Psychanalyse Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

dimanche 8 juin 2014

Dérapage

Un billet d'humeur
Une réaction à l'actualité
Une colère face à la haine, la stupidité mais aussi et surtout la perversité
Celle d'un homme qui dérape, qui sort du sillon, du chemin pour dire, sous forme de plaisanterie, sous une bonhomie sidérante et effrayante. Dire en toute impunité les mots de l'horreur
Alors dérapage ?
Terme employé pour minimiser, euphémisme pour masquer l'indécence et l'immonde
"Mais ce qui est dit est dit", disent les enfants. "Donner c'est donner, reprendre c'est voler"
Comme ces aphorismes raisonnent et résonnent
Comme le son de ces mots est juste
Donner du sens, offrir au peuple sa haine en partage, signe d'amour, d'alliance et de ralliement ?
Puis reprendre les mots, les mots échappés ? Non même pas, les mots assénés, en toute conscience, connaissance !
Alors de qui se moque t-on ?
Nous le savons, mais qui ose le dire ? Qui ose dénoncer cette intolérance au nom de liberté de tout dire, de tout moquer, de tout tourner à la dérision qui n'est que déraison ?
Mais pas tant que ça, chaque mot est pesé, sous pesé, sur pesé. Dixit
Chaque mot est étudié, mis en scène et en acte. 
Nous voici devant l'horreur qui se clame et se déclame devant des spectateurs, outrés,ravis aussi, qui entendent tout haut ce qu'ils disent aussi peut-être, mais surtout ce qu'ils pensent sans oser le dire. Le mal ainsi libéré peut se propager
Ouvrir la boite de Pandore !
Boite à milice, et poubelle de la pensée meurtrière, celle de la non reconnaissance de cet autre, intoléré car intolérable encore
Mots pervers, perversité du mal, banalité du mal, mal de la banalité
Affront, humiliation, insulte, violence...
Mal, pulsion de destruction et de haine, instrumentalisation de la bêtise et de la crédulité de ceux qui ne savent penser par eux mêmes. Pour qui le mal est une jouissance, un désir, le seul qui les fait vivre !
Honte, mais qui s'en soucie ?
La perversion comme la pornographie a un nouveau visage, une nouvelle voix et une nouvelle voie, le chemin de la haine est souvent plus simple que celui de la sagesse, qui demande une tenue impossible quand il n'y a plus de cadre ni de limites
Quand tout ce qui fait le lien social, ce lien tenu mais qui justement doit être maintenu explose, vole en éclat.
Quand la Loi ne remplit plus le rôle que le sujet attend
Quand tout fout le camp... Nous avons ça !

Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne.

dimanche 1 juin 2014

La nouvelle pornographie

Pornographie... Moderne ? Nouvelle ? Quid ?

Serait-ce cette nouvelle manière de se mettre en scène et en actes de se montrer à voir à l'autre, autre qui paradoxalement n'est pas, n'existe pas, est gommé, rayé du champ de l'autre, de son espace ?

Cet autre là, témoin de l'exhibition, de cette représentation de soi obscène et sans limite, témoin malgré lui la plupart du temps. Spectateur pris en otage ? Ou spectateur complaisant, qui malgré tout se repait de cette image qu'il n'a pas sollicitée ? Mais qui lui est montrée à voir de plein fouet.
Supporte ? Ou non ? Mais qu'importe ?

Témoin involontaire et victime ?

Non voyeur il se doit de supporter l'image qui lui est renvoyée. Supporter. Il en est le support envers et contre tous.
Alors quid de ce besoin de montrer, à voir, à entendre, de se montrer dans le plus simple appareil, dans sa nudité crue, celle du corps, mais aussi et surtout celle de l'âme, dénué de pudeur, de cadre et de limites, dénué de tout, de bon sens commun, de sens commun tout court, dé noué ? Car dans toute pornographie il y a de l'indécence, de l'obscénité, de l'immoralité, de la grossiéreté, de l'indignité.

