Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

dimanche 23 mars 2008

Analyse et spiritualité

La dimension spirituelle de l'analyse ?

Cette question posée par un analysant est interressante sur plusieurs points.

Spiritualité et psychanalyse peuvent-elles cohabiter ? se cotoyer ?
Y a t-il une dimension spirituelle à la psychanalyse ?

J'ai toujours considéré la démarche et le travail analytique comme une quête, un long voyage à la rencontre de soi. Un voyage qui peut aussi ne pas aboutir. La psychanalyse ne promet rien, n'assure de rien, elle permet tout simplement. Et ce n'est pas rien !

Partir à la quête, à la conquête ou à la reconquête de soi, est une décision lourde de conséquences pour soi, déjà, pour ceux qui nous entourent également. Ce désir là, s'il est présent depuis longtemps, ne se concrétise qu'après une mûre réflexion.... Parfois, il faut des jours, des semaines, des mois, des années avant de franchir le pas. Parfois, les tentatives avortées sont nombreuses. Parfois on ne trouve pas la "bonne personne", enfin "sa bonne personne" . Celle que le sujet fera "son analyste"..

Se chercher pour se trouver est-il une quête spirituelle ?
La quête est historiquement principalement spirituelle, ou plutôt "religieuse", ce qui n'est pas la même chose
Ainsi la Reconquista, la quête vers la lumière etc...les pélerinages, les marches vers les lieux saints, pour demander, guérir, obtenir une faveur, quêter de l'espoir, un signe divin ?

Il n'y a rien de divin dans la démarche psychanalytique, dans le sens où pas de "deus ex machina". Pas de miracle non plus, même si Lacan affirme que la guérison "arrive en sus" !

La quête analytique si l'on veut garder ce terme, qui me convient par certains aspects n'a rien de religieux non plus. Bien au contraire, elle m'apparait comme laïque, purement et simplement laïque.
Dieu ou dieu, n'a rien à faire ni affaire la dedans, dans ce rendez vous là ? Il ne s'agit pas non plus d'un diner avec le Commandeur. Il n'est pas convoqué.

Seul notre moi est convoqué ! Et encore, il n'est pas obligé ni d'être à l'heure, ni au rendez-vous...

Mais pourquoi donc alors parler de démarche et de dimension spirituelle ?
Pourquoi dire, affirmer, écrire même comme le fait cet analysant, qu'il a tout d'un coup, "tout" compris, que "fiat lux" ?

Vivait-il alors dans les ténébres ? dans le noir ?
La dépression, c'est le noir, les ténébres de l'esprit, les sous bois de la vie. La lumière et les couleurs ne sont pas au rendez vous du quotidien. On fonctionne à demi, et parfois plus du tout.
L'analyse ne guérit pas instantanément de la dépression. Elle y aide, y contribue c'est certain. Mais le miracle ne vient pas spontanément.

L'analysant est-il un conquistador ? Le conquistador des temps modernes ? Le conquistador de son Moi ?

Il part en effet à la découverte d'une terra incognita. Son inconscient est un vaste continent noir qui lui reserve des surprises. Bonnes, parfois mauvaise..... Si les hommes d'Henri le Navigateur, n'avaient que peu de chances de revenir de cette aventure là, soit qu'ils mouraient en mer ou bien qu'ils brulaient leur vaisseau. Qu'en est-il de l'analysant ?

Y at-il un retour possible ? Oui, mais pas un retour au même possible ? on en revient changé, parfois on en revient un autre. Un autre qu'on ne reconnait pas, un autre dont on ne veut peut-être pas....

Mais qu'y a t-il de spirituel dans cette aventure là ? Que dans cette quête la ?
Dans cette requête ? Dans cette conquête ?

C'est l'esprit qui travaillle, qui est en cause, c'est l'esprit qu'on questionne, qu'on convoque à ce rendez-vous. Certes, mais pas le sprituel, pas cette dimension là ?

Pourtant ce mot "spirituel" est récurent, il tourne dans ma tête et dans mon esprit, il tourne et tourne encore sans que je sache vraiment pourquoi.
Et il me renvoit toujours au religieux, c'est la représentation que j'en ai. Et qui me géne. Pas de place pour la religion dans cette affaire là.


La psychanalyse n'est pas une confession. L'analyste ne donne ni bénédiction ni absolution. Il ne donne rien, il permet.
C'est l'analysant qui "fait tout le boulot" m' a dit un jour un patient. Ce qui est en partie vrai. Puisque le travail ne se fait pas seulement pendant les séances, mais aussi et surtout, entre les rendez vous, la nuit, dans les rêves, les actes du quotidien.


La psychanalyse "éveille" ? pour reprendre les termes des spiritualités orientales ? Certainement, elle éveille, réveille et émerveille aussi.

Ténébres et lumières : Moyen âge/époque moderne : Obscurantisme/connaissance : religion/sciences.......

Le sens de spirituel ne peut être que religieux, du moins il ne peut en être dénué. Même si cette acception (religieuse et théologique) ne vaut que jusqu'au XV° siècle.
Ma formation d'historienne et plus particulièrement de dixseptièmiste me renvoie également au "père spirituel".... Le confesseur, le directeur de conscience.

J'ai longuement réfléchi en son temps, sur l'analogie éventuelle ou le parallélisme plus probable que nous pourrions établir entre l'analyste et ce fameux directeur de conscience.
J'ai utilisé à défaut de paroles, les écrits des "dirigées" "pseudo analysées" (il s'agissait de femmes)...
Freud n'était pas encore né. Parler de psychanalyse avant lui, pourquoi pas après tout. Il déclare lui même qu'il ne l'a pas inventé, qu'elle existait bien avant lui, reconnaissant sa dette immense envers les auteurs de romans..

La clé et la réponse aux questions précédentes restent dans l'interrogation de la subjectivité, celle ci est-elle possible alors ?


Mais "spiritualité" évoque encore ce scientifique et pourtant mystique suédois : Swedenborg qui dialoguait avec les esprits, les anges et Dieu....
L'analysant ne dialogue pas avec ces gens là.
L'analyste n'est ni un esprit, un ange, encore moins un dieu

Dialogue ? ou monologue ?

L'analyse n'est pas une démarche spirituelle du moins avec ces acceptions du terme. C'est une démarche volontaire reposant sur l'association libre, le transfert, la parole, le silence....
Une démarche mais aussi un désir, celui de recouvrer un certaine liberté, la liberté d'être soi.
La spiritualité promet, la psychanalyse permet.
C'est là sûrement toute la différence.
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Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
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Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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