Psychanalyse Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

jeudi 23 février 2012

J'y arrive pas

J'ai écris cet article il y a quelques temps, destiné à un autre lieu, je le mets à présent ici, pour tenter de lever le voile sur certains silences.

J'y arrive pas

Depuis une vingtaine d'années, je reçois dans un cadre particulier des enfants en "difficultés scolaire"... Les parents pour la plupart du temps démunis n'y arrivent pas !
Ces enfants n'y arrivent pas.
Ils n'arrivent pas à apprendre, à retenir, à organiser leurs connaissances, à maintenir leur attention
Pendant toutes ces années, j'ai entendu, écouté ces enfants, adolescents, plus grands aussi parfois, dire leur souffrance, mais aussi et surtout leur désir d'y arriver
"L'alliance thérapeutique" que nous construisons peu à peu, le travail que nous menons sur le plan cognitif, psychique, scolaire leur permet...


Très impliquée dans ces processus, dans ces questionnements de difficultés scolaire j'ai ouvert sur Facebook une page spéciale pour en parler, et surtout pour en sortir. Pour dire qu'il existe des solutions. Dire qu'ils ne sont pas seuls, parents et enfants...
Dire, mettre des mots, pour démythifier, démystifier, dédramatiser.

Mais surtout pour expliquer qu'avant tout, il faut comprendre, explorer, savoir pourquoi. Connaitre l'orgine de ce "j'y arrive pas"
Il s'agit alors de dépister, d'objectiver.
C'est le travail d'une équipe pluridisciplinaire...C'est le résultat d'une collaboration, celles de divers professionnels qui mettent "l'enfant qui n'y arrive pas" au coeur de l'action, de l'élaboration personnalisée d'un projet.
Je laisse la parole à ces enfants, ce sont leurs mots, c'est leur parole....C'est ce qu'ils nous disent, c'est ce qu'ils veulent que nous entendions !
Alors écoutons !



J'y arrive pas,J'ai pas le temps de recopier les devoirs à la fin du cours, j'ai pas le temps,
J'y arrive pas
J'ai pas pu prendre toutes les notes, j'ai pas le temps de les écrire
J'y arrive pasJ'ai pas pu écrire la dictée sans oublier des mots
j'y arrive pasC'est difficile de mettre ce que je pense à l'écrit, pourtant j'ai appris mes leçons,
J'y arrive pas
Je peux pas reproduire les dessins que la maitresse me demande
J'y arrive pas
Je ne comprends pas ce qui est demandé et je sais pas répondre
J'y arrive pas
Pourquoi il y a des ne...pas, des mots qui veulent dire le contraire ?
J'y arrive pasJ'apprends mais je ne sais pas répondre aux questions...
J'y arrive pas
Je fais des fautes, je ne comprends pas la consigne, mes cahiers sont des torchons, j'arrive pas à ranger mon cartable, j'oublie mes cahiers, je comprends pas ce qu'il faut faire, je n'arrive pas à poser une opération, je comprends pas le rapports des questions avec l'image, je ne sais pas ce qu'on attend de moi, je sais répondre tout bien à l'oral, mais pas sur la feuille, je sais pas organiser mon emploi du temps, je sais pas remplir mon cahier de texte, ça va trop vite pour moi, j'ai pas le temps de finir, je n'arrive pas à faire des belles lettres, j''écris mal, je fais des taches sur mes copies, des ratures, je n'arrive pas à coordonner mes gestes en gym, je renverse mon verre, je fais des gestes brusques, j'ai du mal à savoir si c'est à droite ou à gauche, j'arrive pas à tourner la clé dans le bons sens, je n'arrive pas à comprendre pour nager, je ne sais pas jouer aux sports collectifs, je sais pas le mot qui veut dire ça, en langue c'est la cata, je comprends rien aux déclinaisons, je confonds les lettres, je n'entends pas la différence entre le b et le p, je ne sais toujours pas bien lire, je ne sais pas écrire même sur un forum...

Alors...

On se moque de moi, j'ai des mauvaises notes, l'école est un supplice, on me traite de fainéant, on me fait redoubler mes classes, on dit que je suis un cochon, on me fait la honte, on me dispute sans arrêt, je suis toujours puni et je comprends pas pourquoi, on m'accuse de pas apprendre mes leçons, de ne rien faire, de ne pas faire mes devoirs, on ne traite de bon à rien, je suis dégouté, même si je bosse comme un dingue j'ai des notes lamentables, je suis découragé, j'y arriverai jamais, on me dit que je suis nul, que j'ai pas ma place à l'école, on veut me mettre en bac pro et j'ai pas envie de ça...

