Psychanalye Aujourd'hui

Le blog de Brigitte Dusch psychanalyste historienne

Accompagner le désir d'être Soi
Le sujet humain est singulier, son histoire est unique, l'analyse lui permet de partir à sa rencontre et de tisser les liens, de prendre rendez-vous avec soi.

"J'accepte la grande aventure d'être moi". Simone de Beauvoir

Mon livre : "j'aime ma vie"

jeudi 26 juin 2008

Dentelle

De la dentelle verbale..!


Pour qualifier le "verbiage" des analystes, et par conséquent des analysants.... ?
Verbiage ?..... Il y aurait à dire !
Je ne peux cautionner qu'on définisse le discours de l'analysant comme une abondance de paroles vides de sens, dépourvues d'intérêt, comme un bavardage, un papillonnage, un délayage...C'est mal connaître l'analyse...
Chaque mot a un sens, une valeur, une force....Chaque mot fait sens, seul, avec l'autre, avec les autres, qui viennent....
En revanche, je veux bien l'entendre qualifier certains discours des analystes, ou de ceux qui se disent tels, et qui caquettent dans les salons sur les mathèmes et autres fariboles jetant l'anathème sur leur profession, (ou celle qu'ils sont censés, ou sensés représenter...)
Discours incompréhensibles, et à en croire certains de mes patients, tellement hermétiques et mystérieux qu'ils n'y retrouvent ni leurs mots, ni leurs émotions !
Mécanismes de défense pour se cacher et se protèger de la souffrance ? Ainsi on ne l'entend pas, et on glose...

Mais il ne s'agit pas de ce discours là, mais bien de celui du patient...Du sujet en souffrance qui s'adresse à un thérapeute (dans ce cas précis, cognitiviste) pour lui demander de l'aider à mettre en mots, donner du sens, historiser "la situation problème"(pour reprendre les termes consacrés en TCC).

Dentelle verbale. Couperet ! frustration ! "Cassé ! " pour reprendre les termes des ados....Après ça, "t'a plus envie de rien dire !"./

Pourtant, j'ai envie de m'arreter, un instant, pour entendre, dire, écouter ce mot, ces mots, me demander ce qu'ils veulent dire, ce qu'on peut leur faire dire, les faire tinter ! raisonner ! résonner ! Dring ! Drink !

Dentelle ? Le mot est joli, frivole aussi, mais joli !

Dentelle...Tout conte fait, le mot me plait, par la délicatesse et par le travail de l'artisan(e) qu'il évoque !
Dentelle verbale....Tout compte fait, cette expression me plait, par la mise en mots, mot à mot, pas à pas qu'elle implique !

De la dentelle ! Magique, aérien et fluide....
On imagine alors la dentellière filer, tricoter le fil !
On imagine aussi l'araignée tisser lentement sa toile !
Toile....Pour prendre dans les filets, dans les rets....

Métaphores alors ? Allégories ? Images ? Vues de l'esprit ?
Figures de style, tant littéraires qu'artistiques !
Figuratif....
Symbolique...

L'analysant s'allonge et parle, il peut le faire en face à face... La présence de l'analyste l'y invite, sa neutralité l'y aide..
Il parle, met en mots...Met des mots, associe librement....

La dentellière sans trame ni chaine...asssise à la lumière, du jour, sur le pas de la porte, derrière sa fenêtre, à la lueur de la flamme d'une bougie, fait danser les navettes.
Curieuse danse que celle là ! Avec ses doigts, elle fait valser les fuseaux...

L'analysant fait danser les mots, aussi... Il parle, parle ou se tait, ne dit rien ! blanc, silence. No comment !
L'analyste écoute ce silence... Ou tant de choses se passent, où tant de maux se disent. Ce silence où l'inconscient peut enfin s'exprimer, danser, valser....
Et les mots s'égrénent, dans la tête, puis dans le silence, et ils s'associent, forment des phrases et des images, de la dentelle !
Fragile, frivole, la dentelle de l'inconscient, le luxe de la parole, le luxe des passementeries qui bordent les habits que la vie nous donnent, qui enveloppent le corps et l'esprit souffrant, dansant à la lumière de la douleur qui crie et qui appelle....
Message en dentelles qui ne fait pas toujours dans la dentelle, verbiage, verbalité nécessaire pour exhorter au dehors du corps ces maux qui déchirent l'enveloppe qui n'en peut plus de contenir...

