Tu... Tue ! Dois.. Devoir.
L'injonction est un ordre, un commandement, qui ne se discute pas.
Enjoindre de faire, de payer, de dire, d'obéir. Contraindre, forcer, obliger.
Injonction thérapeutique, paradoxale.
Un ordre formel qui ne peut et ne doit être contourné et transgressé. L'injonction d'enjoindre
Dans un dernier article j'évoquais le mal dit, ce mal qui est dit sans détour. Au cours de la conversation. Sans souci de savoir qu'elle sera la répercussion des mots dits, prononcés.
Ces mots qui s'avèrent au cours du discours une condamnation à mort, une injonction de.... Ne pas vivre, donc mourir.
Il y a des mots et des maux qui sont par essence des injonctions
Qui privent d'espoir, de vie, d'en vie.
Diagnostic et pronostic ! On ne marchande pas, c'est le dernier prix.
Pourtant ; qui a le droit ? Et surtout qui sait.
Ces mots soulèvent un questionnement permanent, sans réponse non plus. Bien que ! A force de constater les ravages de ces mots sauvages, ces mots assénés trop brutalement, certains services mettent en place ce qu'ils nomment pudiquement "consultation d'annonce"
Annonce. Euphémisme ? Comme s'il y avait un art et une manière de dire. "Vous avez ceci ou cela"
Vous avez, nous y voilà.
Avoir. Vous avez et par conséquent vous êtes. L'avoir de la maladie fait de vous un être malade.
Un mot et le sujet devient l'objet de son mal, la chose de la médecine un numéro de dossier avec une pathologie au nom barbare et savant
Nous savons tout ça ! Nous déplorons tout ça. Vous, Je, ainsi ce nous.
Ces mots, ces ordres qui ne laissent place à aucune faille pour un discours autre, pour celui du sujet qui justement n'en veut pas. Ces mots assassins qui tuent avant même que le mal fasse son oeuvre ! Mots qui tuent le désir, qui ne laissent place pour rien d'autre qu'une pensée unique, celle de celui qui décide pour tous. Totalitarisme de la pensée, encore. Unité, unifier, ne plus voir qu'une seule tête. Plus de place pour la singularité. Dangereuse et rebelle qui vient plomber les statistiques qui démontrent que. Cela doit être ainsi et pas autrement.
Dénoncer alors ces protocoles où ne rentrent que les sujets conformes, pouvant prouver l'efficacité ou la non efficacité... Sauf que c'est penser une fois encore que : Chaque sujet est unique.
Cette unicité qui fait de lui sa force lui permet d'échapper aux statistiques qui ne sont que des chiffres et des graphes qui ne veulent rien dire de plus que l'injonction du moment.
Vous devez être mince, avoir confiance en vous, décider de votre vie, faire le bon choix, trouver le bon partenaire, élever vos enfants, être de bonne humeur, sourire, accepter tout cela, sans rien dire, surtout sans vous rebeller.
Faire semblant, accepter et courber l'échine. Se résigner, se dire que de cette maladie on n'en réchappe pas, le médecin l'a dit, le grand professeur aussi. Sauf que ! Qui sont-ils ces gens pour affirmer ça ? De quel droit se donne t-il celui de vie ou de mort sur un sujet ?
Ces scientifiques qui raillent les astrologues et les voyants ? Mais ils sont mille fois pire ! Car ils jouent sur la peur et le pouvoir qu'ils imposent à ceux qui les consultent tremblant de peur et plaçant leur espoir dans les quelques mots que ces "pontes" lâcheront avec parcimonie...
On ne leur demande pas de mentir, simplement d'être humain ! Encore trop difficile pour certains. S'ils ne contrôlent pas leurs émotions, leur peur, est-ce le problème du patient ? Du malade car il faut bien l'appeler par son nom ?
Mais il en est de même pour ces enseignants, instituteurs, professeurs, conseillers en tout et rien qui d'un seul mot, d'une seule observation sur le carnet scolaire biffe l'avenir professionnel et l'avenir tout court d'un enfant !
Comme s'ils savaient. De ces enfants blessés et meurtris par ces injonctions, j'ai souvent entendu la souffrance et la douleur. Celle d'être des "bons à rien"... Le maitre là dit. Mots assassins encore.
Et d'apprendre à ces enfants, que ce mal dit n'est pas une mal ediction comme les paroles de la méchante fée dans les contes. Qu'ils ont le droit de ne pas y croire, que c'est même un devoir.
Ne pas y croire pour croire en autre chose, en béné diction, ce qui est bien dit, ce qui est dit,ce qu'on se dit. Maudire et bénir, mal et bien ; encore, et ce n'est pas aussi simple, nous le savons
Mais ce qui est dit n'est pas immuable, il reste au sujet au moins un soupçon d'espoir. Juste ce qu'il faut pour qu'il soupçonne qu'il peut, changer, faire, agir être acteur de cette part essentielle qui fait que sa vie n'est pas le destin que les autres ont choisi pour lui
Car nul n'a ce droit, nul n'a ce pouvoir, nul ne peut...
Espoir ! Désir ! Envie... Pour rester, et être en vie.
Britgitte Dusch, psychanalyste, historienne.
L'Etre humain est unique, chaque rencontre est unique, c'est un éternel recommencement, une aventure nouvelle à chaque fois
Psychanalyse Aujourd'hui
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne
Accompagner le désir d'être Soi
"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir
Mon livre : "j'aime ma vie"
jeudi 7 août 2014
dimanche 27 juillet 2014
Le mal dit 1
Mon dernier article a suscité des commentaires sur certains réseaux sociaux et c'est tant mieux ! Je ne peux y répondre en 140 signes cela me semble un exercice un peu difficile, alors je vais tenter en quelques lignes quand même, d'apporter quelques éléments, non de réponse, mais peut-être de réflexions prolongeant les interrogations.
En effet l'annonce d'un diagnostic se révèle toujours une épreuve, parfois un soulagement : Enfin un mot pour mettre sur tous ces maux. Une explication qui rassure car "je ne suis pas fou"..
Comprendre, faire des liens, associer. Savoir, car il faut bien quand même savoir !
C'est de soi, de sa peau dont il est question...