Donc

Je souffre, je me replie, je n'ose plus prendre la parole, j'évite toutes les situations où je dois écrire, je ne vais pas sur les forums, j'écris pas à mes amis, je ne sais pas ce que je vais faire de ma vie, j'arriverai jamais à rien, je souffre dans mon coin, car personne ne veut croire que je fais des efforts

Pourtant

Je suis curieux, je m'interresse à plein de choses, je lis, je connais pleins de choses sur tout, je regarde des émissions scientifiques que je comprends, J'ai des passions, j'ai envie d'écrire un journal, des poèmes que j'ai dans la tête, une lettre à une fille qui me plait bien, j'ai tant de choses à transmettre, j'aime la vie...

Et je voudrai vous dire
J'y arrive pas, c'est pas entièrement ma faute, même si parfois je suis faignant parce que ça me décourage, J'y arrive pas, mais je suis intelligent, j'ai envie de réussir ma vie, de suivre des études, d'avoir des diplômes,
J'y arrive pas, mais c'est pas parce que j'y arrive pas que je suis un débile !

Ce texte est une somme non exhaustive des propos tenus par des enfants dys.. Donc différents.
Une grande souffrance ! Toujours en ressort !
Qu'ils soient le témoignage, leur témoignage, qu'ils soient entendus, relayés..
Non ces gosses ne sont pas débiles, bien loin de là, ils souffrent de dyslexie, dysorthographie, dyspraxie... Et on peut, même si on ne guérit pas, faire quelque chose
C'est ce quelque chose là qui nous interpelle, et qui ne doit plus clocher...

dimanche 19 février 2012

A méditer

Je relisais quelques pages de La République de Platon et voulais partager ces quelques lignes qui méritent intérêt et réflexion.
Des siècles plus tard il est toujours actuel, moderne, visionnaire.
A moins que ...
L'homme, les choses, la société auraient alors si peu changées ?
Leçons alors ne seraient pas tirées ?
Répètion... Inlassablement.
Je vous laisse méditer.

"Lorsque les pères s'habituent à laisser faire les enfants
Lorsque les fils ne tiennent plus compte de leur parole
Lorsque les maîtres tremblent devant leurs élèves et préfèrent les flatter
Lorsque finalement les jeunes méprisent les lois parce qu'ils ne reconnaissent plus au dessus d'eux l'autorité de rien ni de personne, alors c'est là en toute beauté et en toute jeunesse le début de la Tyrannie"
Platon

vendredi 17 février 2012

L'ours en peluche

Elle  retire brusquement l'ours en peluche que la petite fille serrait fort dans ses bras
- "Tu es trop grande maintenant !"
Elle donne l'ours en peluche au petit garçon qui se tenait là
-"C'est pour toi maintenant"
La petite fille ne dit rien, se tait, ne pleure pas... Elle aimait cet ours plus que tout, elle lui avait donné un nom, c'était son ours en peluche. Elle en prenait soin, y faisait attention...
Cet ours là, n'était plus à elle, maintenant..
Elle n'avait rien demandé, le petit garçon non plus !
L'adulte avait décidé....

Plus jamais la petite fille ne s'attacha à un jouet, une poupée, un ours en peluche...
Plus jamais la petite fille ne s'attacha...
Le petit garçon s'amusait à faire battre ses ours... La petite fille le regardait
Elle voyait son ours en peluche déchiré, abimé....
Elle gardait au fond de son coeur les larmes qu'elle aurait aimé verser....

Elle arrache la petite fille des bras de son grand père
- "Tu pars, tu es trop grande maintenant"
La petite fille résiste, s'accroche au bras de son grand père qui la serre très fort,
Il ne veut pas la laisser partir
Pour la première fois elle voit le vieil homme pleurer
Alors elle  laisse ses larmes venir...
Toutes les larmes, toutes ses larmes... celles de l'ours, des gifles, des réprimandes, des colères...
Toutes...
Ce jour là elle  pleure toutes les larmes de son corps, de son âme, de son petit corps...
Toutes les larmes de la peine, de la douleur, de la souffrance, de la révolte, de l'incompréhension...
Cette fois non plus elle ne demande pas "pourquoi ?"
Sans doute n'y en a-il pas !

