n'existe peut-être pas ?
Mais comment savoir ?
Alors on espère encore..On cherche pour trouver peut-être, mais qu'importe, seule importe la quête...La quête de soi encore une fois, qui passe par là....
Cesser de chercher, c'est renoncer, c'est abdiquer, c'est perdre, c'est admettre l'échec, le manque, l'absence de complétude, d'un sujet complet
Cesser de chercher, c'est peut-être commencer à mourir !

Accueil




vendredi 26 septembre 2008

Attendre

Attendre.....
Attendre son tour patiemment ou non, dans une salle d'attente
Attendre indéfiniment que sa vie change
Attendre que l'autre vienne
Attendre un enfant
Attendre son train

Attendre la fin
La fin de l'histoire, la fin du film,
Attendre la mort !

Que de temps passe t-on à attendre ? Mais attendre quoi ? Ou qui ?
Attendre ou espèrer ?


L'attente n'est pas toujours facile, pas toujours simple à vivre, à gérer..
Elle instaure en effet un espace de solitude, solitude encore, encore et toujours..

Attendre c'est se retrouver face à soi même, face à son être seul, et c'est parfois le plus difficile, le plus compliqué, le moins supportable..
Attendre, c'est renoncer à la satisfaction immédiate, renoncer au tout de suite. Pas maintenant.
Satisfaction d'un désir, d'un besoin. Cette satisfaction là, est différee dans le temps, un temps parfois incertain, un temps inconnu, qu'on ne mesure pas toujours, qu'on ne maitrise pas
C'est se retrouver face à l'impuissance, à la non puissance de gérer ce temps, de le ramener, ou de l'amener à une distance qui nous semblerait raisonnnable, qui nous conviendrait, qui nous serait plus supportable, moins anxiogène.

"Je n'en peux plus d'attendre...Qui ou quoi ?"... Me dit un jour une analysante. Attendre, mais quoi, peu lui importait de le savoir, mais elle savait qu'elle attendait.
Que quelque chose se passe dans sa vie, quelque chose, dont elle ne savait rien, qu'elle n'imaginait pas vraiment, mais qu'elle attendait.

Insurmontable attente, laissant le sujet seul face à un espace, un espace de temps, dont il ne sait que faire, qu'il ne sait, ou n'ose combler dans l'attente de.
Un espace temps qu'il n'ose investir, car l'évènement attendu pourrait arriver. "Alors si je commence quelque chose... Je raterai, comment savoir ?"
Comment savoir en effet ?
Mais savoir quoi ?

L'attente est un problème de sociéte, tant et si bien que la question se pose partout. Les salles d'attente, où des inconnus se croisent, se regardent, se parlent parfois....Lisant les magazines laissés là, à leur intention pour "tuer le temps", attendre sans attendre.
Comme si l'attente, cette attente là générait un ennui, une sorte de "je ne sais pas quoi faire" . Répondant à l'injonction parentale d'antan, "Ne reste pas sans rien faire" et pour aller plus loin encore "l'oisiveté est mère de tous les vices " Peut-être ?

Le temps perdu....Ou qu'on pense tel, car on aurait envie de faire autre chose que rien, ce rien qui justement s'impose là, comme ça, sans qu'on n'y puisse rien...Le temps encore est toujours qu'on croit nôtre, mais contre lequel on ne peut rien encore une fois, qui s'impose et qui se pose dans un espace que nous n'avons pas forcèment prévu, et qu'on s'obstine à meubler parce que cet espace là, on ne le veut pas vide. Un espace ne peut être vide, le vide se doit d'être comblé...

Pendant cette attente. Contre laquelle il n'y a rien à faire de plus que feuilleter machinalement la revue placée là pour ça... Les mots croisés pour se concentrer et faire passer le temps plus vite... Travailler en attendant, sur son ordinateur, sur des dossiers, afin de ne pas perdre son temps....Ou en ne faisant rien, les yeux perdus dans le vague, dans le ciel, profitant de ce temps libre pour penser, rêver, méditer... Contre tout attente !