Quid de ce besoin singulier de se mettre en scène, pour être et avoir, avoir l'être qu'on voudrait être peut-être ou qu'on voudrait avoir à donner à l'autre, qu'on implique, qu'on met dans le coup... Sans même lui demander son avis.
Pornographie partout, à la ville, à la campagne, à la plage et dans la rue;
Seul au monde. Seul en Eden ? En ce paradis perdu... Peut-être ?
Peindre, écrire, décrire, c'est l'éthymologie grecque qui le dit. Mais il y a aussi la tolérance, ce qui n'est pas dit. La tolérance, un peu comme la maison, lieu clos... où ce qui est peint, écrit et décrit peut l'être..
Lieu clos, maison close de la monstration à l'autre, qui pénètre l'intime et l'intimité car il en est l'invité, car il y est invité ?

Il est donc encore question de soi, et de l'autre, de l'autre et de soi, de cette relation impossible, intenable souvent, compliquée et complexe toujours, l'un ne peut être sans l'autre et réciproquement, l'un est l'autre, et l'autre et l'un. Couple infernal lui aussi... L'enfer c'est l'autre, mais on est toujours l'autre de quelqu'un qui à défaut d'être notre hôte est parfois un autre bien encombrant.

La pornographie : Cette nouvelle pornographie qui est d'infliger à l'autre une image de soi qu'il ne veut pas, qui ne l'intéresse pas. Lui imposer et s'imposer alors sans limite, sans la moindre éducation et sans le moindre souci de son existence. De la gène qu'on peut lui occasionner.

"Il se croit tout seul sur terre" lance un ado à propos d'un "autre" génant, bruyant "bref tout seul"... Car tout seul le pornographe se croit. Et c'est bien là que ça coince, que ça heurte, que ça cogne...
Tolérance, respect, limite, nous y voilà encore, et encore une fois.
Ce qui fait le lien social, ce qui fait que celui ci peut tenir, du moins rien qu'un peu, un tout petit peu, et pour que ce lien tienne il faut y mettre du sien, chacun du sien au moins un peu, rien qu'un petit peu.
La liberté toute n'existe pas, ne peut-être, sinon au risque de museler celle de l'autre. Des autres qui sont eux aussi.
Car la nouvelle pornographie n'est pas que sexuelle, elle est,tout simplement partout, perverse, détournée justement de son objet pour être montré à voir autrement et ailleurs. Il y a toujours de la violence. Celle de soi à l'autre, celle de soi faite à l'autre. Une violence infligée.
Une violence de tous les jours, banale, une fois encore et nous savons ce qu'est ce mal : Celui de la banalité, nous savons aussi ce qu'est cette banalité : Une forme insidieuse, sournoise, toxique et perverse du Mal.

Brigitte Dusch, historienne, psychanalyste.

mercredi 21 mai 2014

Le mal de la banalité

La banalité...
De ce qui est banal on ne parle pas, justement parce que la banalité ne vaut pas qu'on prenne cette peine là.
C'est : Ainsi, comme ça.
Alors pourquoi prendre la peine :
De remarquer, d'en parler, de souligner ?
La banalité, le quotidien, ce qui se fait, ce qui se dit sans prendre garde, sans marquer un temps d'arrêt pour le penser, penser pour simplement faire des liens ?
Le banal n'interpelle ni ne questionne !
Le banal est sans intérêt
Et pourtant !

La banalité du mal, le mal de la banalité.
Tellement banal qu'il est comme le parcours : banalisé, comme d'habitude, sans rien d'exceptionnel, sans rien qui ne suscite l'attention ou/et le regard. "Normal" !
Pire que la transparence peut-être, en tous cas tout aussi toxique, plus peut-être car si la transparence fait mal, la banalité est le mal.
Hannah Arendt soulignait l'importance de cet ordinaire qui faisait que le mal soit banal, à la portée de tous, sans prédisposition particulière. Le mal est la portée de n'importe qui, n'importe quand...
Alors pourquoi parler du mal de la banalité, puisque le mal est lui même banal ?