C'est essentiel, mais ça ne suffit pas, car il faut à présent faire avec, avec ce mot, inconnu, absent de la pensée il y a quelques instants.
Ce mot qui bouleverse, qui transforme et qui tue parfois ! Aussi !
Tumeur... Tu meurs !
Injonction infernale !
Un seul mot qui suffit non seulement à envahir l'être mais à le bousculer, le renverser, le déséquilibrer, car après une telle annonce, plus rien ne pourra désormais être comme avant.
Tous les cliniciens ont décrits les différentes étapes, de cet accueil singulier et extra ordinaire qu'est celui de la malade, des émotion, états d'âme, ce que je nomme une "crise"
Car c'est bien de crise qu'il s'agit, une crise qui se constitue dans le quotidien du sujet qui se sachant mal, se sait à présent malade !
Un pas est donc franchi... Brusquement, parfois ! Mais ce pas ne donne pas forcément accès au pire, même si c'est ce pire qui arrive aussi brutalement à l'esprit.
Comme je l'ai écrit, cancer, malgré toutes les avancées de la médecine signifie encore dans bien des esprits (grand public mais aussi médecins hélas) une condamnation à une mort certaine, lente, douloureuse, pénible.. Un parcours du combattant, au mieux, car le soldat s'il combat, ne se rend pas forcément sans avoir épuisé ses ressources ni tiré sa dernière cartouche !
Et c'est là que se situe la différence, je crois.
Nul n'est forcé de se rendre... D'obéir à l'injonction qu'est cette condamnation mal nommée encore, mais pire sous entendue.
Injonction, condamnation à mort.
Etre positif n'est pas possible m'écrit-on ! J'en conviens c'est difficile, voire impossible ! Comment être positif en sachant que le couperet peut tomber ! Va tomber, penser ça à chaque instant... Mais nul besoin d'être malade pour mourir ! Et qui sait quand ? Comme me disait un patient "voilà, je sais que la mort est au bout, mais je n'ai rien appris de nouveau, car ça je le savais déjà.. "
C'est peut-être ça le plus difficile, être brutalement confronté à sa propre mort, sa propre finitude, qui est le lot de chacun, mais comme l'écrit Freud, l'inconscient ne connait ni le temps ni la mort, et l'homme se pense immortel ! Alors l'annonce fait figure de rappel, nous place face à l'épreuve du Réel qui est sans appel !
L'homme est mortel ! La mort, sa mort impensée et impensable... Comment faire avec ça ?
Pourquoi penser la mort alors qu'on est en vie ? Pourquoi ne pas se penser en vie, avoir cette envie... ?
Etre positif semble en effet bien dérisoire face à ce danger, face à cette menace, brandir cette étincelle d'espoir, cette injonction aussi peut-être indécente, ridicule et grotesque, pourtant ! Conserver une lueur d'espérance ne peut qu'aider, soutenir le désir.
Se battre ! Souvent le langage guerrier est de mise, une lutte s'engage entre soi et l'intrus, celui qui squatte le corps, pour en déposséder le sujet, faire son lit, son nid dans ce lieu pour mieux y déployer la mort ! Trahison, le corps lâche, accueille cet ennemi, collabore et ne résiste pas ! Engager un dialogue, faire des compromis ? Mais lesquels ? L'un veut la peau de l'autre ! L'un l'aura, l'autre pas !
Une sorte d'histoire dont certains affirment connaître la fin, une histoire qu'il convient pourtant d'écrire, en laissant chacun d'y inscrire sa fin, comme il la souhaite, comme il le désire.
Car qui connait la fin ? Qui sait quand l'histoire s'arrête ? Qui peut décider de ça et dire ça ?
Résister n'est pas seulement se battre les armes à la main, il y a les combattants de l'ombre eux aussi, tout aussi efficaces.. Ceux qui usent d'autres armes, d'autres outils, car tout est bon dans ce combat là, dans cet affrontement là. On fait feu de tout bois car c'est de sa peau qu'il s'agit, et qui mieux que soi peut savoir comment la sauver.. ? Laisser à l'autre, celui soit disant supposé tout savoir décider que ceci ou cela doit se faire, doit être... ? Lui laisser, lui donner se pouvoir là ? Démissionner alors de sa propre vie et en confier les rennes à un parfait inconnu qui hormis le nom de votre maladie ne sait rien ou si peu de vous ?
Que faire : Résister, combattre, se battre avec, apprivoiser l'intrus, s'en faire un ami, comprendre ce qu'il fait là, pourquoi soi, se laisser aller, laisser faire, attendre, avoir mal, culpabiliser, se fâcher, être en colère, démissionner, se taire... ?
Oui que faire ? Ce faire là est tout aussi singulier car qui va dire quoi faire ? Qui sait mieux ce qu'il faut faire, ce faut qui est la faux qui se profile au loin pour rappeler que le jour approche, ce dernier instant tant redouté mais qui disent certains malades viendra enfin mettre un terme à tout ça ?
Espoir ! Lequel ? Qui donne, transmet cet essentiel, fondamental sans lequel toute vie n'est pas possible, cet espoir là qui permet de vivre avec, d'être soi, simplement soi...
Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne.
En effet l'annonce d'un diagnostic se révèle toujours une épreuve, parfois un soulagement : Enfin un mot pour mettre sur tous ces maux. Une explication qui rassure car "je ne suis pas fou"..
Comprendre, faire des liens, associer. Savoir, car il faut bien quand même savoir !
C'est de soi, de sa peau dont il est question...
C'est essentiel, mais ça ne suffit pas, car il faut à présent faire avec, avec ce mot, inconnu, absent de la pensée il y a quelques instants.
Ce mot qui bouleverse, qui transforme et qui tue parfois ! Aussi !
Tumeur... Tu meurs !
Injonction infernale !
Un seul mot qui suffit non seulement à envahir l'être mais à le bousculer, le renverser, le déséquilibrer, car après une telle annonce, plus rien ne pourra désormais être comme avant.
Tous les cliniciens ont décrits les différentes étapes, de cet accueil singulier et extra ordinaire qu'est celui de la malade, des émotion, états d'âme, ce que je nomme une "crise"
Car c'est bien de crise qu'il s'agit, une crise qui se constitue dans le quotidien du sujet qui se sachant mal, se sait à présent malade !