Inflexible, elle arrache la petite fille des bras de son grand père
Malgré les larmes, les suppliques du vieil homme
Malgré les larmes, les suppliques de l'enfant
Elle l'emmène vers l'enfer....
L'adulte avait décidé !

lundi 13 février 2012

Nous sommes tous grecs

Ce matin beaucoup se sont réveillés avec la gueule de bois !
Les fossoyeurs ont fait leur oeuvre infecte et infâme et mis à terre là où elle a vu le jour la Démocratie !
Un de mes amis a mis sur son mur ces mots magnifiques et en hommage à ces hommes et ces femmes spoliés, volés, humiliés je les partage ici.
Car nous sommes tous grecs, ceux qui ne le sommes pas encore, le seront bientôt, ce n'est qu'une question de jours...
Car il faut maintenant sortir hors la caverne, non pour assister au Banquet mais plutôt au repas du Commandeur !
Car nous avons tous oublié un peu vite que la démocratie ne s'impose pas mais qu'elle se conquiert !
Et nous savons qu'aucun projet politique ne peut reposer sur la pauvreté, la misère et le non espoir
Meurtriers de la parole, ils ont aussi et cela va de pair, tué la démocratie !

"La démocratie est née à Athènes quand Solon a annulé les dettes des pauvres envers les riches." Theodorakis

Exit !
Merci Thierry :)


En attendant les barbares, de Constantin Cavafy
traduit du grec par Marguerite Yourcenar et Constantin Dimaras


"Qu'attendons-nous, rassemblés sur l'agora?
On dit que les Barbares seront là aujourd'hui.

Pourquoi cette léthargie, au Sénat?

Pourquoi les sénateurs restent-ils sans légiférer?

Parce que les Barbares seront là aujourd'hui.

À quoi bon faire des lois à présent?
Ce sont les Barbares qui bientôt les feront.

Pourquoi notre empereur s'est-il levé si tôt?
Pourquoi se tient-il devant la plus grande porte de la ville,
solennel, assis sur son trône, coiffé de sa couronne?

Parce que les Barbares seront là aujourd'hui
et que notre empereur attend d'accueillir
leur chef. Il a même préparé un parchemin
à lui remettre, où sont conférés
nombreux titres et nombreuses dignités.

Pourquoi nos deux consuls et nos préteurs sont-ils
sortis aujourd'hui, vêtus de leurs toges rouges et brodées?
Pourquoi ces bracelets sertis d'améthystes,
ces bagues où étincellent des émeraudes polies?
Pourquoi aujourd'hui ces cannes précieuses
finement ciselées d'or et d'argent?

Parce que les Barbares seront là aujourd'hui
et que pareilles choses éblouissent les Barbares.

Pourquoi nos habiles rhéteurs ne viennent-ils pas à l'ordinaire prononcer leurs discours et dire leurs mots?

Parce que les Barbares seront là aujourd'hui
et que l'éloquence et les harangues les ennuient.

Pourquoi ce trouble, cette subite
inquiétude? - Comme les visages sont graves!
Pourquoi places et rues si vite désertées?
Pourquoi chacun repart-il chez lui le visage soucieux?

Parce que la nuit est tombée et que les Barbares ne sont pas venus
et certains qui arrivent des frontières
disent qu'il n'y a plus de Barbares.

Mais alors, qu'allons-nous devenir sans les Barbares?
Ces gens étaient en somme une solution."

mercredi 8 février 2012

L'absence présente

"Je pense souvent à maman, mais je ne sais plus très bien comment elle est"
Dit la petite fille..
"Je ne me rappelle plus sa voix, non plus, mais je l'aime maman"