Peut-être parce que tout nous montre cette banalisation, cette trivialisation d'un quotidien qui ne devrait, ne doit pas être ordinaire.
Des actes posés, des agressions, des violences, des mots de trop et en trop, des mots qui font mal, qui blessent et qui tuent.
Des mots qui assassinent sourdement, insidieusement, qui sont dits, donnés, balancés comme autant de balles perdues dans un champ de mines, mine de rien, car l'auteur de ces/ses mots ne se rend pas compte de leur portée, il ne cible même pas, tireur aveugle mais toujours embusqué dans l'angle mort.
C'est pour cela qu'il ne rate pas son coup, et il ne tire pas à blanc.

La perversion se loge peut-être là, dans cet angle là qui s'il est mort, ne l'est pas tant que ça, mais en tous cas ne se voit pas, car il est banal. Lui aussi.
Il a toujours été là, tellement là qu'on ne le voit pas.
Qu'on ne le voit plus, qu'on ne le devine pas, qu'on ne l'imagine pas.
On se dit qu'après tout ça, après ces devoirs de mémoires, aprés ces cours d'histoires, ces livres,témoignages, romans,essais,articles, émissions, films ..
Après tout ça, plus jamais ça ! Et pourtant ce "ça", cet immonde "ça" ce "ça" immonde est là, toujours là et ne rode même plus, mais s'affiche partout, sur les réseaux sociaux (vaste terrain de chasse, espace libre et lubrique où la perversion et la perversité peuvent donner libre cours à toute leur expression ) sur les affiches, tags, propos, lapsus, dessins etc...
Ils sont partout ! Mais qui sont-ils ?...
Qui se cachent la plupart du temps derrière le masque du mal, qui s'offre et offre cette mascarade ? La mal, monstre qui rode et qui s'infiltre au quotidien, lentement, on ne le voit pas venir, on ne l'entend pas, on ne le sent pas prendre possession du corps, du corps social pour tordre et délier le lien social.
Le Mal est au coeur de l'homme, ce n'est hélas pas nouveau, la banalité du mal non plus, le monstre sommeille et ne demande qu'à se réveiller.

Mais ce mal de la banalité ? Ce conditionnement, habitude, cette indifférence qui fait toute la différence. Ce mal de la banalité qui pour être combattu demande au lien social d'être liberticide ? Pour protéger, protéger du mal, de la banalité de ce mal devenu banal ?
Comment faire pour que ce ne soit plus une évidence ? "En usage"... ? Comment être vigilant devant ces banalités, lieux communs et dits. Mots dits et de travers ? Pour traverser l'interdit qui se transgresse si aisément que le sujet ne réalise qu'à peine qu'il a franchi la ligne jaune, terrible frontière qui l'emporte vers... ? Vers ?
C'est peut-être cette facilité là encore une fois qui interpelle et que nous nous devons de convoquer.
Banalité du mal qui engendre et génère le mal de la banalité ?

Brigitte Dusch, Historienne, psychanalyste.

dimanche 11 mai 2014

Tout de suite ! 3

Et les enfants ?

Et les enfants dans le "tout de suite", l'immédiateté ?
Une bonne question ?

... Maintenant, tout de suite, satisfaire le désir immédiat immédiatement et parfois aller même au devant de ce désir là, tuant dans l'oeuf ce possible désir qui n'a eu le temps ni de voir le jour, ni de s'exprimer.
Au devant, pour qu'il ne manque pas, éventuellement.

Ah cette peur de manquer...

Manquer soi même au risque de manquer l'autre, de manquer de l'autre... Au risque de se manquer ?

Alors pour l'enfant, roi de la famille, du monde et de la planète, nous le savons tous, rien n'est trop beau !
Un espèce de "no man's land" de "no limit", car cet enfant là, précieux oh combien ! Il faut qu'il ne manque de rien !
Il lui faut "Tout".