Un pas est donc franchi... Brusquement, parfois ! Mais ce pas ne donne pas forcément accès au pire, même si c'est ce pire qui arrive aussi brutalement à l'esprit.
Comme je l'ai écrit, cancer, malgré toutes les avancées de la médecine signifie encore dans bien des esprits (grand public mais aussi médecins hélas) une condamnation à une mort certaine, lente, douloureuse, pénible.. Un parcours du combattant, au mieux, car le soldat s'il combat, ne se rend pas forcément sans avoir épuisé ses ressources ni tiré sa dernière cartouche !
Et c'est là que se situe la différence, je crois.
Nul n'est forcé de se rendre... D'obéir à l'injonction qu'est cette condamnation mal nommée encore, mais pire sous entendue.
Injonction, condamnation à mort.
Etre positif n'est pas possible m'écrit-on ! J'en conviens c'est difficile, voire impossible ! Comment être positif en sachant que le couperet peut tomber ! Va tomber, penser ça à chaque instant... Mais nul besoin d'être malade pour mourir ! Et qui sait quand ? Comme me disait un patient "voilà, je sais que la mort est au bout, mais je n'ai rien appris de nouveau, car ça je le savais déjà.. "
C'est peut-être ça le plus difficile, être brutalement confronté à sa propre mort, sa propre finitude, qui est le lot de chacun, mais comme l'écrit Freud, l'inconscient ne connait ni le temps ni la mort, et l'homme se pense immortel ! Alors l'annonce fait figure de rappel, nous place face à l'épreuve du Réel qui est sans appel !
L'homme est mortel ! La mort, sa mort impensée et impensable... Comment faire avec ça ?
Pourquoi penser la mort alors qu'on est en vie ? Pourquoi ne pas se penser en vie, avoir cette envie... ?
Etre positif semble en effet bien dérisoire face à ce danger, face à cette menace, brandir cette étincelle d'espoir, cette injonction aussi peut-être indécente, ridicule et grotesque, pourtant ! Conserver une lueur d'espérance ne peut qu'aider, soutenir le désir.
Se battre ! Souvent le langage guerrier est de mise, une lutte s'engage entre soi et l'intrus, celui qui squatte le corps, pour en déposséder le sujet, faire son lit, son nid dans ce lieu pour mieux y déployer la mort ! Trahison, le corps lâche, accueille cet ennemi, collabore et ne résiste pas ! Engager un dialogue, faire des compromis ? Mais lesquels ? L'un veut la peau de l'autre ! L'un l'aura, l'autre pas !
Une sorte d'histoire dont certains affirment connaître la fin, une histoire qu'il convient pourtant d'écrire, en laissant chacun d'y inscrire sa fin, comme il la souhaite, comme il le désire.
Car qui connait la fin ? Qui sait quand l'histoire s'arrête ? Qui peut décider de ça et dire ça ?
Résister n'est pas seulement se battre les armes à la main, il y a les combattants de l'ombre eux aussi, tout aussi efficaces.. Ceux qui usent d'autres armes, d'autres outils, car tout est bon dans ce combat là, dans cet affrontement là. On fait feu de tout bois car c'est de sa peau qu'il s'agit, et qui mieux que soi peut savoir comment la sauver.. ? Laisser à l'autre, celui soit disant supposé tout savoir décider que ceci ou cela doit se faire, doit être... ? Lui laisser, lui donner se pouvoir là ? Démissionner alors de sa propre vie et en confier les rennes à un parfait inconnu qui hormis le nom de votre maladie ne sait rien ou si peu de vous ?
Que faire : Résister, combattre, se battre avec, apprivoiser l'intrus, s'en faire un ami, comprendre ce qu'il fait là, pourquoi soi, se laisser aller, laisser faire, attendre, avoir mal, culpabiliser, se fâcher, être en colère, démissionner, se taire... ?
Oui que faire ? Ce faire là est tout aussi singulier car qui va dire quoi faire ? Qui sait mieux ce qu'il faut faire, ce faut qui est la faux qui se profile au loin pour rappeler que le jour approche, ce dernier instant tant redouté mais qui disent certains malades viendra enfin mettre un terme à tout ça ?
Espoir ! Lequel ? Qui donne, transmet cet essentiel, fondamental sans lequel toute vie n'est pas possible, cet espoir là qui permet de vivre avec, d'être soi, simplement soi...
Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne.
lundi 21 juillet 2014
Les pauvres gens
Les pauvres gens... Sans nom et sans grade...
Ce sont ces inconnus, anonymes de l'Histoire que je rencontre au hasard des recensements, des Archives, des actes, de naissances, de décés, de mariages. Bonheurs et tragédies, rires, chagrin et larmes à la mort d'un nouveau né... Nés de père inconnu, enfant légitime... ou non...
Héros d'une vie, d'un évènement sur le théâtre du quotidien de l'histoire, que l'Histoire n'a pas retenu, n'a pas convoqué pour écrire, pour s'écrire, mais pourtant.
Tout ceux qui ont fait le passé, le nôtre. Ces "gens de peu" comme les nomment ceux qui ont un peu plus, ou croit en avoir davantage. Ces gens nombreux qui ont animés et fait vivre les villages des campagnes de France, dansés, pleurés. Qui ont fait. Qui les ont fait.
Ces gens qui ont été.
Mes recherches me conduisent vers ces archives là, vers ces traces là, souvent les seules qu'ils aient laissées à une postérité qui ne se soucient plus d'eux. Mais le présent s'en est-il soucié ?
Qui sont-ils ? Laboureur, cantonnier, chef cantonnier, couturière, ménagére, menuisier, vannier, manoeuvrier... Des métiers qui n'existent plus et ne feraient plus vivre...
Hommes, femmes, enfants...Familles.
Les Archives sont vivantes à qui sait les lire, les décoder, les écouter pour leur rendre âme et vie. Les Archives sont la vie passées et renferment tant de secrets, de peines, de joies de bonheurs et de larmes qu'est la vie de chacun d'entre nous.
Travail de l'Historien encore. Partir à la rencontre de ces hommes, femmes, enfants et comprendre leur histoire, leur vie. Mettre en images, mettre des mots sur les images. Faire revivre ce passé pour le comprendre et peut-être mieux saisir ce qui a été pour expliquer ce qui est.
