Ce texte est le fruit d'une longue gestation est d'un accouchement dans le sang et les larmes. C'est un cri, celui de mon coeur, mais il était nécessaire, essentiel pour la paix de mon âme
Je suis venue ici pour en finir avec les derniers fantômes, terminer une mission en suspens depuis des décennies, solder des comptes, elle me revenait donc de droit.
Je l'ai menée à bien, il restait encore quelques fantômes, non qu'ils me tourmentaient mais ils devaient être parlés, mis en mots... J'ai mis du temps, quelques décennies, ils ne soulagent en rien la douleur de la perte et l'immense chagrin que j'éprouverai toujours. Mais si je peux trouver un peu de paix ?
Je suis morte ce jour là, ma vie, mon âme, mon coeur sont restés là bas, une étincelle de moi pourtant s'est réveillée et s'en est allée, débris d'une âme errrante, qui ne cesse de wagabonder (Le w est un lapsus , il a toute son importance) sans jamais trouver de port.
Je suis une âme en exil comme mon Peuple...
Je suis de passage ici et ailleurs, je ne peux pas me fixer, car ce serait mourir et je suis en vie, en sursis, alors j'aime la vie, j'aime cette vie, j'aime ma vie, comme elle est.
J'aurai pu mourir mille fois, j'ai vu la mort en face mille fois elle n'a pas voulu de moi, sans doute D. a t-il un programme ? je m'y soumets volontiers, je suis son humble servante et je ne reconnais que sa Loi
Ainsi je considère que chaque matin lorsque je me réveille, c'est du bonus.. je suis en vie et j'essaie de faire du mieux que je peux pour me rapprocher de mon créateur.. Avec amour, humilité, tendresse, rire et humour.
Maintenant je peux partir, sans plus jamais revenir
Ce que j'écris ici est un chant, un Kaddish d'amour
Un témoignage d'âme
C'est un cri ancien, une douleur muette
Une tentative désespérée de conjurer la perte première
Je suis le sujet, et non l'objet du manque,
Je porte une parole qui le traverse.
Tu étais notre promesse
L'avenir, le notre, celui des Notres.
C'est pour ces raisons que nous sommes partis
Ton papa et moi
Sur cette Terre que D. nous a donné
Pour vivre
Fonder une famille, t'aimer, de voir grandir
Tu étais notre promesse
Notre joie, notre espoir, notre Hatikvah
Mon enfant, mon Bébé, mon petit Sabra, mon Etoile
Il est temps que je te racontre notre histoire et la tienne
Ta très courte vie
J'ai essayé maintes et maintes fois,
A chaque tentative j'ai renoncé
Les mots me manquent pour dire ce malheur, cette tragédie
Cette douleur, cette abîme de souffrance, ce vide rempli de desespoir
Tu es un enfant de l'amour
Celui de deux êtres, deux âmes qui se sont reconnues et aimées au premier regard
Une rencontre improbable dans un lieu étrange où ils ne devaient pas être.
J'étais si jeune, il était si beau, si grand,
Je n'oublierai jamais ce moment, c'était hier, il y a cent ans, il y a mille ans...
C'est maintenant, C'est toujours, à chaque seconde,
J'essaye de te dire, mon enfant, mon Amour, mon Tout Petit, car toi seul a le droit de savoir qui étaient tes parents...
Mais il me faut encore un peu de temps.. S'il te plait
Le temps nous en avons,
Notre temps c'est l'Eternité.
Tu avais toute une famille qui t'attendait,
Celle de ton papa, car la mienne déjà n'était plus.
Tu sais les Miens ont presque tous été assassinés dans les camps de la Mort.
Ils n'ont pas de sépultures.
Ils venaient des quatre coins de l'Est et de l'Empire Austro-Hongrois,
Ton grand père était Juif mais Allemand.
Il a échappé à cette horreur,
Ses parents ont fuis l'Europe quand il était bébé.
Sa famille Juive Hongroise a été exterminée.
Ton Papa, lui était Séfarade et sa famille m'a adoptée,
Aimée dès qu'il m'a présentée
"Voilà Yehoudit, celle qui sera mon épouse devant D.ieu"
Je l'ai éte le suis et le serai jusqu'à mon dernier souffle
Celui qui nous réunira tous les trois enfin
Sur notre Terre où tu reposes prés de ton Père.
Tu étais l'Espoir "celui de notre Peuple,
"Cet enfant sera celui qui réunit enfin nos deux communautés "' disait ton arrière grand mère en nous serrant ton père et moi dans ses bras...