Dans de précédents articles je me suis longuement exprimée sur ce "tout de suite", sur cette attente qui comme parfois le silence est devenue insupportable.
L'immédiateté qui satisfait le désir tout de suite, si désir il y a . Envie, pulsion..Je veux !
"Je veux" : Justement !

L'enfant qui veut ; ce jouet, ce jeu, ce bonbon, cette friandise et qui s'il ne l'obtient pas dans la seconde, ne comprend pas ! Alors il exprime cette incompréhension en une colère, des pleurs, des cris mettant dans l'embarras des parents honteux de ne pas avoir su répondre et assurer le bien-être de leur rejeton !
"La frustration aide au développement" nous enseignait-on en psycho infantile !
Ne prenons pas cet aphorisme au pied de la lettre, mais au contraire développons en l'argument.
Frustrer, repousser, différer, refuser, dire non ! Tellement difficile, parfois voire même impossible !
Dire non ! Dire pas tout de suite, chaque chose en son temps.
Dire non est frustrant peut-être davantage pour celui qui doit le dire. Dire non serait-il alors le constat d'un échec ? Celui de ne pouvoir donner ? Offrir ?
Dire non : C'est risquer, se risquer à...
A quoi ?
A perdre l'amour de l'autre ? De l'enfant qui menace : "puisque c'est comme ça je ne t'aime plus, tu es méchant..."
Ne pas oser de peur de perdre...
Cette perte là ? La peur de cette perte là, de cet amour si mal habile qui ne peut se frotter aux "habilités sociales" sans le risque de se perdre, de se dissoudre ?
Amour fragile ? Perte impossible ?

Ne pas tout permettre, délimiter un cadre, ce qui est, ce qui n'est pas, ce qui se fait, ce qui ne se fait pas.
Attendre.... Il y a un temps pour tout !
Nombre de parents me disent : "Il est impossible, n'écoute pas, ne reste pas à table, fait des colères..."
Et de décrire de vilains petits monstres désobéissants, colériques et insultant des parents démunis devant des situations devenues ingérables...
"Je l'ai trop protégé... c''était le petit dernier,( ou le premier)... Je veux lui donner ce que je n'ai pas eu...Je veux qu'il ne manque de rien... Je veux qu'il soit comme tout le monde...Qu'il ait ces chaussures à la mode... etc..."
Excuses, explications, ré assurance... Pour ! ?

Manque encore, manque qui se transmet, parfois seul héritage et lourd fardeau qui se traine de générations en générations.
Aimer n'est pas tout donner, tout accepter, tout permettre !
Ne pas oser dire non par peur de ne plus être aimé, d'être quitté..
Alors ?
L'enfant, nous le savons, mais peut-être pas encore assez, a besoin d'être rassuré, d'avoir un cadre, des certitudes, des limites.
Il doit le savoir, les adultes sont là pour ça, pour éduquer ce "petit pervers polymorphe".
Lui donner une éducation, ce code nécessaire au lien social. Sans le quel il ne pourra évoluer sûrement, sécure et confiant ! Sans lequel il ne pourra vivre parmi ses semblables, accéder à.