Le temps donc ! Une question de temps...Perdu, mais qu'il ne faut cependant pas perdre, car pour certains il s'avère précieux....
La perte ! Insupportable perte.
Ce temps, qu'on tue, pour ne pas le perdre.
Curieux paradoxe !
Temps mort !
Une si longue attente...

On attend un enfant, on attend à la caisse, on attend son tour, on attend des résultats, on attend un rendez vous, on attend un événement, on attend son train, son taxi....
Quai de gare !

On attend, donc on est là à un moment a et on attend le moment b. Seulement la route n'est pas directe. Il existe un espace entre les deux, il y a un "entre" a et b.
Cet "entre" là c'est l'attente
Une sorte d'entre acte.... Pour que les acteurs se changent, reprennent leur souffle, qu'on change le décor
La vie est un théatre....
Dans ces cas l'attente est dévolue à quelque chose, à une sorte de résultat
L'enfant viendra, le train, le taxi arriveront, on finira par vider son caddie à la caisse du supermarché.
L'attente n'est pas vaine, même si ce temps là, ne sert concrétement à rien. Du moins c'est ce qu'on croit. Il n'y a qu'à regarder les files d'attente...génèrant davantage de stress qu'une joie débordante !
Donc quel est cet espace qui se situe dans l'intervalle de l'ensemble a et l'ensemble b, il n'y a pas de rencontre possible....
Si le temps est linéaire, l'intervalle serait plus ou moins long, mais serait là, mesurable, mathématiquement calculable..
Une sorte de no mans land...Un sass où il est censé ne rien se passer. Pourtant.
Il s'en passe des choses, il s'en dit des mots... On pense, on imagine, on improvise, on invente un scénario, je dirai, je dirai ça...je ferai ci je ferai ça...On refait le monde, à notre image, on se réinvente un monde, un peu meilleur, juste un peu plus adapté, un peu comme on voudrait, où on serait un peu le héros, du moins un peu moins ci, un peu plus ça...

L'attente entre les séances d'analyse....
Attentes si longues, trop longues parfois, où on pense, où on dit, on se redit, on dit à soi même, on se souvient, on ressent, encore la séance, ce qui s'est dit, pas dit, ce qu'on aurait aimé dire, ce qu'on aurait du dire, qu'on n'aurait pas du dire, qu'on a pas pu dire, on se dit les mots qu'on dira la prochaine fois... Peut-être, si on s'en souvient. Puis on pense encore aux mots qu'on a dit, qu'on a pas dit, la dernière fois...On aurait du, on a pas pu, on le dira, on le dira pas...On pense, on élabore, on échafaude, on rêve, on analyse, on fait des liens, on associe, on comprend tout, on ne comprend plus rien....On tisse des liens, on tricote, on brode, on détricote, on reprise, on ressasse, on recoud, on remet des pièces, on rafistole, notre vie, on bricole, on colmate, on reprise encore et encore avec quelques mots, lachés là, seuls qui se raccrochent peut-être encore à quelque chose, à un lien tenu, un pauvre fil suspendu, qu'on essaie de sauver, pour faire du lien, pour tisser, pour ramailler là où ça a céder....On tente encore une dernière fois, ça tient, ça tient pas, de ci de là, de ci de ça, et puis peut-être on tire encore, des plans, sur la comète, avec le fil qui ne rentre pas dans le chas de l'aiguille, le chat....Le fil qui tient et qui tient pas, qui ne tiendra pas, et on coupe ! finalement on tranche ou pas, on fruste ou pas, on castre ou pas, on censure ou pas....L'interséance... Angoisse, pas bien, nausée, malaise....
Joie, bonheur, euphorie, c'est ça tout ça, l'attente de l'autre, de la séance, la future, pas la dernière, l'attente de l'analyse, l'attente de l'analyste !