"Vous êtes si beaux mes Enfants"..
Tu étais attendu tellement !
Nous sommes partis tous les deux :
un aller simple pour chez nous
Ton papa avait choisi d'être soldat
Trés vite il à intégré une unité d'élite.
Servir son pays, le protéger pour que tu puisses vivre en paix
Que nous puissions tous vivre sur la Terre Promise
J'ai fait moi aussi mon devoir
La vie notre vie était simple, heureuse,
Nous t'avons désiré, et tu es venu
Nous étions heureux
Simplement heureux
Et puis
Un jour on a frappé à la porte de notre maison.
Depuis ce jour là je ne supporte plus qu'on frappe à ma porte je crois mourir comme ce jour là à chaque fois, ce bruit est inscrit au plus profond de ma mémoire et de ma chair.
Oui mais tu étais là
Trop peu de temps
Vous n'avez pas eu le temps de vous rencontrer,
Ton papa n'a pas pu te prendre dans ses bras.
Je crois qu'on peut mourir de chagrin
Je suis encore en vie, mais une partie de mon coeur, de mon âme, de ma vie ne l'est plus
Elle est restée là bas..
Avec vous sur un coin de notre Terre où je suis chez moi
Elle y est bien je crois,
Quand la peine m'étouffe et que la vie me pèse,
Je vous vois tous les deux danser au Gad Eden,
Cela m'apaise un peu.
Oui,on peut mourir de chagrin, mais je suis restée en vie car j'ai fait une promesse
La vie est un cadeau.
On ne refuse pas les cadeaux de l'Eternel.
Je suis devenue ce que je suis encore,
Autrement maintenant,
Mais comme ton papa,
Fidèle à la parole donnée, l'honneur, à notre pays jusqu'à ma fin.
Je n'avais rien à perdre, j'avais déjà tout perdu
Alors on m'a alors enseigné le prix de la vie, de la mienne et des autres
Et j'ai compris que la vie n'avait pour nous pas de prix.
J'ai agi toujours avec rigueur, discipline, violence parfois s'il fallait,
je n'ai jamais hésité un seul instant,
Dure, froide, déterminée, endurante je n'ai jamais crains l'effort ni les défis,
La vie ne tient qu'à un fil. Je crois qu'il était solide
Je ne me suis rien épargné
J'ai enduré la douleur
J'ai dépassée toutes mes peurs,
Trop souvent mes limites, pour aller au delà de moi même
Sûrement pour expier de vivre encore,
Transgresser les interdits sans me retourner. jamais, sans êtat d'âme aucun.
Il fallait.
Mon Enfant, mon petit Sabra sois fier de tes parents.
Ton papa est tombé au combat pour défendre sa Terre, notre Terre pour que toi, tous les enfans d'Israel aient le droit de vivre en pays chez eux.
Nous avons été de bons Juifs, de bons soldats, de bonnes personnes je crois.
Ton père était croyant élevé dans la Foi Séfarade,
Moi je n'ai rien reçu, mais je crois en Hashem et je prie,
je récite les prières que m'a apprises Ima ta grand mère,
Nous nous aimions profondément
Elle m'a enseignée ce qu' "être une femme Juive"
Ce que je n'ai jamais cessé d'être.
Je t'aime mon Fils, tu es l'ainé de mes enfants; ils savent qui tu es, leurs pères aussi l'ont su
Tu as deux soeurs et un frère. Une autre petite soeur aurait du venir au monde..
Rassure toi mon Enfant, mon Petit Sabra, mon Amour, mon Tout Petit, mon Coeur
Ma vie n'est pas triste même si les fissures de mon âme laissent s'échapper des larmes de sang
Chaque année je célèbre ton anniversaire, ce jour béni où tu as fait de moi une mère, ta mère qui t'aime au delà de tout pour l'étenité.
Sache mon Amour d'enfant,
Mon tout petit que tu vis en moi,
Vous vivez ton père et toi en moi,
Chaque fois que mon coeur bat
Je pleure en y pensant,
En écrivant ces lignes.
Je remercie D.ieu d'avoir été aimée de ton père.
Mon Gibbor,
D'avoir été sa "Neschama"
De t'avoir porté et mis au monde
Ce bonheur a été trop court
Soyez benis.
Mais il a été. BH
Que vos mémoires soient sources de bénédiction
Yehoudit..
A toi mon fils, à toi mon Epoux.
Crédit photo @brigittedusch, archives privées : carte postale de Messada adressée par mon époux de jour là (pour ceux qui savent )