L'amour s'il est essentiel ne suffit alors pas, il a besoin de ce cadre là, de cette éducation là de ces limites qui doucement mais sûrement doivent être posées.
Le" non" est non seulement nécessaire mais indispensable..
Essentiel à l'adulte en devenir !
Comprendre qu'on n'obtient pas tout tout de suite; qu'il faut du temps, pour apprendre, réussir.
Lorsque le net, la télévision n'existaient pas, les enfants jouaient... Quand même ! et heureusement
Jeux de société, histoire, lectures, soirées au coin du feu, avec les parents, les amis..
Dans les cours de récréation on jouait à la marelle, on faisait des rondes et chantait "'bonjour ma cousine..."
On apprenait à prendre le temps, à s'offrir le temps, à remettre cent fois sur le métier son ouvrage.
Mais de nos jours, il faut satisfaire le moindre désir de l'enfant tout de suite ! Les publicités regorgent de ces enfants tyrans et insolents exigeants des marques de yaourts ou de biscuits devant des parents terrifiés et ridiculisés.
Une bonne fessée ! me dit un jour un ami agacé par ces stupidités !
Eh oui, ce monde qui laisse à penser et montre à voir que tout est possible, tout de suite maintenant n'apprend rien et n'aime pas ! N'aime pas l'autre
L'autre qu'il soit enfant, adulte ou adolescent se voit alors relégué au rang de client potentiel générant un possible chiffre d'affaires !
Car c'est aussi ce paramètre là qui entre en ligne de compte, l'argent que ces possibilités de satisfactions immédiates rapporte aussi... Tout de suite !
Faisant fi de la qualité, des valeurs,de l'éducation, de la transmission...
Oui, il faut s'en inquiéter, que dis-je ? Oui, il faut réagir et s'élever comme on peut contre Ces injonctions, ces dicktats d'une société malade aux frontières de la folie !
Comment l'enfant peut-il apprendre à écrire, compter, lire .. Vite ! Immédiatement, comme le voudraient leurs maitres et l'espèrent leurs parents.
Il faut après l'école courir à la musique, au chant, à la danse, au judo ou à la salle de gymnastique ? vite, encore vite
Plus le temps de vivre, de respirer, de voir, de sentir... Tout, tout tout de suite !
Pause ! récré !
Oui, inquiétons nous et prenons le temps de vivre, de prendre le temps et de l'offrir à ceux qui nous entourent
Apprenons leur que tout ne s'obtient pas, ou pas toujours, pas immédiatement en tous cas, qu'il faut des années et des années, du travail et de la persévérance pour devenir grand !
Qu'il faut apprendre la patience, qu'un simple clic ne fait pas de l'enfant un enfant heureux
Que regarder la nature, apprendre le nom des fleurs, des arbres et des oiseaux est une infinie richesse !
Que la vie, si on prend la peine de la vivre en prenant le temps de s'arrêter est un réel cadeau
Offrons cela à nos enfants. Le plus beau des cadeaux peut -être ?

Brigitte Dusch, psychanalyse, historienne.

jeudi 8 mai 2014

Poiesis

Création singulière pas vraiment ordinaire, pourtant.
Des mots qui sonnent et qui dansent ?
Oui, c'est cela une valse, un tango, langoureux parfois...
Un tourbillon, des vagues, un souffle de vent
Un léger bruissement
Mais ça parle
Poésie, celle des mots et celle du coeur, celle de  ?
L'âme, anima est ?
Mais ce sont peut-être les mêmes ?
Des mots qui bougent, des mots qui parlent, des mots en mouvement, qui s'enroulent et se déroulent, tourbillonnent, trois petits tours, s'en vont, reviennent ici et là.
Reviennent se poser là ?

Il y a mille et une façons de dire ou de ne pas dire
Car la poésie, si elle parle, parle aussi du silence
De ce mouvement suspendu dans le temps, cette parenthèse qui ne s'achève jamais qui suspend le temps dans son envol, qui lui vole pour un temps juste un moment
Un moment de ravissement.
Le silence qui se dit et qui dit
ce qui ne peut  advenir autrement !
Rapt... Ravir... Prendre... Surprendre... Méprendre... Comprendre...

Création singulière pas toujours ordinaire
Loin des alexandrins, des rimes,
Faire exposer le cadre, le faire valser en éclats.
Et c'est un rythme, une danse, un tango, une valse, une salsa
C'est le coeur qui bat, qui s'agite, qui tremble et qui palpite

Poésie singulière
La parole habite et rend vivant, la parole qui fait que l'homme habite et son corps et le monde,
C'est cette même parole qui le fait advenir au monde des vivants.
Qui le fait naître une fois encore !

Parler à l'autre et lui dire instaure ce lien terrible, cet engagement, cette promesse qui unit celui qui dit à celui qui entend pour un moment, un court instant peut-être de l'éternité.
Qui l'unit à jamais, à toujours.