On attend la prochaine fois, le temps est long, on est en manque, en manque de la séance, en manque du dire, on manque de mots à mettre sur les émotions, les souffrances, les douleurs, les rires, les plaisirs, on manque du manque, on manque de la séance, on manque de l'analyse, on manque de l'analyste...
Mais la séance viendra, il faut être patient l'heure finit par arriver, le rendez vous finit par avoir lieu, notre tour arrive...
Quand il viendra, il se passera quelque chose, ou il ne se passera rien, ou pas ce qu'on attendait, mais on attendait quoi ? Le plan ne se déroule pas comme on l'avait prévu...Alors on attend encore, la prochaine fois, la prochaine séance, le prochain rendez-vous, la prochaine rencontre...
Pour ne pas la manquer. Cette fois, encore une fois !
Un tour, encore un tour, un tour de passe passe, le temps qui passe et qui repasse, cent fois remettre sur le métier son ouvrage !

On attend....
Je me souviens d'une expression de mon enfance... "Attendre le dégel". Elle me faisait rêver, mais ne manquait pas de m'interpeller en plein été...

Attendre quelque chose qui ne vient pas, et qui ne viendra jamais, mais attendre, telles ces femmes de marin qui attendent le retour... Un retour impossible parfois, mais qu'elles espèrent quand même, car cet espoir les maintient en vie, du moins les aide à survivre
L'attente de l'homme, du fils ou du mari, parti en mer, et pas revenu ! Naufrage, mère cruelle, qui a ravi le corps, le corps du fils ou du mari, dans l'immensité de l'océan, gouffre sans fond, sans fondement, ce qui ravive encore l'attente, l'attente du miracle...
Survivre à ça....Vivre pour attendre, attendre pour vivre, regarder la mer, qui réclame toujours plus de sacrifice sans jamais s'apaiser, qui réclame des vies pour se nourrir du désespoir et de la souffrance....Regarder le ciel, implorant la clémence des dieux, qui ne peuvent être si cruels, des dieux, qui pour une fois, peuvent ramener le fils ou le mari vivant, sur le rivage, là où les pieds de la pauvre femme errent cent fois par jour, dans l'attente d'un signe qui ne vient pas, qui ne viendra peut-être pas, mais qui peut peut-être venir !
Sa vie ne tient qu'à ça, de ci de ça, vie qui ne tient qu'au fil tenu, malingre et malicieux qui la maintient en vie, en survie, et qui se coupe, qui se brise, qui ne tient plus, qui lache, qui ne peut comme les filets de la nasse être sans cesse ravaudée
Pauvre vieille ! Pauvre femme ! Pauvre mère!
Que faire, elle n'est pas de taille pour lutter contre cette mère qui dévore tout, ses enfants et ses navires !
Mais elle attend, une si longue attende, des journées à attendre, une vie d'attente !
Cette même attente, qui se confond avec ce misèrable espoir des plus pauvres, des plus solitaires, de ceux qui souffrent, qui pensent que demain sera meilleur, si ce n 'est pour eux, il le sera peut-être, sûrement même pour leurs enfants....
Leur laissant croire, les rassurant, que finalement ils n'ont pas tort, ils ont raison d'attendre, ils ont raison de miser sur cette attente là
Qu'il finira bien par se passer quelque chose; qu'ily aura une lumière au bout du tunnel, que ça ne peut pas être sombre tout le temps, noir partout !

Alors il faut attendre, attendre encore et encore
Interminable attente !

jeudi 25 septembre 2008

La mort de l'autre

La mort de l'autre....

J'ai souvent, et j'évoque souvent la mort, la ou les problèmatiques qu'elle soulève. La douleur.
La mort, fait partie de la vie, elle en est une partie, elle en est la fin, l'issue. Irrémédiable.
Mourir est le destin de tous, un destin certain et incertain pourtant, car personne ne sait quand aura lieu cette fin, qui met définitement un terme à la vie, à notre vie....