L'analyste ? Où est-il ? Comme la dentellière à l'ombre de la lumière, écoutant les mots qui s'égrainent au fil de la scéance, que le sujet déroule des fuseaux de son inconscient, qu'il rembobinent pour retricoter encore un demain qui lui sera ou semblera plus facile, plus simple à vivre, ou plus difficile, car le poids sera plus lourd, le fardeau moins léger...


Ou le fil plus difficile à manier, à filer, car il ne pourra vraiment le dénouer.
Il se dira que peut-être, il n'aurait pas du dérouler tout ça, dévider tout ça, que c'était bien où c'était, et que .... et que...
Mais maintenant c'est fait, accroc dans la dentelle, qu'il faudra peut-être repriser, dentelles qui s'effilochent... Qu'il faut trouver l'aiguille ou le crochet...?

Il parait que la guerre se fait parfois en dentelles, je ne sais s'il en est de même de l'analyse ?
Dans sa délicatesse peut-être, mais l'inconscent fait-il dans la dentelle ?
Image révolue d'une frivolité louisquatorzienne, la dentelle garde son mystère,mais fait quand même rêver. Toujours, encore !

Que se cache t-il derrière cette dentelle verbale, cette manière de mettre des mots sur son histoire, ou d'historiser sa singularité.
Faut-il user de la métaphore, des mots, figures pour mettre en mots sa souffrance, son désir, son manque ?

Qui du sujet ou de l'analysant en est le dentellier ou la dentellière ?

3 commentaires:

Charles a dit…

Bonjour Castor

J'aime beaucoup votre dentelle scribale. L'écriture s'anime et la parole vole de maux en mots comme vous le dites si bien.

Cette dentelle des psychanalystes me fait penser à ces merveilleuses dentelles entourant ces magnifiques vêtements des veuves endimanchées et emmessées ne pouvant sans doute se permettrent d'autre fantaisie avec leurs sombres atours.

castor a dit…

Merci Edouard d'être venu lire et d'avoir laissé trace de votre passage..
Je partage votre avis sur ces magnifiques dentelles, noires, veuves noires ? Mantes ou menthes religieuses ?
Oui mais voila, l'analyse n'est pas une messe, encore que certains séminaires peuvent le devenir.. Mais alors une messe en latin, ou personne ne comprend rien, mais fait mine de comprendre, mine de rien, le bas latin n'est pas à la portée du premier péquin venu ! Il faut des lettres pour suivre et prendre à la lettre ce que le maitre, faux gourou, du moment tonne du haut de sa chère chaire, qui côute très chèr !
Mais voilà, le sujet en souffrance qui s'adresse à l'analyste ou au thérapeute n'a que faire de ses dentelles, car sa souffrance à lui ne fait pas dans la dentelle, il n'a nul besoin de mots savants, en grec, latin ou langage pseudo scientifico linguistico lacanico analystico fumisterie !
Ce qu'il attend et ce pourquoi il paie, ce n'est pas pour qu'on glose sur son cas, qu'on en fasse une vignette clinique, qu'on l'expose comme les hystériques de Charcot, qu'on en fasse un papier dans une revue pseudo scientifique qui ne sera lue (si toutefois elle l'est) par un groupuscule de terroristes intellectuel.
Ce qu'il veut ce sujet là, et ces pseudo machins choses ont la réponse à leur fameux que me veut-il ? ce qu'il veut le sujet, est être reconnu comme tel : un sujet souffrant, sachant souffrir, en ayant assez de souffrir en souffrant et ne souffrant plus cette souffrance qui le fait souffrir tant et tant !
Ce qu'il veut, c'est lire, du moins ressentir que l'autre assis en face, ou derrière le divan ait compris cette souffrance là, et le lui témoignagne...Mais ce sera l'objet d'un autre article..
En quoi, la dentelle, engage la responsabilité de l'analyste
Bien à vous
Castor

castor a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
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