Magie des mots, magie de l'âme. Ame es-tu là ? Où te caches tu ? Te loges tu ? Indicible et impalpable secrète et mystérieuse, légendaire et immortelle.
Ame ? Anime toi.
Es-tu ce qui ne se voit pas, de se dit pas, mais qui ne succombe pas ? Es-tu au delà de tout et survit peut-être quand nous ne sommes plus tout, et que nous avons rejoint ce tout ?
Tout à fait là ?
Mais où ?
Oui, où sommes nous alors ? Vers quel nouveau continent peut-être pas si obscur sommes nous partis ? Pour un nouveau voyage ? Un voyage sans fin ni sans retour, pour nous fondre encore et encore dans l'infini et l'éternité
La poésie création infernale nous survit alors peut-être ? Mais qu'en savons-nous ?
Trace sur le sable que les vagues submergent peu à peu, pour ne plus rien laisser  à voir à l'autre qui reste seul devant le miroir. Quelques traces, empreintes de pas, qui passent, repassent ? Simplement de passage, nous qui ne sommes pas si sages ?
Miroir sans tain, miroir éteint..
Peut-être ?
Poiesis.

Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne.

mardi 29 avril 2014

SMS SOS

Une nouvelle forme d'écriture, texto, SMS, quelques mots d'amour ou pas tapés du bout des doigts et lancés à l'autre à la vitesse de l'éclair. "Presque plus vite que son ombre" plaisante un jeune patient.
Quelques mots, quelques lettres qui signifient des mots, une sorte de code, de signes que seuls les initiés peuvent comprendre, lire, déchiffrer le sens.
Une nouvelle forme de langage, de transmission, une nouvelle manière de dire à l'autre, vite, de communiquer, d'être avec.
La langue, ce qui fait le lien. Une langue qui parle et qui se parle, une langue qui s'écrit, qui se dit sous forme de messages instantanés. Une sorte d'ici et maintenant à l'autre qui est ailleurs au même moment.
Ecrire c'est aller au bout de sa pensée, c'est prendre un certain recul, c'est s'approprier et donner à l'autre pour le mettre dans le coup, ou donner à soi même lorsqu'on rédige son journal intime par exemple. Prendre et mettre de la distance entre soi, ses émotions, ses perceptions, ses états d'âme.
L'immédiateté induit un rapport autre, un autre rapport ;  à l'autre, à soi. Ce tout de suite sidérant remplace la réflexion, la relecture... Provoquant par là une autre forme de lien social, une autre langue, un autre appel, une autre réponse, un autre questionnement.
Une langue qui convoque la langue ?
Un être à la langue qui interpelle.

Ecrire comme on parle, parler comme on écrit. Une discussion avec un ami à propos d'un texte illible et incompréhensible tant il y avait de fautes de syntaxe, d'orthographe, de style m'amène à cette réflexion. Que devient la langue ? Triturée, torturée, tordue et malmenée. De tous temps elle s'est adaptée, modelée, modifiée, c'est le propre de la langue, il faut inventer, créer des mots, créer de la langue à parler et à écrire, des mots à dire. La langue crée des mots qui créent et recréent le langage, celui de l'homme et structure sa pensée qui restructure la langue.

Les mots évoluent, perdent ou prennent du sens, tombent en désuétude, ne veulent plus dire la même chose. L'histoire du mot est passionnante, il est le témoin de son temps, l'explorer permet de comprendre la pensée des hommes qu'il a habités et qui l'habitèrent.
Le mot va comme il vient, vient comme il va, au gré du vent, au gré de l'eau, porté par la vague pour nous dire encore et encore au delà du temps. Le mot est immortel, éternel, le mot ne meure jamais. Malgré tout. On tue la langue, l'enferme et la torture, mais le mot git au fond des âmes, prêt à surgir, à s'ériger pour clamer la liberté.
Le mot, ces mots écourtés, malmenés, amputés, dépecés, dépossédés, disséqués, disloqués, désarticulés sont-ils créateurs ? Créateurs de quoi ? Ou bien au contraire sont-ils les bourreaux, les tortionnaires de cette mise à mort programmée d'une langue condamnée par une société qui ne s'y retrouve plus, qui ne s'y reconnait plus. Une mise à mort de la langue ? Une destruction qui déconstruit brutalement ce que les siècles du passé on édifiés ?
Cette négation là n'est-elle pas une rebellion contre un ordre haï, détesté, impossible à tolérer, n'est-elle pas un rejet ? On se demande.