Mais aussi à la vie de l'autre !
Mais surtout à la vie de l'autre !

Si nous pensons parfois à notre mort, sans toutefois pouvoir se l'imaginer, car c'est impensable, pas représentable, nous pensons aussi, parfois/ souvent à celle de l'autre, la mort de l'autre
L'autre aimé...
L'autre qu'on aime, et qui par là, par la mort un jour nous quittera, nous laissera, là, face à un vide, face au vide de l'absence, face au vide de son absence.
Car si on ne se représente pas la mort, on peut se représenter ses conséquences, c'est à dire l'absence de l'autre....Ce que la mort apporte, le résultat de son passage.
Elle fauche, tout !
Et nous laisse face à l'absence, face au corps de l'autre sans vie, puis à son absence...Face au vide de l'absence..
Un vide, un trou béant, qu'on ne pourra jamais vraiment combler, puisque l'autre, cet autre là, aimé est parti à tout jamais, pour toujours, sans aucun espoir de retour !

Certains s'en prennent à rêver qu'il existe peut-être, sûrement même, un espace, un paradis où on le retrouvera, où tous les êtres qui nous sont ou qui nous ont été chers, nous attendent....
Attendent notre venue, dans cet au delà....Au delà de quoi ? Au delà de qui ?

Au delà, c'est en quelque sorte quelque chose qui nous dépasse, que nous ne connaissons pas, une sorte d'espace inconnu, un territoire mystèrieux et magique peut-être aussi ?
Un espace autre, qui se situe dans une autre dimension, un autre champ que notre vision ne nous permet pas de voir, mais que notre esprit, avec un peu d'imagination, ou de la foi, nous permet d'envisager, d'entrevoir ou/et d'espèrer

Un espoir qu'on peut entretenir, pour moins souffrir, pour moins avoir mal, pour mieux supporter, la perte, la perte, de l'objet, de l'objet qui nous comblait, qui comblait notre solitude...

Sa perte ouvre le comble, la faille la terrible fissure... Le trou béant, vide et profond qui fait qu'une fois de plus peut-être on se retrouve, seul.
Seul face à soi même sans l'autre, qui nous était cher,
Cher, si cher, qui nous tenait chaud, chaud au coeur..
Qui nous tenait au chaud, éloigné du froid de la solitude, du froid glacial de l'être seul , qui nous réchauffait le coeur, qui nous réchauffait le coeur.
Face à nous même, face à notre propre solitude, face à notre être seul !
L'être cher, n'étant plus, n'étant plus là, nous sommes seul , définitivement seul..
Sans lui !
Jamais on ne s'était rendu compte hier à quel point cet être, perdu aujourd'hui, nous manque et nous manquera demain. Et nous sommes seuls !
Seul sur la route, seul sur le chemin, seul ! Définitivement seul, sans que rien ne puisse venir combler, remplir ce vide, cette solitude qui nous fait mal, qui nous terrasse, qui nous arrache, qui nous déchire.
Une partie de nous même semble partie, semble avoir été définitivement elle aussi, arrachée, déchirée, morte avec l'autre..Avec le disparu !
Quelques analysants décrivent cette perte, cet écartélement, cette amputation. "Une partie de moi est restée là, là bas, à cet endroit, à ce moment....Une partie de moi, est toujours là bas, l'autre continue, mais seule, car il manque quelque chose...Le temps semble s'être arrété là"
Arreté, laissé là... Avec l'autre qui est mort, ce temps, cette partie est morte elle aussi, partie à tout jamais avec la mort de l'autre
Cette mort qui l'a entrainée dans le gouffre terrible, dans le vide, dans ce trou sans fond, dans cet univers inconnu, ce terrain obscur, territoire inconnu et inviolé de la mort, non espace....