Depuis plusieurs mois je suis plongée dans ce début du XX° siècle, qui je le pense n'a vraiment commencé qu'en 1919, après cette guerre mondiale qui changea le monde, les hommes et les sociétés. Elle marque je crois un tournant fondamental moral et éthique, une articulation sur un monde nouveau où l'homme occupera une place différente. Elle réveille ce Thanotos endormi, ces pulsions de haine et de destruction. Le Mal a été libéré pour s'incarner quelques décennies plus tard, dans une violence inouïe, à peine pensable, imaginable... Où l'homme a montré le pire de lui même, la Bête immonde qu'il peut-être et devenir sans grand peine.
L'historien est le passeur, le témoin, mais pas le spectateur ! Il prend part à ce qu'il découvre, car ce qu'il voit, ce qu'il lit ne peut le laisser indemne. Il appartient alors au témoin de transmettre le message, de témoigner de ce passé qu'il vient de côtoyer.
Un rôle difficile et complexe car il se doit de rester neutre, sans être bienveillant vis à vis des événements, relater les faits et rien que des faits, ne pas juger mais analyser au prisme du contexte et tenter de penser avec l'esprit du moment, non le sien... D'une infinie difficulté, un exercice terriblement compliqué aux limites du possible. L'objectivité, comme l'ici et maintenant est la pire des ascèses. Ne pas se laisser envahir par ses émotions, son chagrin et sa peine aussi, sa colère, son parti pris.
Transfert, le transfert de l'historien existe bel et bien. Je lui avais consacré un chapitre dans ma recherche sur la duchesse de Longueville... Transfert et contre transfert, amour et haine.
L'histoire serait-elle aussi une question d'amour ?
Lire les Archives et l'histoire qu'elles nous racontent ne laissent pas indemnes, évidemment.
Alors que dire des pauvres gens ? Comment reconstruire leur histoire, leur passé, quelles traces, empreintes nous ont-ils laissés ? L'histoire de France et d'ailleurs s'intéresse aux monarques,princes du Sang ou autres Grands ne retenant les petits que pour comptabiliser la misère et les guerres, ce qui va la plupart du temps de pair. Pourtant ce sont bien ces armées de Pauvres gens, des villes et des campagnes qui ont bâtis le monde, à la sueur de leur front et de leur âme.
Que dire des pauvres gens ? Qui nous ont laissés peu de choses, avec bien de la chance, quelques lettres, un journal, les cartes postales.. Près de nous, un peu plus près quelques histoires qu'on transmets, légendes familiales qui parfois se perdent dans les méandres de la langue et des mémoires.
Que dire alors ? Comment écrire ? Comment construire ?
Partir de quoi ? Pour aller où. Si les Archives parlent, elles ne comblent pas le manque, celui de ce qui s'est passé, ce qui a été vécu. Il manque tellement de manques !
Que dire, que faire et que raconter à partir du manque, reconstituer un métier, un art, une vie est possible, mais la vie intime, l'intimité du quotidien.. Elle peut l'être également si nous disposons de suffisamment de matière ce qui est loin d'être le cas pour ces gens qui ne savaient pas écrire parfois.
Alors admettre qu'on ne saura pas, car Clio ne peut imaginer, écrire une fiction, elle peut au mieux supposer, poser des hypothèses.
Sans émotions... L'historien fait alors fi de sa propre perception, il ne peut rien dire de la mort de ce bébé de 2 mois... de cette femme morte le jour de la naissance de sa fille, ces prénoms identiques à celui du père de la mère ou du dernier né... Le psychanalyste comprend, relie... tente une approche mais l'historien ?
Il ne peut pas mettre de mots sur l'éprouvé, la tristesse ? Peut-être ? Il ne peut rien dire sur ces familles où des enfants naissent chaque année et meurent au rythme des hivers. Ils met en mot des chiffres. Des dates, des noms, c'est déjà ça..
Alors quid de l'histoire de ces "pauvres gens" de tous ceux qui ne nous ont rien laissé si ce n'est que l'humble trace dans les registres des Archives du lieu de leur vie.
Frustration extrême, déception souvent.
La tâche de l'historien est ingrate parfois ; nous devons faire avec ces manques, ces trous, ces vides, ces sources qui ne sont plus.
Faire avec le sans, écrire avec ce qui est là, présent, présent du passé, ce que cet avant nous a légué ou pas, ce qu'il en reste. Ecrire l'histoire avec les reliquats du passé.. et ne pas extrapoler, combler...
Ce ne serait alors plus de l'Histoire mais du roman.. L'histoire dans l'Histoire...
Et celle de ces pauvres gens est de ces histoires perdues dans le trou noir, le tourbillon des ans qui passent qui ne laissent que peu de traces si ce n'est celles inscrites dans les monuments dédiés aux morts. Mais ceux là, dès lors... Ne sont plus anonymes...
Brigitte Dusch, historienne, psychanalyste.
Ce sont ces inconnus, anonymes de l'Histoire que je rencontre au hasard des recensements, des Archives, des actes, de naissances, de décés, de mariages. Bonheurs et tragédies, rires, chagrin et larmes à la mort d'un nouveau né... Nés de père inconnu, enfant légitime... ou non...
Héros d'une vie, d'un évènement sur le théâtre du quotidien de l'histoire, que l'Histoire n'a pas retenu, n'a pas convoqué pour écrire, pour s'écrire, mais pourtant.
Tout ceux qui ont fait le passé, le nôtre. Ces "gens de peu" comme les nomment ceux qui ont un peu plus, ou croit en avoir davantage. Ces gens nombreux qui ont animés et fait vivre les villages des campagnes de France, dansés, pleurés. Qui ont fait. Qui les ont fait.
Ces gens qui ont été.
Mes recherches me conduisent vers ces archives là, vers ces traces là, souvent les seules qu'ils aient laissées à une postérité qui ne se soucient plus d'eux. Mais le présent s'en est-il soucié ?
Qui sont-ils ? Laboureur, cantonnier, chef cantonnier, couturière, ménagére, menuisier, vannier, manoeuvrier... Des métiers qui n'existent plus et ne feraient plus vivre...