L'absence !
Trop tôt !
Il est toujours trop tôt pour ceux qui restent
Pour ceux qui ont encore du chemin à faire
Seuls,
Du moins sans celui ou celle qui n'est plus
Qui n'est plus là.
Qui est parti, qui a hâté son départ peut-être....?
La mort emporte, enlève aussi tout projet, tout espoir, et tout futur, tout demain
La vie devient un calvaire, insupportable, insoutenable
Car justement ça ne tient plus !
Ca
C'est bancal, ça cloche, car quelqu'un manque, manque
L'équilibre vacille, l'édifice s'écroule !
Il manque
Ce quelqu'un qui faisait que ça tenait, du moins un peu
L'absence, la présence de l"absence, du moins celle là, celle qui est sans retour, car elle est, elle n'est que celle là, ou elle est celle là, cette absence là tue deux fois.
On ne peut s'y faire et plus rien ne sera comme avant. C'est justement parce qu'il y a un avant, que ça ne peut plus être pareil. Que ça sera autrement !
Peut-être, si c'est possible, si on veut, si on peut..
Car on veut toujours retourner en arrière, dans l'hier, faire comme si rien n'était advenu,
On veut continuer l'histoire....
Une histoire qui est finie.. Alors il faudra faire le deuil de cette histoire là, pour en recommencer une autre, essayer.. Tenter d'essayer ?
Se dire que peut-être on peut..
Qu'il faudra repartir, d'un ailleurs, d'un autre point, qu'il faudra prendre un autre départ, peut-être
Car quelque chose se sera arrêté, sera resté, là, définitivement.
On se demande alors, comme reprendre, là, à cet endroit même où la vie s'était arrêtée, là où il y avait un accroc, un raté, une absence qu'on ne pourra jamais combler.
Là où quoi qu'on fasse il y aura le vide, ce gouffre immense qui surgit d'un coup soudain et qui donne le vertige !
Un gouffre qui s'ouvre sur le vide infini...
Mais est-ce véritablement l'Infini, ce vaste continent obscur et sans limite ? Ce monde des Ténèbres d'où personne jamais n'est revenu ?
Le terme de l'ultime Quête ?
Infini ? Ou Chaos ?
Mais qu'est ce que cela change, puisqu'il faut rester, rester sans cet autre, dont les contours du visage, dont la voix se perd dans cet immensité, sans forme, sans fond...
S'estompe dans l'immensité, dans l'informe, dans les bruissements de l'inconnu.
Où plus rien ne raisonne.
Il ne reste que des souvenirs diffus, et confus, une confusion troublante et singulière. On ne se souvient plus très bien.
Mais de quoi ? Mais de qui ?
Ultime geste égoïste car on voudrait garder pour soi et pour soi seul, cette image là, cette image qu'on voudrait ne jamais voir disparaitre
Et pourtant tout se dissout, se fond dans cet obcsur et immense Infini. Un tout, indifférencié où tout et rien co-existent..
Ou rien et tout se rencontrent et se fondent....
Repartir alors ? Construire un pont ? Une passerelle entre cet avant et cet après à faire, à construire ?
Traverser ce vide ? Sans filet ? Se tenir sur le fil ténu tissant l'hier et le demain, pour essayer quand même malgré tout d'y installer une continuité, ravauder l'accroc ?
Retricoter un avenir, un demain, un futur.
Tâche ardue, complexe, terriblement douloureuse, car on ne trouvera jamais les fils de la même couleur pour retisser l'histoire. Les Parques ont fait leur oeuvre.
Pourtant il va falloir essayer..
Pouvons-nous alors nous inscrire dans cette discontinuité ?
Ou bien ?

Ceux que l'on aime partent toujours trop tôt, parfois même avant que l'on ait pu leur dire au revoir, parfois sans savoir à quel point ils nous étaient chers !
"Je ne lui ai pas dit je t'aime"
Combien sont partis sans avoir aimé, sans avoir raconté, sans avoir transmis ?
Celui et ceux qui restent n'en savent rien, ne savent rien ou presque de cette histoire là, d'une histoire qui n'est pas là leur, mais qui les touche quand même..
Ceux là, même qui sont partis ont emporté avec eux énigmes et secrets...Pour l'éternité !
Ils ne sont plus !
Partis, ils s'en sont allés.
Trop tôt ! On se demande alors pourquoi cette vie si brève ? Pourquoi ces quelques instants seulement ?
Ceux là laissent des traces, indicibles, insoupçonnables, ces pas que le vent ou la mer effacent mais qui restent gravés quelque part, au fond de nos mémoires.
Mémoire qui se livre elle aussi à un combat perdu presque à l'avance, celui de maintenir vif le défunt qui n'est plus que dépouille, corps sans vie, gisant, mais n'étant plus...
Il reste quoi alors ? La bougie qu'on allume le jour anniversaire, les photos qui jaunissent au fond d'un tiroir, clichés abandonnés des jours insouciants et heureux où jamais il ne serait venu de penser
Penser justement, mettre en acte la pensée c'est penser aussi sa finitude, mais la finitude de l'autre ? Intolérable, impensable car la mort relève de l'Impensé.
Il faut vivre et souffrir, souffrir pour vivre...Souffrir et mourir !
L'absence est venue tout soudain recouvrir de son ombre la vie du survivant, le plongeant dans les ténèbres d'une éternité sans fin...
Pour quoi ? Pour qui ?
Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...

Nota bene

Ce blog relate des bribes, des vies en respectant l'anonymat, ce l'éthique et la déontologie de ma fonction
Les événements, initiales, lieux, histoires... sont modifiés.

Il s'agit d'illustrer des situations, un concept, une problématique, un questionnement donnant lieu à une réflexion.
Ainsi toute ressemblance, similitude serait donc purement fortuite.

Vous étes venus

compteur visite blog

map