La mort de l'autre pétrifie, tétanise, traumatise.
Effraction terrible, qui par son intensité, sa soudaineté, son imprévisibilité pénêtre et intruse le moi, au risque de le détruire.
L'autre bout du moi, mort lui aussi avec l'autre, celui qui est parti.
Autre, membre fantôme, mais qui fait mal, comme le bras ou la jambe amputée qui continue à faire souffrir. Qui n'est plus, mais dont on sent la présence...Une présence absente.
Nulle morphine pour oublier cette douleur là...
Car l'autre n'est plus.
Disparu....
Mort !
Car disparu est un euphémisme, il ne dit pas vraiment, comme s'il n'osait pas...Il laisse presque suggérer, et c'est une erreur de croire ou de faire oou de laisser croire qu'un retour puisse etre possible
Mais la mort, signe bien cette disparition sans espoir de retour
Sans jamais revoir, retrouver, le regard, la chaleur, l'amour de l'autre, cet autre qui nous était cher. Qui parfois, était une partie de nous même "nous ne faisions qu'un" couple fusionnel, qui ne trouvait de sens qu'à travers, et grâce à l'autre, l'un et l'autre, l'un est l'autre, l'un sans l'autre ne peut être. Un presque indicible "parce que c'était lui, parce que c'était moi."

La mort de l'autre...Qui fait qu'on se retrouve alors, face à soi même, pas seulement face à sa propre mort, mais, pire, face à sa propre solitude !
La mort on ne peut pas se la représenter.. La solitude, si, pour peu qu'on l'ai déjà vécue, éprouvée, dans notre chair, au plus profond de notre coeur, de notre âme.
Pour peu que les liens sécures nous ont fait défaut, plus ou moins dans notre enfance, dans notre petite enfance...
Défaut, défectibles, défaire....Des faire.
Souvenirs, cicatrices, indélébiles, conscientes, inconscientes....Pour toujours, refoulées, retour au conscient, revenues lors de ce deuil, réactivées... A fleur de peau, à fleur de mots, à fleur de maux.
Qu'il y ait eu des manques déjà...
Cet attachement, ces liens, qui ne sont pas, qui sont peu, ou qui sont, ou ont été toxiques
Ce manque déjà, ce manque, cette absence, cet oubli qui fait que nous avons été seul, trés tôt, si tôt, trop tôt !
Solitude, seul, face à notre être seul, insupportable, insurmontable,

Nous cherchons alors dans l'autre, sujet, un objet d'amour, sécure qui sécurisera notre peur d'être seul...Qui viendra combler ce vide. Un trou béant...
L'abandon...
Revivre encore cet abandon n'est pas tenable..Encore !

Abandon et solitude, c'est complémentaire, abandonné à sa solitude...
Etre seul, face à son Etre seul, sujet abandonné à lui même, à sa solitude, à sa propre solitude,
Une solitude qui lui est insupportable, une solitude qui ne peut être pour lui que synonyme d'abandon, puisque la solitude est le résultat de l'abandon.
Une solitude qui n'est pas choisie, cherchée, recherchée.
Sans être le fruit de hasard, cette solitude là est advenue dés sa venue à la vie. Venir au monde seul, dans un monde de solitude.
Ne pas avoir de réponse, ne pas avoir de signe, demander, pleurer, crier, parler, sans être entendu....Sans la mère, sans le père, sans le ou la qui va prendre en charge, prendre en compte, ce petit être qui ne peut être seul, car l'homme est un être social, sociable, qui a besoin de l'autre pour vivre
Mais cet autre, si cet autre justement cet autre là qui est attendu, ne vient pas, ne répond pas, n'entend pas, et laisse le nouveau né, le bébé, le petit enfant, l'enfant, l'adolescent, puis l'adulte devenu seul....Irrémédiablement seul... Si l'autre, cet autre là, est sourd, muet et aveugle....