Hommes, femmes, enfants...Familles.
Les Archives sont vivantes à qui sait les lire, les décoder, les écouter pour leur rendre âme et vie. Les Archives sont la vie passées et renferment tant de secrets, de peines, de joies de bonheurs et de larmes qu'est la vie de chacun d'entre nous.
Travail de l'Historien encore. Partir à la rencontre de ces hommes, femmes, enfants et comprendre leur histoire, leur vie. Mettre en images, mettre des mots sur les images. Faire revivre ce passé pour le comprendre et peut-être mieux saisir ce qui a été pour expliquer ce qui est.
Depuis plusieurs mois je suis plongée dans ce début du XX° siècle, qui je le pense n'a vraiment commencé qu'en 1919, après cette guerre mondiale qui changea le monde, les hommes et les sociétés. Elle marque je crois un tournant fondamental moral et éthique, une articulation sur un monde nouveau où l'homme occupera une place différente. Elle réveille ce Thanotos endormi, ces pulsions de haine et de destruction. Le Mal a été libéré pour s'incarner quelques décennies plus tard, dans une violence inouïe, à peine pensable, imaginable... Où l'homme a montré le pire de lui même, la Bête immonde qu'il peut-être et devenir sans grand peine.
L'historien est le passeur, le témoin, mais pas le spectateur ! Il prend part à ce qu'il découvre, car ce qu'il voit, ce qu'il lit ne peut le laisser indemne. Il appartient alors au témoin de transmettre le message, de témoigner de ce passé qu'il vient de côtoyer.
Un rôle difficile et complexe car il se doit de rester neutre, sans être bienveillant vis à vis des événements, relater les faits et rien que des faits, ne pas juger mais analyser au prisme du contexte et tenter de penser avec l'esprit du moment, non le sien... D'une infinie difficulté, un exercice terriblement compliqué aux limites du possible. L'objectivité, comme l'ici et maintenant est la pire des ascèses. Ne pas se laisser envahir par ses émotions, son chagrin et sa peine aussi, sa colère, son parti pris.
Transfert, le transfert de l'historien existe bel et bien. Je lui avais consacré un chapitre dans ma recherche sur la duchesse de Longueville... Transfert et contre transfert, amour et haine.
L'histoire serait-elle aussi une question d'amour ?
Lire les Archives et l'histoire qu'elles nous racontent ne laissent pas indemnes, évidemment.
Alors que dire des pauvres gens ? Comment reconstruire leur histoire, leur passé, quelles traces, empreintes nous ont-ils laissés ? L'histoire de France et d'ailleurs s'intéresse aux monarques,princes du Sang ou autres Grands ne retenant les petits que pour comptabiliser la misère et les guerres, ce qui va la plupart du temps de pair. Pourtant ce sont bien ces armées de Pauvres gens, des villes et des campagnes qui ont bâtis le monde, à la sueur de leur front et de leur âme.
Que dire des pauvres gens ? Qui nous ont laissés peu de choses, avec bien de la chance, quelques lettres, un journal, les cartes postales.. Près de nous, un peu plus près quelques histoires qu'on transmets, légendes familiales qui parfois se perdent dans les méandres de la langue et des mémoires.
Que dire alors ? Comment écrire ? Comment construire ?
Partir de quoi ? Pour aller où. Si les Archives parlent, elles ne comblent pas le manque, celui de ce qui s'est passé, ce qui a été vécu. Il manque tellement de manques !
Que dire, que faire et que raconter à partir du manque, reconstituer un métier, un art, une vie est possible, mais la vie intime, l'intimité du quotidien.. Elle peut l'être également si nous disposons de suffisamment de matière ce qui est loin d'être le cas pour ces gens qui ne savaient pas écrire parfois.
Alors admettre qu'on ne saura pas, car Clio ne peut imaginer, écrire une fiction, elle peut au mieux supposer, poser des hypothèses.
Sans émotions... L'historien fait alors fi de sa propre perception, il ne peut rien dire de la mort de ce bébé de 2 mois... de cette femme morte le jour de la naissance de sa fille, ces prénoms identiques à celui du père de la mère ou du dernier né... Le psychanalyste comprend, relie... tente une approche mais l'historien ?
Il ne peut pas mettre de mots sur l'éprouvé, la tristesse ? Peut-être ? Il ne peut rien dire sur ces familles où des enfants naissent chaque année et meurent au rythme des hivers. Ils met en mot des chiffres. Des dates, des noms, c'est déjà ça..
Alors quid de l'histoire de ces "pauvres gens" de tous ceux qui ne nous ont rien laissé si ce n'est que l'humble trace dans les registres des Archives du lieu de leur vie.
Frustration extrême, déception souvent.
La tâche de l'historien est ingrate parfois ; nous devons faire avec ces manques, ces trous, ces vides, ces sources qui ne sont plus.
Faire avec le sans, écrire avec ce qui est là, présent, présent du passé, ce que cet avant nous a légué ou pas, ce qu'il en reste. Ecrire l'histoire avec les reliquats du passé.. et ne pas extrapoler, combler...
Ce ne serait alors plus de l'Histoire mais du roman.. L'histoire dans l'Histoire...
Et celle de ces pauvres gens est de ces histoires perdues dans le trou noir, le tourbillon des ans qui passent qui ne laissent que peu de traces si ce n'est celles inscrites dans les monuments dédiés aux morts. Mais ceux là, dès lors... Ne sont plus anonymes...
Brigitte Dusch, historienne, psychanalyste.
jeudi 17 juillet 2014
Triste anniversaire 16-17 juillet 1942
Il y a des anniversaires dont on se passerait bien, des dates qu'on aimerait ne pas avoir à commémorer puisque c'est le mot à la mode, devoir de mémoire, souvenirs..
Des actes qui n'auraient jamais du être, mis en scène...
Notre société a tant de choses à se prouver qu'elle plonge dans le passé pour s'excuser de ne pas avoir le temps de gérer l'horreur et l'ignominie du présent.
La veille de la fête nationale de ce pays il s'y est passé des choses relevant de l'impensable et de l'innommable, des faits qu'on pensait d'une autre époque, d'un autre temps. Qu'on croyait révolus.