Une affirmation qui devient une interrogation. Langue morte ? Lettre ouverte ? Ou fermée sur un sens interdit, une impasse qui ne débouche même pas sur le vide, mais sur un Mur infranchissable, celui du Nom dit ? Un mur d'incompréhension, tour de Babel moderne qui désunit et délie ce qui pourtant semblait cohérent... Et qui ne l'est pas, pour ceux délaissés et qui délaissent ce qu'ils rejettent.

Penser autrement. Le SMS modèle la pensée, sa structure cognitive, sa forme ; Certes la science pourra nous propsoer des explications savantes, rationnelles et raisonnables, est-ce suffisant ?
Mais quelles représentations inconscientes ces lettres, signes assemblés véhiculent, transportent dans l'imaginaire, l'imaginé ? que symbolisent ils ? Que symbolise t-on à travers eux ?
Une nouvelle forme d'écriture et de dire, de communiquer à l'autre, l'instantané, la photo d'un mot qui ne laisse qu'une trace fugace et furtive qui ne prend son sens qu'au présent. Un peu comme ces épigrammes, instantanés du XVII° siècles vers et bons mots pour louer les largesses et la beauté de ses mécènes. Mais il y avait de l'art, une esthétique du compliment. Mais nous ne sommes plus au temps de Bensèrade hélas !
Peut-on trouver de la beauté dans ces textos, ces tags de la langue, cette forme structurale nouvelle qui se tague rageusement sur les portables, sur le net, mais aussi sur les copies que les élèves rédigent.
On parle comme on écrit et on écrit comme on parle, confusion des registres qui ne se soutiennent ni ne se tiennnent plus car ils ne sont plus soutenus que par la trivialité de l'instant saisi au vol. Sans lendemain, sans hier, ils sont à peine présents qu'ils sont déjà effaçés. Ecriture qui s'inscrit en faux, de l'orthographe, de la syntaxe et de la grammaire. Mais quid de tout cela ? Remisés au fond des placards car désormais inutiles ? Qu'est alors devenu le nécessaire pour écrire ce nécessaire essentiel à la vie. Faute de goût, de sens et d'orthographe. Fautes ? Est-il bien question de cela ? Mais là il ne s'agit pas de fautes, nous ne sommes plus dans ce registre, ce langage est incompréhensible,  il ne peut être compris par les autres (non initiés) à moins que ceux ci ne fassent un "effort" ce qui entraine à plus ou moins longue échéance une séparation, une division puis une rupture du lien social. Une fracture même.
Il y a alors du manque, celui de savoir écrire, vivre et dire, être aux autres. Ce manque de ne pouvoir exprimer ce qu'on ressent. Et c'est terrible, c'est une violence, aux autres et à soi même. Il y a une perte. Mais laquelle ? Une perte de transmission, mais que transmettre quand on n'a que rien d'autre que le vide. Et c'est ce vide qui est inquiétant, car on ne construit rien sur du vide.

L'écriture a une fonction de transmission, de laisser trace, d'adresser un message ; celui d'aujourd'hui qui sera le passé de demain, la mission de poursuivre, de continuité aussi, mais quel legs offrira cette langue formée sur la déconstruction des mots et leur destruction. Que propose t-elle ? A quoi donnera t-elle naissance ?


Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne

Je dédie ce texte (entre autres) à mon ami Régis Ollivier.
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Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

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