Solitude de mort, solitude de non être, solitude maudite, sans mots dits, justement, sans mot à mettre dessus... Seuls les maux peuvent alors combler cette absence de mots.
Cette solitude qu'on remplit comme un vide effroyable qui ne peut le rester sans produire de l'angoisse, une angoisse qui serre, et qui ressere, à tel point qu'on en étouffe....
Une angoisse qu'on essaie de faire passer, en remplissant le vide, comme on remplit le gouffre, avec ce qui est là, ce qui passe par là, ce qui tombe là sous la main....
La nourriture, le tabac, l'alcool, la drogue, le sexe, le net, l'autre
Qui comble, qui bouche le trou, les trous, les orifices...qui colmate pour que ça ne fuit pas, que ça ne s'échappe pas.
On retient, on serre, on ne lache pas
Tout ce qui s'échappe est une perte, un abandon encore !
Parfois il faut vider, vider, lacher, laisser, pour remplir encore, et encore et davantage, jusque n'en plus pouvoir, jusque n'en plus vouloir...

Car on revit encore cet abandon, cette solitude, traumatisme cumulatif, cet abandon là, pas prévisible, vient nourrir encore la blessure traumatique originelle, celle où pour la première fois le moi a rencontré cet éprouvé de solitude, qui est devenu un sentiment de solitude..
Rencontre terrible, terribles rencontres encore !

Alors la mort de l'autre ? De l'autre aimé, qui peut-être servait de par être, de cuirrasse, d'armure pour affronter le monde et les autres.
Cet autre "besoin" fait nécessaire, qui permettait à la asolitude de ne pas être au rendez vous.
Si cet autre, s'en va, part, vous lache...S'échappe
Pour une destination connue, mais inconnue, car nul ne sait pour où il part...Et tout le monde sait qu'aucun retour n'est possible
Cette confrontation au non retrour, à la mort del'autre, à sa propre solitude, à son être seul et non seulement anxiogène, mais mortifère....
Elle montre et démontre, nos limites, celles qu'on ne peut malgré nous et malgré tous nos efforts border, cadrées, pour être dans un espace sécure, un espace qui nous sécurise, qui apaise nos craintes et nos angoisses, une sorte de no man's land, où rien ne peut arriver, puisqu'on a mis en place tout ce qui était nécessaire. On a sécurisé le périmêtre....
Mais la mort, n'a que faire de cette sécurité là, de ce périmêtre là. Elle va et vient comme bon lui semble et seul la mort est immortelle. Elle résiste à tout, et nous n'y pouvons rien
La mort de l'autre vient nous démontrer, si nous ne le savions pas, ou si nous l'avions un peu oublié qu'on ne peut rien, qu'on n'est pas tout puissant, qu'on ne peut pas tout prévoir, et que l'imprévisible existe, que nous y sommes soumis, sans être forcément responsable. Et surtout pas responsable
Que la vie est éphèmère, courte et ne tient qu'à un fil...Que celui ci peut être coupé ou peut se couper n'importe quand, n'importe comment à chaque instant.
Incontrolable, imprévisible....
Ce sont les lois (qui ne sont pas celles des hommes) qui régentent la vie, la mort.. La nôtre et celle de ceux qui nous sont chers ! La Loi donc, celle de l'universel, l'Autre !
On ne le sait que trop, et l'oublions pour pouvoir vivre, avoir la force de continuer, seul ou avec d'autres le chemin, dur souvent, agréable parfois.
Nous allons sourire, rire, aimer encore, et encore, car nous sommes vivants, et cela fait du bien de le penser ! de le croire.
Perdre l'autre est dur, terrible, terrifiant et parfois insurmontable...Rester seul est la pire des souffrances, vivre sans cet autre, est pour certains impossible !
Il parait que la vie nous apprend. A nous d'en tirer une ou plusieurs leçons, faire de notre ou de nos expériences, une force, un appui qui nous permet d'aller plus loin encore, dans notre vie, dans notre réflexion...Sur la route.