Pourtant les rues de Paris, et d'autres villes de la France raisonnaient des cris de "mort aux juifs"... Cris et gestes de haine... Encore !
Vitrines brisées, magasins saccagés...
Est-il besoin de rappeler une certaine nuit dans les villes d'un autre pays.. Ennemi alors... Il n'y a pas si longtemps
Actes qui ont été blâmés, jugés, condamnés..
Et pourtant !
Consternation, peine, colère, tristesse et ce sentiment de détresse profonde une fois encore?
Une fois de trop.
J'ai entendu les témoignages de ceux qui y étaient, les vidéos prises par mon amie Estie, et d'autres, j'ai entendu les cris, hurlements terrifiant, vus ce déferlement de violence...
Mais surtout j'ai vu...
Ces regards interrogateurs...
Des regards remplis de peurs, d'angoisse...
Les regards de ceux qui justement en ce mois de juillet 42 !
La Rafle du Vel d'Hiv..
16-17 juillet 1942, c'est la guerre certes, mais quand même. J'ai du mal à imaginer les forces de l'ordre, des pères de famille, des hommes, des sujets humains, rassembler leurs semblables dans un ghetto afin de les livrer à l'ennemi...
Hommes, femmes, enfants, vieillards, bébés...
L'horreur absolue !
Encore...
Pourtant, tout cela a bien eu lieu, dans ce lieu qu'est la France qui s'auto-proclame "Pays de la liberté et des droits de l'Homme"
Mais de quel homme ?
J'ai déjà souligné à maintes reprises que de l'histoire les hommes n'en tiraient leçon. Nul enseignement n'en a été appris aucune conclusion ... Rien.
Tout recommence encore et encore
On convoquera la haine, le mal, les pulsions. On convoquera tout ça et puis ?
Quid ?
Hier une amie m'écrit "... C'est pourquoi je parle autour de moi, de Dora, d'Hélène et de sa famille, pour qu'on ne les oublie pas"
Combien de Dora et d'Hélène ont été conduites au Vel d'Hiv par des gendarmes et policiers zélés aux ordres de la police de Vichy ?
Même les autorités allemandes s'en étonnaient, ne pensaient pas que ce gouvernement et ses complices pouvaient collaborer au delà du pensable, au delà de leurs demandes.
Ainsi, l'être humain nous étonnera toujours, s'il est capable du meilleur, il se montre le plus souvent hélas capable du pire.
Je lis aussi "nul oubli, nul pardon". Bien sur que non, on ne peut ni pardonner, encore moins oublier, mais peut-on espérer. Peut-on avoir ce secret espoir que tout cela ne se reproduira pas, que plus jamais ça n'est pas une vaine prière ?
Mais si pour faire la paix il faut être deux, pour vivre ensemble il faut être tous, tous à le vouloir... ?
Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne.
Des actes qui n'auraient jamais du être, mis en scène...
Notre société a tant de choses à se prouver qu'elle plonge dans le passé pour s'excuser de ne pas avoir le temps de gérer l'horreur et l'ignominie du présent.
La veille de la fête nationale de ce pays il s'y est passé des choses relevant de l'impensable et de l'innommable, des faits qu'on pensait d'une autre époque, d'un autre temps. Qu'on croyait révolus.
Pourtant les rues de Paris, et d'autres villes de la France raisonnaient des cris de "mort aux juifs"... Cris et gestes de haine... Encore !
Vitrines brisées, magasins saccagés...
Est-il besoin de rappeler une certaine nuit dans les villes d'un autre pays.. Ennemi alors... Il n'y a pas si longtemps
Actes qui ont été blâmés, jugés, condamnés..
Et pourtant !
Consternation, peine, colère, tristesse et ce sentiment de détresse profonde une fois encore?
Une fois de trop.
J'ai entendu les témoignages de ceux qui y étaient, les vidéos prises par mon amie Estie, et d'autres, j'ai entendu les cris, hurlements terrifiant, vus ce déferlement de violence...
Mais surtout j'ai vu...
Ces regards interrogateurs...
Des regards remplis de peurs, d'angoisse...
Les regards de ceux qui justement en ce mois de juillet 42 !
La Rafle du Vel d'Hiv..
16-17 juillet 1942, c'est la guerre certes, mais quand même. J'ai du mal à imaginer les forces de l'ordre, des pères de famille, des hommes, des sujets humains, rassembler leurs semblables dans un ghetto afin de les livrer à l'ennemi...
Hommes, femmes, enfants, vieillards, bébés...
L'horreur absolue !
Encore...
Pourtant, tout cela a bien eu lieu, dans ce lieu qu'est la France qui s'auto-proclame "Pays de la liberté et des droits de l'Homme"
Mais de quel homme ?
J'ai déjà souligné à maintes reprises que de l'histoire les hommes n'en tiraient leçon. Nul enseignement n'en a été appris aucune conclusion ... Rien.
Tout recommence encore et encore
On convoquera la haine, le mal, les pulsions. On convoquera tout ça et puis ?
Quid ?
Hier une amie m'écrit "... C'est pourquoi je parle autour de moi, de Dora, d'Hélène et de sa famille, pour qu'on ne les oublie pas"
Combien de Dora et d'Hélène ont été conduites au Vel d'Hiv par des gendarmes et policiers zélés aux ordres de la police de Vichy ?
Même les autorités allemandes s'en étonnaient, ne pensaient pas que ce gouvernement et ses complices pouvaient collaborer au delà du pensable, au delà de leurs demandes.
Ainsi, l'être humain nous étonnera toujours, s'il est capable du meilleur, il se montre le plus souvent hélas capable du pire.
Je lis aussi "nul oubli, nul pardon". Bien sur que non, on ne peut ni pardonner, encore moins oublier, mais peut-on espérer. Peut-on avoir ce secret espoir que tout cela ne se reproduira pas, que plus jamais ça n'est pas une vaine prière ?
Mais si pour faire la paix il faut être deux, pour vivre ensemble il faut être tous, tous à le vouloir... ?
Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne.
lundi 14 juillet 2014
Dire et Bribes
Ce rêve me hante souvent
Comme les autres
C'est souvent les mêmes,
Une sorte de feuilleton, une bonne série, parfois moins bonne
Je m'y retrouve, là où je l'ai laissé
Pour le prochain épisode
Rêver c'est fatiguant
Et je me réveille épuisé
Toutes les nuits j'escalade
Des murs de pierres aux escaliers insolites
Escaliers réguliers, à pic et irréguliers...
