Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

mardi 21 novembre 2023

L'inconsolation

 


" Je suis le Ténébreux, – le Veuf, – l’Inconsolé,
Ma seule Etoile est morte, – et mon luth constellé
Porte le Soleil noir de la Mélancolie.
Le Prince d’Aquitaine à la Tour abolie "

Quels autres mots que ceux de Gérard de Nerval ? Quel autre poème qu'El Desdichado ?

Inconsolé je suis, inconsolable aussi
Alors ne reste que l'attente, mais laquelle ? 
Mortelle, longue et douloureuse attente. 

Plus rien n'a vraiment de sens, de couleurs, d'odeurs, de sons, de vie, ça va, vient, sans nous, nous sommes sans être à soi et à ce monde. 
Mais où sommes nous ? Ni dans le passé, dans le présent, encore moins dans le futur, car de futur il n'y  a pas, ou plus. Il y a le temps. Juste le temps.
Le temps de l'instant, le temps long qui se tire et s'étire , se tend et s'étend. Nous sommes envahis,  submergés par ces vagues de temps qui se bousculent et nous bouleversent. 

Prendre accueillir ce temps qui nous est offert encore un peu. Mais pour quoi ?

C'est la flamme de la bougie qui vacille au moindre souffle d'air et de vent, une respiration faible qui s'accélère sans qu'on ne sache pour quoi, ni pour qui ?Un shot de vie qui s'infuse dans la fragile perfusion qui nous maintient encore ici. Encore un peu
On ne lutte pas, on lâche, mais quoi ? qu'elle prise ? Nous escaladons sans rappel une pente vertigineuse, on monte puis on descend. Jusqu'où ? Parfois on côtoie les parois de l'abime et on aperçoit encore bien loin le fond. 
Mais ce n'est pas pour cette fois encore, on remonte, on se retrouve à flot, on remet son titre en jeu, Pas encore KO le match n'est pas terminé !
Sauf qu'on ne combat personne, que ça fait bien longtemps que nous ne cherchons plus ni titre ni médaille
Simplement le repos.
Le repos du guerrier, le repos de l'âme
Enfin !

Inconsolable ! Inconsolé de quoi ? de qui ?

On ne sait plus vraiment
Inconsolé de soi. Peut-être ?
Question de place ? Avons nous une place dans cet ici et maintenant. Dans ce monde fou qui n'est plus le nôtre et dont on ne veut pas.
L'en vie de la vie s'en va, tout doucement, sans faire vraiment de bruit de peur de réveiller ce qui peut encore nous faire vibrer?

Plus d'envie, plus de vie, plus de matins, plus de soirs, plus rien, plus de joie ni de chagrin, tout est vide uniforme et sans saveur. Plus de bonne heure.


Un monde qui s'effondre et qui oublie, pour ne pas sombrer tout à fait on va chercher dans les cryptes de notre mémoire des souvenirs  ensoleillés pour  croire qu'un jour au moins un peu, on a été heureux sous le soleil brûlant et la chaleur de la jeunesse !


Inconsolé mais bien élevé on s'efforce de montrer et de faire croire que tout va bien, ne pas inquiéter et surtout ne pas parler pour être sûr de ne rien entendre.
Car l'inconsolable sait que tout ce qui pourrait être dit sera inentendable, alors on joue la comédie,  si bien parfois qu'on se laisse prendre à son propre piège et pense aller  mieux. 

Enfin consolé, on espère alors retrouver un peu de vie, un peu de bonheur on met de la couleur dans sa vie et en route sur le chemin avec un petit sourire pour se donner du courage, de l'envie, celle de trouver un soupçon de beauté dans le ciel, la campagne, le rire des enfants et les caresses de son chien.

L'inconsolé essaie de se consoler, maladroitement humblement, avec le peu d'amour qui lui reste au fond du coeur, ce reste d' humanité qui fait de lui ce qu'il est.
Il regarde son chien avec tendresse ; il ne peut le laisser seul et doit au moins faire la route le plus loin possible à ses côtés. C'est peu de chose mais si difficile !
Alors il avance, rêve un peu, et puis les larmes coulent, elles coulent toujours, ce sont ses compagnes fidèles, de joies ou de peine, elles ne le quittent jamais. 


Un seul être nous manque, on s'était promis de faire le chemin jusqu'au bout et puis !
On se retrouve seul inconsolé et inconsolable, dans un interminable deuil qui n'aura d'issue que ?  quand ? On ne sait pas mais  on s'évertue sans trop se croire de se dire le plus tard possible car on ne veut pas faire de peine à ceux qui nous aiment et aimons. 

Même cet amour là ne suffit  pas toujours ! et un jour ne suffira plus.
On se dit, on se convainc, on se ment, on avance et on tombe, on se relève, on recommence, on voit la fin qui avance, on la redoute, on la souhaite, la seule issue à la souffrance, on a peur aussi

A t-on choisi la vie ? Ou celle ci nous a t-elle choisi ?  Je ne saurai savoir, je ne saurai répondre on sait seulement qu'on n'a pas su vivre au présent, prendre le bonheur car on ne savait pas que ce présent, ce moment, ce cadeau c'était justement le bonheur
On veut toujouts plus que ce que l'on est, plus encore sans prendre le temps d'aimer vraiment et de vivre
Vivre.

A Toi Marina, ma très chère, car je sais que chaque mot résonneront et que tu comprendras.

Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne
Crédit photo @brigittedusch

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