Résilience....Résistance...Survivance....Instinct.....Pulsion....De mort....De vie....De vivre...La rage de vivre....Le désir de vivre....La pulsion de survivre....L'instinct de survie !

Tel le voyageur, le pélerin nous cheminons, notre sac, notre fardeau s'alourdit de jour en jour....Il nous fait courber l'échine chaque jour un peu plus.
Les évenèments de vie, peuvent devenir que nous y prenions garde ou pas, de terribles traumatismes, ils peuvent se réfugier au plus profond de l'inconscients, refoulés, pour nous revenir en pleine figure, quand parfois on s'y attend le moins.
Bien que...
Le hasard n'étant pas, ce rendez vous là, impromptu, n'est peut-être pas si banal et si imprévu que ça.
La réactivation du trauma, arrive peut-être quand on ne s'y attend pas, mais quand on peut, où qu'on pourra en faire quelque chose, au mieux le surmonter, pour avancer....Encore plus loin, pas forcément plus vite....
Mais la mort de l'autre, la mort de l'autre aimé, la perte à tout jamais, celle qui nous confronte à la solitude, au vide, à l'abandon et forcément à notre propre mort, un jour ou l'autre ?
Que faire de cette mort là ?
Nous apprend elle à être plus fort ? A continuer le chemin ? Seul et in mémorian.... De l'autre perdu ? Pour lui ? Pour elle ?
En sortons nous grandi ?
Pouvons nous alors relever la tête, non pour allèger ce fardeau, mais le porter de telle façon qu'il en sera moins lourd, moins encombrant ?
En ferons nous le deuil ? Et que signifie faire le deuil ?

Pour Tao.

lundi 8 septembre 2008

le mal dire

Dans un précédent article, je m'arrétais assez longuement sur les mots, leur sens, leur importance aussi.
Importants ils le sont !
Mais la place qu'ils occupent au sein de la communauté des hommes qu'ils lient ou non est essentielle.
Sans les mots, pas de parole, pas de langage, pas de possibilité de communiquer autrement que par gestes ou signes.
Une communication relativement limitée, nous pouvons en faire l'expérience quand nous rencontrons une personne qui ne parle pas notre langue, dont nous ne parlons pas la langue...
Malgré les efforts de chacun la conversation s'essouffle rapidement, l'échange reste modeste, même si nous aimerions en dire et en entendre davantage. Nous sommes frustrés, frustrés par cet échange, qui tourne court, trop court bien souvent. Car nous ne pouvons dire....Il nous manquent les mots pour le dire
Pour le dire justement, et fort justement....
Les mots nous sont donc indispensables et essentiels pour nous exprimer et exprimer ce qu'on ressent.
Ce point établi, j'aimerai à présent souligner le "mal dire".
Qu'est ce que le mal dire ? Ou dire mal...Pas avec justesse.
User des mots, oui, mais pas tout à fait selon le bon usage,
J'aurai d'ailleurs pu intituler cet article "du bon usage des mots", mais ce n'est pas seulement d'usage qu'il s'agit, mais aussi de mal traitance, de mal usage....De mésentente donc.
De mésentente qui en est le résultat, car chacun n'entend pas la même chose, le même sens, ne peut donc se faire une représentation.
Mésentente entre celui qui dit et celui qui entend, ou plus aisément, celui qui communique un message à une autre personne qui doit comprendre ce qui a été dit.
Et cela parfois ne passe pas... Ou cela passe mal, pas complétement...

Oui, mais alors pourquoi maltraiter ce mot, ou ces mots, qui n'y sont à l'origine pour rien
Comment les maltraitent-on ?
Le plus souvent sans vraiment le savoir, et sans s'en rendre compte
Pour aller plus vite, car la vitesse, est là, présente, omniprésente, jusque dans la communication et même surtout dans la communication, dans le dire à l'autre...
On use et abuse, de code et de signes, SMS ou autre, qui ne signifient rien, ou pas grand chose pour le non initié.
Encore qu'il ne s'agit pas d'être initié dans ce cas précis, le mot, le sens représenté par des signes, ou des chiffres, n'a pour objectif que l'économie de texte....Et il faut bien dire, des banalités, des rendez vous, une liste de courses, des mots d'amour ou de rupture....
Une sorte d'inventaire à la Prévert....
Vitesse et modernité ?