Je saute, vite, je cours et j'arrive
J'y arrive ! Où ? Mais nulle part
Ce n'est pas important ?
Faut-il toujours aller quelque part ?
Puis je saute, encore mais dans le vide sûr de moi que je suis car ça marche à chaque fois dans le rêve dans les rêves que je fais je retombe sur mes pieds toujours sans savoir pourquoi c'est magique je lâche prise enfin une bonne fois pour toute il n'y a pas d'autres issues et puis on verra bien.
..................................................................
Des obstacles, des cassures, des brisures
C'est fatigant le rêve
Je me réveille épuisé
Je marche dans des endroits improbables qui n'existent pas
Ailleurs qu'ici, dans mes rêves
Endroits singuliers, parenthèses et refuges
Asile !
C'est confortable le rêve
Mais il faut se réveiller
Se réveiller fatigué, tellement fatigué...
Dixit.
Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne
Comme les autres
C'est souvent les mêmes,
Une sorte de feuilleton, une bonne série, parfois moins bonne
Je m'y retrouve, là où je l'ai laissé
Pour le prochain épisode
Rêver c'est fatiguant
Et je me réveille épuisé
Toutes les nuits j'escalade
Des murs de pierres aux escaliers insolites
Escaliers réguliers, à pic et irréguliers...
Je saute, vite, je cours et j'arrive
J'y arrive ! Où ? Mais nulle part
Ce n'est pas important ?
Faut-il toujours aller quelque part ?
Puis je saute, encore mais dans le vide sûr de moi que je suis car ça marche à chaque fois dans le rêve dans les rêves que je fais je retombe sur mes pieds toujours sans savoir pourquoi c'est magique je lâche prise enfin une bonne fois pour toute il n'y a pas d'autres issues et puis on verra bien.
..................................................................
Des obstacles, des cassures, des brisures
C'est fatigant le rêve
Je me réveille épuisé
Je marche dans des endroits improbables qui n'existent pas
Ailleurs qu'ici, dans mes rêves
Endroits singuliers, parenthèses et refuges
Asile !
C'est confortable le rêve
Mais il faut se réveiller
Se réveiller fatigué, tellement fatigué...
Dixit.
Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne
samedi 28 juin 2014
La Guerre.
On me demande souvent "mais pourquoi la guerre vous fascine t-elle à ce point ?"
La guerre ne me fascine pas, elle m'interpelle, elle questionne en moi le sujet, la faculté du sujet à faire la guerre, ce pourquoi qui le conduit à mettre en scène ces actes là.
La guerre, faire la guerre, jouer à la guerre, sauf qu'elle n'est pas un jeu, et que le je lorsqu'il s'y frotte y laisse des plumes et s'y pique. Toujours.
La guerre est là, toujours au coeur de l'histoire des Hommes depuis les Origines... La guerre ordonne, fait et défait les frontières, trace les lignes de démarcation, les gomme, les remodèles, sans se soucier vraiment des hommes, seule compte la terre, ce morceau de territoire, d'accès à la mer... Sans se soucier des hommes.
Pourtant ce sont les hommes qui font, qui vont à la guerre, qui en reviennent ou pas. Mais peu importe il y en aura une autre, et encore une autre, toujours une autre, qui sera la dernière, qui sera pour qu'il n'y en ait plus d'autres jamais.
Et pourtant !
Alors pourquoi la Guerre ?
Freud a tenté d'y répondre dans la longue lettre qu'il a adressé à Einstein. Tenté. On peut toujours essayer. On peut toujours poser des hypothèses, voir le Mal qui est en chacun de nous se libérer et être légitimé pour raison d'état, se dire que nous restons coûte que coûte un être sauvage, une sorte de monstre, de Minotaure dont la mince couche de vernis a craqué... vite et bien, pour réveler la vraie nature, l'état de nature... Violence, haine, destruction, de-s-humanité.
Se qui se cache ne tient pas, ne tient qu'à un fil, celui de la vie ou de la mort, une bombe à retardement. Et si on se trompe de fil, elle explose...
Mais encore ? Mais toujours
Depuis plusieurs mois je m'intéresse à la guerre 14-18, cent ans déjà ! Cent ans et pourtant. Depuis ce temps j'essaie de comprendre le quotidien de ces hommes sur le Front, sur les champs de bataille, mais pas seulement, car la guerre n'épargne rien, elle est rapidement partout, et l'arrière s'efface pour laisser la place à une guerre totale, sans pitié. Il ne reste plus rien d'humain, d'humanité dans ce carnage, dans cette tragédie où tout n'est que ruines et ravages.
Pourtant ! Tout se mettait en place pour l'homme, son confort, son avenir, son plaisir. Le progrès, celui que la "civilisation" était sensée lui offrir, lui donner pour réduire la peine, le travail.
Profiter. Aspirer à une autre forme de bonheur que ce progrès devait apporter, apprécier la vie, les choses de la vie....
Pourtant ?
Encore pourtant.. Pour tant de progrès, d'avancée sur le chemin du bonheur, de la vie aisée, de la douceur de vivre. Pour tant ?
On dit souvent que cette maudite guerre est arrivée car tout avait été tenté en vain !
Qu'elle était la seule issue à un conflit qui rodait lui aussi, comme la mort toujours prête à sauter sur sa proie, comme si les hommes ne pouvaient jouir sans honte, sans peine et culpabilité du bonheur et de la paix qui l'accompagne ?
Comme s'il était nécessaire que la pulsion se décharge et libère la violence qu'elle n'en pouvait plus de contenir.
Contenir ce qui ne tient plus..
Mais la guerre se décide et contraint ceux qui ne l'ont pas décidé à être en première ligne, à donner, à gâcher leur vie qui ne leur appartient plus
Montre t-elle alors les limites ou les illusions de la liberté de l'être, de la singularité, du désir d'individualité et par là de la démocratie ?
Faisant ainsi du sujet libre le fragment d'un tout qui ne peut être que totalitaire. Un pour tous, mais jamais tous pour un.
Le un n'existe plus, mais a t-il seulement existé.. Illusion ? Encore
L'homme n'est plus, il devient in humain, il lui faut sortir de l'Humanité et du monde des hommes pour rejoindre les champs de bataille ?
Soldat de plomb et de larmes qui le plombe au fond des tranchées de l'horreur et de la boucherie, avançant à la mort sans savoir vraiment pourquoi ? Etre là ? Plutôt qu'ici ou ailleurs, sans l'avoir voulu, décider, obéir, servir, mourir, crever... !
"La guerre c'est moche", me dit un jour un étudiant... Oui, c'est toujours moche, il n'y rien de plus barbare. C'est l'esthétique de l'horreur, la fascination du Néant, la marche vers l'Enfer qui est sur terre, car la seule issue est d'en finir...
Vie, vies sacrifiées sur l'autel de la sauvagerie, de l'inhumanité, de l'hypocrisie des hommes qui ont la certitude de défendre un bout de terre qui leur appartient.
Illusion encore ! La guerre nous montre l'homme tel qu'il est, à l'âge de pierre, à l'âge des Origines, l'homme de la horde qui se donne des airs civilisés sous de beaux habits dorés en usant d'un langage châtié, comble de la perversion ...
Brigitte Dusch, psychanalyste, historienne.
La guerre ne me fascine pas, elle m'interpelle, elle questionne en moi le sujet, la faculté du sujet à faire la guerre, ce pourquoi qui le conduit à mettre en scène ces actes là.
La guerre, faire la guerre, jouer à la guerre, sauf qu'elle n'est pas un jeu, et que le je lorsqu'il s'y frotte y laisse des plumes et s'y pique. Toujours.
La guerre est là, toujours au coeur de l'histoire des Hommes depuis les Origines... La guerre ordonne, fait et défait les frontières, trace les lignes de démarcation, les gomme, les remodèles, sans se soucier vraiment des hommes, seule compte la terre, ce morceau de territoire, d'accès à la mer... Sans se soucier des hommes.
Pourtant ce sont les hommes qui font, qui vont à la guerre, qui en reviennent ou pas. Mais peu importe il y en aura une autre, et encore une autre, toujours une autre, qui sera la dernière, qui sera pour qu'il n'y en ait plus d'autres jamais.
Et pourtant !
Alors pourquoi la Guerre ?
Freud a tenté d'y répondre dans la longue lettre qu'il a adressé à Einstein. Tenté. On peut toujours essayer. On peut toujours poser des hypothèses, voir le Mal qui est en chacun de nous se libérer et être légitimé pour raison d'état, se dire que nous restons coûte que coûte un être sauvage, une sorte de monstre, de Minotaure dont la mince couche de vernis a craqué... vite et bien, pour réveler la vraie nature, l'état de nature... Violence, haine, destruction, de-s-humanité.
Se qui se cache ne tient pas, ne tient qu'à un fil, celui de la vie ou de la mort, une bombe à retardement. Et si on se trompe de fil, elle explose...
Mais encore ? Mais toujours
Depuis plusieurs mois je m'intéresse à la guerre 14-18, cent ans déjà ! Cent ans et pourtant. Depuis ce temps j'essaie de comprendre le quotidien de ces hommes sur le Front, sur les champs de bataille, mais pas seulement, car la guerre n'épargne rien, elle est rapidement partout, et l'arrière s'efface pour laisser la place à une guerre totale, sans pitié. Il ne reste plus rien d'humain, d'humanité dans ce carnage, dans cette tragédie où tout n'est que ruines et ravages.
Pourtant ! Tout se mettait en place pour l'homme, son confort, son avenir, son plaisir. Le progrès, celui que la "civilisation" était sensée lui offrir, lui donner pour réduire la peine, le travail.
Profiter. Aspirer à une autre forme de bonheur que ce progrès devait apporter, apprécier la vie, les choses de la vie....
Pourtant ?
Encore pourtant.. Pour tant de progrès, d'avancée sur le chemin du bonheur, de la vie aisée, de la douceur de vivre. Pour tant ?
On dit souvent que cette maudite guerre est arrivée car tout avait été tenté en vain !
Qu'elle était la seule issue à un conflit qui rodait lui aussi, comme la mort toujours prête à sauter sur sa proie, comme si les hommes ne pouvaient jouir sans honte, sans peine et culpabilité du bonheur et de la paix qui l'accompagne ?
Comme s'il était nécessaire que la pulsion se décharge et libère la violence qu'elle n'en pouvait plus de contenir.
Contenir ce qui ne tient plus..
Mais la guerre se décide et contraint ceux qui ne l'ont pas décidé à être en première ligne, à donner, à gâcher leur vie qui ne leur appartient plus
Montre t-elle alors les limites ou les illusions de la liberté de l'être, de la singularité, du désir d'individualité et par là de la démocratie ?
Faisant ainsi du sujet libre le fragment d'un tout qui ne peut être que totalitaire. Un pour tous, mais jamais tous pour un.
Le un n'existe plus, mais a t-il seulement existé.. Illusion ? Encore
L'homme n'est plus, il devient in humain, il lui faut sortir de l'Humanité et du monde des hommes pour rejoindre les champs de bataille ?
Soldat de plomb et de larmes qui le plombe au fond des tranchées de l'horreur et de la boucherie, avançant à la mort sans savoir vraiment pourquoi ? Etre là ? Plutôt qu'ici ou ailleurs, sans l'avoir voulu, décider, obéir, servir, mourir, crever... !
"La guerre c'est moche", me dit un jour un étudiant... Oui, c'est toujours moche, il n'y rien de plus barbare. C'est l'esthétique de l'horreur, la fascination du Néant, la marche vers l'Enfer qui est sur terre, car la seule issue est d'en finir...
Vie, vies sacrifiées sur l'autel de la sauvagerie, de l'inhumanité, de l'hypocrisie des hommes qui ont la certitude de défendre un bout de terre qui leur appartient.
Illusion encore ! La guerre nous montre l'homme tel qu'il est, à l'âge de pierre, à l'âge des Origines, l'homme de la horde qui se donne des airs civilisés sous de beaux habits dorés en usant d'un langage châtié, comble de la perversion ...
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vendredi 27 juin 2014
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Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.
Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.
Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.