Mais les mots sont amputés depuis longtemps déjà, on prend le bus et on regarde la télé. .. Ce ne serait pas bien grâve si on s'en tenait à l'oral, lors d'une conversation banale....
On écrit comme on parle, et comme on parle mal, on écrit mal...
Il ne s'agit pas seulement de fautes d'ortographe, mais de barbarismes, d'incorrections, de néologismes, d'erreurs, de mots employés pour d'autres....

Comment peut-on penser ? Symboliser ? Ecrire ? Se représenter, avec un vocabulaire tronqué, erronné ? simplifié ?
Comment cela est-il possible ?
Que met-on derrière ces mots symboles, ces mots chiffres, ce mots signes ?
Quelle valeur sémantique et sentimentale ? Quel amour pour ces maux, terribles mots qui se cachent sous une carapace énigmatique, qui perdent leur identité, leur vitalité...
Qui saura quels mots véritables se cachent, vidés de leur enveloppe, de leur corps, de leur "moi peau," ils deviennent peu à peu vidés de leur substance. De leur essence.
Vampirisés par le progrés, par la technique, par la technicité, d'appareils sensés rapprocher les gens, les personnes, mais qui en réalité, ne servent qu'à les isoler, les disperser...Bref, démanteler et briser le lien social !

Comment peut-on parler d'un avenir, d'une décision en tapant un texto ?
Comment peut-on se contenter d'une telle messagerie ? D'un tel messager ?
Le mal dire en est-il l'origine ? L'avenir et la modernité sonnent t-ils le glas de l'orthographe, de la syntaxe ?
Qui ou quoi ? Quelle origine ?
Quel désir ? Quel désir surtout ?
Où se situe le désir, pas seulement de bien dire ? Mais de dire simplement ?
Le désir de traduire ce que le corps et l'esprit éprouve, de nommer des émotions, des affects, des moments de bonheur, de souffrance ou de douleur
Comment dire tout cela ? Quels mots mettre sur les maux du corps et de l'esprit, si ces mots ne sont pas ou ne sont plus ?
Si ces mots n'existent pas ou plus dans le registre de la langue du sujet ?
Si rien ne peut représenter, ni symboliser ?
Perte de la parole, du mot, du sens ?
Comment mettre du sens et faire des liens ?
Comment dire à l'autre, justement au plus juste, ce qu'on pense, ce qu'on ressent ?
Comment entendre aussi ce que l'autre voudrait dire ?
Allons nous donc tous parler une langue étrangère ? Une langue qui n'en n'est plus une, mais qui est une sommes d'anagramme, de sons, de consomnes et de chiffres sensés vouloir signifier quelque chose ?
Mais fort justement où sont le signifié et le signifiant ?
Plus d'enveloppe, plus de contenant, plus de contenu
Contenant la pensée, l'âme humaine, le mot s'il est vidé, exangue ne peut plus être, ne peut plus jouer son rôle, rôle essentiel dans le lien celui de la mère et l'enfant, celui du petit homme à l'adulte, celui du sujet au sujet
Ce langage neuf, nouveau est-il le langage du sujet ?
Quid de l'analyse, qui repose sur les mots, sur le dire...Sur le dire des mots sur les maux, pour les mettre en mots, et soulager l'âme et le corps ?

Curieux laboratoire que celui ci. Curieuses expérimentations que celles là ?
Il ne s'agit peut-être plus de mal dire, mais de "non dire" et du mal de dire, ou ne pas pouvoir dire !
Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...

Nota bene

Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.

Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

Vous étes venus

compteur visite blog

map